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War Hospital

Ralta

Thématique

Première Guerre mondiale

20 février

2024

On a déjà vu des jeux de gestion d'hôpitaux, comme Theme Hospital de Bullfrog Productions en 1997, ou plus récemment, Two Point Hospital de Two Point Studios (2018). Ce qui rend War Hospital original, comme son nom l'indique, c'est que l'action se déroule pendant la Première Guerre mondiale. L'hôpital est situé derrière les lignes de front de l'Ouest, mais son emplacement exact n'est pas précisé, ce qui permet aux développeurs de Brave Lamb Studios d'inventer un scénario qui respecte l'histoire de la Grande Guerre.

Notre histoire commence en 1918. Suite à l'armistice signé avec la Russie, l'Allemagne, sous le commandement du général Erich Ludendorff, décide de lancer une offensive nommée Opération Michael, dans une dernière tentative pour reprendre l'ascendant. Malgré certains succès, le manque de réserves les stoppe rapidement et, en juillet, l'armée allemande lance la seconde bataille de la Marne où elle est stoppée par les Alliés. Ces derniers lancent alors une contre-attaque baptisée l'offensive des Cent-Jours, qui fait craquer le front allemand et précipite l'armée vers la défaite et l'armistice.

C'est au cours de ces offensives que le flux de soldats touchés par les balles, les gaz ou les obus arrive dans votre hôpital. Dans ce jeu de stratégie en temps réel, on incarne le Major Henry Wells du corps médical britannique. L'histoire commence dans un train en direction du front, moment durant lequel le Major en profite pour écrire une lettre à son fils.

Dès le début, l'atmosphère est marquée par des graphismes grisâtres et monotones, malgré les éclairages qui percent le cadre du jeu. J'ai eu l'impression de revenir à l'époque de la 7e génération de consoles (Xbox 360 et PS3 notamment), où les nuances de beige et de gris étaient omniprésentes. Cela correspond bien au contexte, car on ne s'attend pas à des décors pastel et lumineux. La direction artistique me rappelle beaucoup celle de This War of Mine de 11 Bit Studios, bien qu'il y ait plus de couleurs ici.

Le petit hôpital de Major Wells s'agrandit

Le jeu s'ouvre sur une ville française complètement dévastée par la guerre, presque réduite en ruines, mais toujours animée par des personnages qui vont et viennent. Au milieu de ces ruines, plusieurs points d'intérêt se démarquent - le centre de triage, la salle d'opération, le quartier général du génie et le centre de rétablissement pour les blessés en convalescence.

Ces emplacements stratégiques forment le cœur du gameplay, où chaque clic permet d'accomplir des tâches de gestion essentielles. Pour résumer, la première étape consiste à affecter le personnel à ses postes et à trier les soldats blessés en les attribuant à un médecin. Malheureusement, les fournitures médicales sont toujours rares en temps de guerre. Il faut donc faire avec les moyens du bord.

Les patients présentent des niveaux de gravité différents, allant de "terminal" à "bien", et certaines blessures peuvent poser des défis supplémentaires aux médecins. Il est donc crucial de trier judicieusement les blessés, surtout que certains valent plus que d'autres en termes de ressources. Bien que cela puisse sembler de mauvais goût, de tels choix étaient monnaie courante dans la réalité. Si un blessé n'est pas jugé "suffisamment précieux" ou s'il est trop coûteux en ressources, il passera après ceux qui sont considérés comme prioritaires, ce qui équivaut souvent à une condamnation à mort.

Cependant, le jeu introduit un mécanisme de punition pour de telles décisions, sous la forme d'une diminution de la "morale" de l'hôpital. Si la morale atteint zéro, la partie se termine et le joueur perd.

Après l'intervention chirurgicale, les patients sont soit envoyés au cimetière en cas d'échec de l'opération, soit au centre de rétablissement. Une fois rétablis, les soldats doivent être renvoyés soit sur le front, soit au quartier général, soit chez eux. Bien que les avantages de ce dernier choix ne soient pas très bien expliqués dans le tutoriel, ils ont un impact significatif sur la morale de l'hôpital, les ressources disponibles et l'armée, ainsi que sur le flux de blessés en provenance du front.

L'aspect central du jeu réside dans la gestion des ressources humaines et matérielles. Le joueur ne réalise aucune tâche lui-même - il ne transporte pas les soldats de la salle d'opération à la morgue ni ne leur administre des injections - mais il doit veiller à ce que le personnel soit affecté là où il est nécessaire, sous peine de voir l'hôpital cesser rapidement de fonctionner.

Le principal défi consiste à renvoyer rapidement les soldats pansés sur le front tout en assurant le bon fonctionnement de l'hôpital. Tout cela dans le but de remporter des batailles, qui entraîneront une augmentation périodique du nombre de blessés et donc un risque accru de pénuries.

