Info sur le jeu
PlateformePC Windows
ÉditeurSenatis
DéveloppeurRoger Gassmann
Date de sortieAvril 2025

Pax Augusta

Thématique
5 mai
2025

Nous sommes en 2025 après Jésus-Christ, et tout le paysage vidéoludique est monopolisé par d'immondes resucées de Battle Royal, de triple A et de jeux à licence sans âme et sans vergogne. Tout ? Non. Car il subsiste une petite place dans le cœur des joueurs qui ont encore un peu de goût, pour les city-builders. Il paraît que tous les chemins mènent à Rome, eh bien nous allons vérifier ça, par Mercure.

Pharaon a eu droit à un excellent remaster récent par les Bretons de Triskell Interactive, et on ne présente plus l'inénarrable Nebuchadnezzar. On sent que les city-builders de Sierra Interactive ont marqué une base de joueurs restreinte mais tenace au début des années 2000, et qu'il est temps que ces jeux reviennent sur le devant de la scène. C'est probablement ce que s'est dit un beau jour de 2019 Roger Gassmann, un brave Suisse qui travaille avec les teutons de Senatis (pour un jeu à thème romanisant, ça ne s'invente pas), et qui est un amoureux absolu de la Rome antique, des jeux sur la Rome antique et de tout ce qui y touche, depuis un voyage scolaire durant son enfance. Après une vingtaine d'heures de jeu, on peut le dire : oui, ça se voit et ça se ressent.

Pax Augusta est donc l'œuvre d'un seul et même homme, ce qui force le respect quand on sait quelle somme de travail colossale cela représente. Le jeu nous renvoie au Ier siècle avant l'ère commune, plus précisément juste après la prise de pouvoir d'Octave, qui ne va plus trop tarder à se faire appeler Auguste. L'époque est témoin de grands changements ; les affaires vont bien, les conquêtes sont nombreuses. C'est donc une période dorée pour qui veut enrichir l'empire et sa propre personne.

Pax Augusta  Pax AugustaIl y a du chemin pour en faire une cité prospère./ C'est le début d'une longue carrière pour votre chevalier romain.

Le mode histoire vous place aux commandes d'un chevalier romain désirant se faire un nom dans le nouvel ordre des choses, en faisant fructifier ses affaires, tandis que le mode carrière vous permet de jouer à peu près n'importe où en Gaule pour y fonder une cité et parvenir à grimper les échelons. Car à Rome, l'engagement civique est avant tout de la politique : le cursus honorum est une longue voie pavée avant de parvenir au poste convoité de consul.

Pax Augusta se concentre sur la Gaule et la frontière germanique avant tout (et quelques territoires en Hispanie et en Bretagne, aussi). Une fois sur la carte, il faut choisir un site d'implantation et demander l'autorisation au gouverneur local, avant d'arriver sur la carte de votre ville et d'être enfin dans les sandales de votre petit moi intérieur d'il y a vingt ans, qui passait des nuits à jouer à Caesar III, quand le monde allait mieux et que le litre de super était à 93 centimes.

Pax Augusta nous met donc dans des charentaises d'entrée : une carte dotée de ressources naturelles (qu'il faudra aller découvrir en prospectant grâce à Vitruve, présent sur la carte), divisée en cases et déjà reliée au reste de l'empire par quelques voies. Tout reste à faire pour que la populace vienne s'installer dans votre nouveau petit coin de paradis. Trois choses sont à garder en tête, m'intime le long tutoriel : installer une nécropole, un accès d'eau et un marché, et idéalement, un forum. La population est divisée là encore, selon les standards du genre du city-builder historique, en diverses catégories, des libertis aux sénateurs, en passant par les peregrinis, les cives et les equites.

Pax Augusta  Pax AugustaLes jardins urbains existaient déjà ! / N'oubliez pas de négocier un petit salaire auprès du gouverneur : vous allez en avoir besoin ultérieurement.

