Découverte exceptionnelle à Heraclea Sintica
... et ne faites pas semblant de savoir où c'est, s'il vous plaît !
Heraclea Sintica est une petite cité antique fondée approximativement au IVe siècle avant notre ère aux confins de la Macédoine pour y installer quelques colons grecs sur les terres d'une obscure tribu thrace, les Sinthes, qui y vivotait. Une fois la ville passée dans le giron romain au sein de la province de Macédoine, il ne s'y est pas passé grand-chose pendant quelques siècles, en tout cas rien dont on soit au courant, en dehors de la frappe de quelques pièces de monnaies, pour profiter des gisements d'étain et de cuivre qu'on trouve dans ces montagnes.
Pas grand-chose, jusqu'à un beau jour de 425 de notre ère, où un puissant séisme ravagea toute la région, ce qui eu pour effet de détruire presque entièrement la ville ; qui ne s'en est jamais remise au vu de l'extrême instabilité géopolitique de cette partie du monde, alors en proie aux combats furieux entre Byzantins et peuplades barbares variées. Suite au désastre et malgré l'obstination forcenée de quelques locaux qui tentèrent tout de même d'y rebâtir quelques infrastructures, la cité fut abandonnée et disparu totalement.
... jusqu'en 2007, où des fouilles archéologiques financées par l'état bulgare permirent de redécouvrir la ville et d'entamer sa fouille. Ces recherches continuent de nos jours sous l'autorité de Ludmil Vagalinski, archéologue de l'Institut Archéologique National et professeur à l'Académie Bulgare des Sciences, dont l'équipe vient de faire une découverte particulièrement impressionnante : une statue exceptionnellement bien conservée en marbre pur, de plus de deux mètres de haut.
Particulièrement chanceuse, la statue a été découverte dans un endroit pourtant insolite : la cloaca maxima, c'est-a-dire l'égout principal qui équipait toute agglomération romaine. « Nous ne nous y attendions pas du tout, nous étions en train d'inspecter les lieux au troisième jour de notre mission […] En cette période de christianisation forcée dans tout l'empire romain, la statue, symbole des temps païens, a été soigneusement cachée », confie le professeur Vagalinski.
Toujours d'après lui, des œuvres de sculpture antique équivalente existent à Athènes et le nord de la Grèce, mais elles restent rare, et surtout dans un si superbe état de conservation. Tout porte à croire en effet que la statue a été intentionnellement démontée de son piédestal pour échapper aux persécutions des chrétiens, son bras droit coupé pour ne pas risquer la casse accidentelle, et enfin enterrée dans les égouts où elle fut recouverte de terre progressivement, ce qui a assuré sa conservation.
La Bulgarie doit malheureusement lutter pour conserver son patrimoine de nos jours, ayant subi les déprédations des pillards et des trafiquants d'art pendant des décennies, profitant de la corruption des pouvoirs publics et de l'absence de politique de protection du patrimoine antique pendant les années soviétiques.
Mais de belles découvertes restent à venir, car on estime que 10% de la cité seulement a été découverte. Pour l'heure, la statue soigneusement sécurisée va être nettoyée et expédiée au musée bulgare de Pétritch, avant d'y être exposée.