Bien que le joueur ne participe pas aux combats, il ne peut les ignorer. La gestion du Major Wells implique également de veiller à ce que le personnel médical ne s'épuise pas. Une échelle de couleur graduée, du bleu au rouge, signale le niveau de fatigue, et si un soignant s'épuise complètement, il doit rester en caserne pendant vingt-quatre heures pour récupérer, ce qui rend encore plus difficile l'organisation du travail pour ses collègues. Ce système est particulièrement important pour les infirmières, les ingénieurs et les paramédicaux, tandis que pour les médecins, le fonctionnement est similaire, avec quelques différences mineures. Le nombre de blessés attribués détermine la charge de travail, que le patient soit guéri ou non, avec une moyenne de trois à quatre patients par médecin.

On retrouve également des éléments typiques d'un jeu de rôle, comme la possibilité d'améliorer les compétences du personnel médical et les infrastructures en utilisant les ressources reçues en échange de renvois au quartier général. Cependant, des choix doivent être faits, car si l'on souhaite améliorer l'hôpital, il faut bloquer au moins un ingénieur pendant une période définie en fonction des travaux. De plus, les ressources utilisées pour ces travaux ne peuvent pas être utilisées pour acheter des fournitures médicales, de l'alcool, des denrées, etc.

En outre, des choix se présentent à tout moment, par exemple lorsqu'un médecin est confronté à la gravité des blessures d'un patient. Le jeu propose ces choix lors de l'arrivée de réfugiés à l'hôpital. Doit-on les accueillir pour profiter d'un regain de morale, ou plutôt les renvoyer pour minimiser le risque de propagation de maladies infectieuses ?

Un dernier aspect du jeu concerne les pionniers rencontrés au cours du premier chapitre. Envoyés pour enquêter sur des situations d'intérêt pour le quartier général, ces missions peuvent prendre plus de 24 heures (temps de jeu) à accomplir, en fonction de la distance à parcourir. Cela ajoute encore aux dilemmes moraux tout au long des missions et des situations rencontrées. Les conséquences de ces missions peuvent être positives, apportant plus de personnel et de ressources, ou négatives, avec des pionniers blessés ou tués, par exemple.

Décisions, décisions

Voici donc un tour d'horizon des différents aspects du jeu. Il est temps désormais d'examiner ses points forts et ses points faibles. Commençons par les aspects positifs. J'ai déjà mentionné la comparaison avec This War of Mine, car artistiquement, le jeu mérite cette reconnaissance. L'atmosphère oppressante et la musique contribuent pleinement à l'évocation du désespoir de la guerre, dans le contexte d'une France déchirée par les combats. De plus, même si l'action reste relativement simple à suivre, l'idée de prendre les commandes d'un hôpital est assez immersive. Il y a quelque chose de gratifiant à voir son établissement fonctionner, plus ou moins correctement, et à renvoyer les soldats sur le front, au quartier général ou chez eux (parce que cela signifie que d'autres sont prêts à prendre leur place sur le front). Voir ses ressources augmenter et s'approcher au maximum de sa barre d'état d'esprit est également très satisfaisant.

Cependant, quelques problèmes sont à relever. Malgré le soutien affiché dès le début du jeu par le vénérable musée britannique Imperial War Museum, les informations sur chaque personnage du jeu semblent parfois incohérentes, voire incorrectes. Par exemple, un soldat venant du "County County of London" ou un autre né en Belgique à "Wallonia, Luxembourgia"... De plus, les histoires des soldats ou du personnel peuvent parfois sembler très étranges : un soldat blessé aurait tiré sur son ancien commandant pour mettre fin à son tourment !?

Euh !?

Il y a également des bugs graphiques qui affectent l'interface utilisateur, comme des boutons qui disparaissent lorsqu'on tente de les sélectionner, même après l'application du patch du premier jour et des hotfix suivants. Les développeurs ont réagi rapidement face à ces rapports de bugs, mais j'espère que ces problèmes seront résolus à l'avenir.

Personnellement, j'ai signalé un problème après mon premier test, ma sauvegarde étant devenue injouable après un patch, et je n'étais pas le seul. Les développeurs ont répondu avec le patch suivant, ce qui m'a permis de continuer à jouer.

En fin de compte, une fois que l'on a changé les équipes actives, amélioré notre hôpital au maximum et envoyé une équipe de pionniers sur le front, le jeu devient un peu monotone. Pour enrichir l'expérience, les développeurs auraient pu inclure un mini-jeu de chirurgie ou rendre les missions des pionniers plus interactives, comme dans This War of Mine...

Les idées présentes dans War Hospital sont bonnes et valides, mais à mon avis, il aurait été plus judicieux de varier un peu plus le gameplay. J'apprécie l'idée du jeu et le contexte peu exploité par d'autres jeux vidéo, ainsi que son angle souvent négligé. Malgré les bugs, les erreurs linguistiques dans un jeu reposant largement sur le texte et un gameplay parfois fastidieux, je peux le recommander aux fans de la Première Guerre mondiale. C'est un jeu intéressant et original, mais malheureusement, il manque un peu de finition et de variété dans le gameplay...