Chronique : L'histoire des templiers - 4ème partie

10 janvier 2013 par Orochti | Chronique historique | Moyen-âge - Les Croisades

Chronique : L'histoire des templiers - 3ème partie

Quatrième partie du dossier sur l'Histoire des Templiers. Retrouvez les précédentes parties par ici : Chronique des Templiers.

Après la tournée européenne du premier maitre du Temple, Hugues de Payns a permis à l'ordre de se développer autant financièrement qu'humainement, recrutant alors de plus en plus de monde. Nous avons vu dans la partie précédente comment un chevalier pouvait rentrer dans cet étrange ordre à la fois monastique et militaire. La cérémonie suivait des règles précises, avec une gestuelle importante, typique de la féodalité. Cependant, nous pouvons voir également avec l'entrée dans l'ordre une naissance d'un homme nouveau, abandonnant alors sa vie antérieur pour se consacrer uniquement à l'aide de ses frères et de la protection des pèlerins.

Aujourd'hui, nous nous intéressons à l'organisation de l'ordre avec d'abord la figure emblématique du maître de l'ordre du Temple. Puis, nous verrons en détail l'organisation de l'ordre, avec les autres dignitaires et leurs rôles.

  • Le maître du Temple
  • Les autres dignitaires
  • Bibliographie

Contrairement à ce que l'on pourrait croire, le maître de l'ordre Templier avait en réalité très peu de pouvoirs. Même s'il se situait au sommet de la pyramide hiérarchique, il ne possédait en réalité qu'un pouvoir très limité. C'est en effet très logique, l'ordre ne souhaitait pas à avoir à sa tête un homme au pouvoir personnel, aussi puissant qu'un roi. L'ordre était un ordre avant tout monastique, mais par sa nature militaire, cela pouvait être dangereux. Ainsi, dans la Règle du Temple, on voit le rôle du maître défini très simplement, avec un titre, important certes, mais plutôt honorifique.

Pour limiter ce pouvoir, c'était très simple. Toutes les décisions les plus importantes (nommer les dignitaires de l'ordre, acheter ou vendre des terres, déclarer la guerre ou la paix) devait se faire uniquement en présence de ses frères, et seulement après avoir obtenu leur accord. Ainsi, son rôle se limitait à un rôle représentatif, lors des visites officielles, ou encore lors de déclarations importantes, comme le départ en guerre.

L'élection d'un maître du Temple est une chose assez compliquée. En effet, la Règle du Temple reste assez floue, dans une vingtaine d'articles. Le principal problème est que l'élection pouvait varier très facilement d'un temps à l'autre, et la présence du chapitre exceptionnel changeait selon les disponibilités de chacun. Cela explique ainsi pourquoi les Occidentaux sont peu représentés, étant trop loin de Jérusalem.

Pourtant, ce chapitre n'avait pas un rôle décisif dans l'élection. Elle devait essentiellement nommer parmi les frères présents un « commandeur de l'élection ». Ce commandeur est défini selon la Règle comme étant « Un homme sage qui soit connu de toutes les provinces et de tous les frères, qui aime la paix et la concorde de la maison et qui ne suscite pas de division. »

Ensuite, ce même homme devait choisir un second compagnon, qui eux-mêmes en choisissaient deux autres, qui après en choisissaient quatre, etc.. jusqu'à obtenir le nombre de douze, en référence aux douze apôtres. Parmi ses douze hommes, nous y retrouvons huit chevaliers nobles et quatre sergents non nobles qui venaient tous de provinces. Les douze nommaient enfin un treizième, le chapelain qui est à l'image du Christ pour maintenir la cohésion du groupe. Ce collège de treize hommes décidait dans le plus grand secret le nouveau maître du Temple. Le commandeur de l'élection proclame lui-même le résultat : « Beaux Seigneurs frères, rendez grâce à Dieu, voici quel est notre maître »

Le nouveau maitre portait alors deux éléments : le bâton et la verge. Le bâton était là pour soutenir les faibles, la verge pour punir ceux qui fuirait le chemin à suivre.

Les maîtres de l'ordre Date de commandement
Hugues de Payns 1118-1136
Robert de Craon 1136-1149
Evrard des Barres 1149-1152
Bernard de Trémelay 1152-1153
André de Montbard 1153-1156
Bertrand de Blanquefort 1156-1169
Philippe de Naplouse 1169-1171
Eudes de Saint-Amand 1171-1179
Arnaud de la Tour Rouge 1180-1184
Gérard de Ridefort 1185-1189
Robert de Sablé 1191-1193
Gilbert Erail 1194-1200
Philippe du Plessis 1201-1209
Guillaume de Chartres 1210-1219
Pierre de Montaigu 1219-1232
Armand de Périgord 1232-1244
Richard de Bures 1244-1247
Guillaume de Sonnac 1247-1250
Renaud de Vichiers 1250-1256
Thomas Bérard 1256-1273
Guillaume de Beaujeu 1273-1291
Thibaut Gaudin 1291-1293
Jacques de Molay 1293-1314

Organisation de l'Ordre des TempliersAprès le maître du Temple, le second personnage le plus important est le sénéchal. Le sénéchal est celui qui remplace le maitre lors de ses absences. Il possède deux articles dans la Règle (99-100).De plus, il avait l'autorisation d'utiliser un sceau identique à celui du maître pour remplir les papiers officiels et autres missives lors de l'absence de ce dernier.

Le maréchal est responsable de l'équipement militaire, des armes, des chevaux et de la discipline. Il jouait également un rôle très important  lors des combats que nous étudierons dans une future chronique. Il représentait l'autorité militaire suprême au sein de l'ordre. Neuf articles lui sont consacrés (101-109). Lorsque le maître du Temple mourrait, c'était à lui de se charger de prévenir toutes les commanderies et d'organiser la venue d'un chapitre exceptionnel.

Le commandeur du Royaume de Jérusalem était le trésorier de l'ordre. Il devait donc gérer les transactions financières entre l'Orient et l'Occident. « Tous les avoirs de la maison, de quelque endroit qu'ils proviennent, d'en deçà des mers ou d'au-delà des mers doivent être rendues et baillés entre ses mains et il doit les mettre au trésor ».  Il récupérait également tous les butins de guerre, et devait gérer la répartition des hommes entre les différentes maisons et forteresses de la Terre Sainte. Une dizaine d'articles lui sont consacrés (110-119). A ses cotés se trouvait le drapier de l'Ordre,  qui s'occupait de toutes les ressources en literies. Il s'occupait également des tentes militaires lors des campagnes.

Le commandeur de la cité avait un rôle important, car répondait à un objectif premier de la création de l'ordre : protéger les pèlerins.  C'était également lui qui possédait l'immense privilège d'escorter la Vraie Croix, la relique sacré où le Christ fut crucifié, et de veiller sur elle, jour et nuit, lors des différentes campagnes. Cinq articles traitent de ce rôle (120-124).

Les commandeurs des provinces, ou le commandeur des commanderies avaient un rôle similaire, qui était la charge d'une commanderie, en Europe, comme en province, en Orient. Ces derniers avaient un rôle de précepteur, dirigeant ainsi la maison où vivaient les frères entre eux. De plus, ils avaient la charge de l'entretien et des réparations. Certains reçoivent des missions particulières, d'inspection la plupart du temps, que l'on surnomme « visiteurs ». L'article 125 à 137 décrit leur rôle dans la Règle.

Tableau des possessions de chaque rang dans l'ordre :

Statut dans l'ordre Possessions et hommes à leur service
Maître
  • 4 montures dont un destrier de guerre
  • 1 frère-chapelain
  • 1 clerc avec 3 chevaux
  • 1 sergent avec 2 chevaux
  • 1 valet avec 1 cheval
  • 1 maréchal-ferrant
  • 1 écrivain sarrasin
  • 1 turcopole
  • 1 cuisiner
  • 2 palefreniers
Sénéchal
  • 4 chevaux dont un palefroi
  • 2 écuyers
  • 1 chevalier avec 3 chevaux
  • 1 sergent avec 2 chevaux
  • 1 diacre-écrivain
  • 1 turcopole
  • 1 écrivain sarrasin monté
  • 2 palefreniers
Maréchal
  • 4 chevaux dont un destrier de guerre
  • 2 écuyers
  • 1 sergent monté
  • 1 turcopole monté
Commandeur du Royaume
  • 4 chevaux dont un palefroi
  • 2 écuyers
  • 1 sergent à 2 montures
  • 1 diacre lettré, 1 turcopole monté
  • 1 écrivain
  • 2 palefreniers
Commandeur de la cité
  • 4 montures dont un destrier de guerre
  • 2 écuyers
  • 1 sergent avec 2 chevaux
  • 1 écrivain sarrasin avec 1 cheval
  • 1 turcopole monté
Commandeur des provinces
  • 4 montures dont 1 palefroi
  • 1 chevalier
  • 1 sergent avec 2 montures
  • 1 diacre monté
  • 1 turcopole monté
  • 1 écrivain sarrasin monté
  • 1 palefrenier
Commandeur des commanderies
  • 4 montures
  • 2 écuyers
Chevalier et sergent
  • 3 à 4 montures
  • 1 à 2 écuyers
Total
  • 601 chevaux dont 3 montures de guerre et 3 palefrois
  • 1 chapelain
  • 1 clerc
  • 6 sergents
  • 1 valet
  • 1 maréchal ferrant
  • 4 écrivains sarrasins
  • 62 turcopoles
  • 1 cuisinier
  • 7 palefreniers
  • 12 écuyers
  • 2 chevaliers
  • 3  diacres

1 Ce sont des approximations, pour chaque statut à l’unité.

2 Cavaliers archers montés sur des chevaux arabes, habillé à la turque

Comme nous pouvons le constater, l'ordre possédait une richesse assez forte pour se permettre d'offrir à chaque nouvelle recrue ce genre d'offre. Certes, chaque rang doit posséder ses « outils », mais il faut tout de même avouer que c'était des dons généreux. 3 à 4 chevaux pour chaque nouveau chevalier dans l'ordre, nous imaginons rapidement la multiplication des écuries dans les domaines templiers. Toutefois, ne prenons ces chiffres que pour des approximations, où il est important de nuancer selon les époques et les événements.

Maintenant que nous connaissons mieux l'organisation de l'ordre, et le fonctionnement de chaque personnalité, nous pouvons partir en guerre. Rassurons nos amis lecteurs, qui ne devront pas prendre les armes à la prochaine chronique, nous étudierons juste le fonctionnement de l'armée, le rôle des chevaliers lors des guerres et des différentes batailles. A bientôt !

  • DAILLIEZ Laurent, Règles et statuts de l'Ordre du Temple, Éditions Dervy, 1997.
  • DEMURGER Alain, Croisades et Croisés au Moyen-âge, Flammarion, collection Champs, 2006, 410 pages.
  • FLORI JEAN, La croix, la tiare et l'épée : la croisade confisquée, Payot & Rivage, Collection Histoire, 2010, 350 pages.
  • HUCHET Patrick, Les Templiers de la gloire à la tragédie, Editions OUEST-France, Collection Histoire, 2010, 130 pages.
  • BRIAIS Bernard, Les Templiers, France Loisirs, collection Les mémoires du Temps, 2011, 190 pages.
  • Source des images : Wikipédia
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