Chacun aura bien sûr ses propres exigences à satisfaire en temps voulu, le cœur de la cité restant avant tout le forum, centre de toute vie publique. C'est là que Pax Augusta s'affirme comme un jeu où l'urbanisme doit être pensé en amont, et pour tout dire, plus finement que dans son illustre modèle. Si certains bâtiments de loisirs ou de commerce sont « fixes », ou encore qu'on retrouve des infrastructures de service au rayon d'action limité telles que les puits d'eau, en revanche certaines autres sont à construire de A à Z, en particulier les marchés et les forums.

L'un et l'autre fournissent à votre ville des administrateurs via les scriptorias, et des places de marché grâce aux étals. Les premiers vont garantir la bonne marche des affaires publiques (et l'évitement d'une trop grande corruption), tandis que les seconds vont approvisionner toute votre cité en nourriture. Autant dire que les deux sont résolument centraux, et Pax Augusta a le bon goût de permettre de les personnaliser de A à Z en les construisant grâce à des éléments modulaires et quelques décorations.

N'espérez tout de même pas reproduire dés le début le forum de Trajan en plein milieu de votre cambrousse rhénane, car il va falloir un peu de temps pour avoir une cité rentable. Il n'empêche que la construction façon lego de ces deux éléments conditionne d'une certaine façon votre développement, devant faire appel rapidement à d'autres sources de matériaux (votre stock de départ finira par être épuisé), en matière de bois, de fer, de brique et de marbre.

Pax Augusta  Pax AugustaLa région environnante aura généralement des producteurs locaux de chaque ressource, moyennant finances. / L'expansion économique vous amènera à concevoir de grands marchés !

Petit à petit, votre cité grandit en y ajoutant un marché aux esclaves, des ateliers pour abattre des arbres et produire des planches, des lupanars, des restaurants, des basiliques commerciales, et de somptueux quartiers d'habitations aux murs blancs et aux tuiles rouges, dans lequel admirer à la loupe ses citoyens qui vaquent à leurs occupations devient rapidement un loisir absorbant.

Si les cartes ne sont pas immensément grandes, elles peuvent en revanche être entièrement consacrées à la construction de votre cité. Vous allez consacrer un peu d'espace à l'exploitation de vos quelques ressources locales, mais dans l'ensemble, il ne sera pas besoin ici, comme dans d'autres city-builders, d'édifier d'immenses exploitations fermières ou de production, en dehors de quelques fermes, ou de se soucier de recruter des légions.

Pax Augusta centre vraiment son sujet et permet de subsister au départ avec les quelques jardinets dans l'arrière-cour des maisons de vos libertis (de quoi cultiver quelques navets grâce là encore à des éléments modulaires très pratiques pour combler les espaces vides entre les maisons) ; après quoi il faudra aller rencontrer les producteurs locaux, sur la carte de la ville ou sur celle de la région immédiate. En tant que gouverneur de la ville, vous allez devoir négocier avec les fermes des environs pour livrer de la nourriture à votre ville et éviter la famine, voire soudoyer quelques mains corrompues pour faciliter les transactions. Mais heureusement, les charges publiques sont aussi lucratives, vous permettant d'agrandir votre richesse en même temps que celle de la cité.

Pax Augusta  Pax AugustaDe temps à autres, il faudra aller en vadrouille dans les autres provinces à la recherche de bonnes affaires. / D'un simple champ, vous allez finir par obtenir ce type de forum rutilant.

Gestion des ressources, commerce d'esclaves, gestion de la religion grâce à un calendrier très précis, simulation de la vie civique et même politique grâce à un système d'élections auxquelles candidater… s'il y a un point sur lequel Pax Augusta impressionne, c'est la profondeur du décor qu'il représente. Dans ses descriptions, ses boucles de gameplay, son aspect visuel ou les mots qu'il utilise le titre reflète une documentation extrêmement fouillée qui, à elle seule, a dû prendre beaucoup de temps, et qui va ravir instantanément tous les amoureux de cette période.

Le principal défaut de Pax Augusta restant en définitive inhérent à sa condition de jeu indé : il faut le dire, le titre est techniquement à la ramasse. Pas tant dans son aspect visuel, même si on a vu plus beau question graphismes, mais dans des imperfections de jeunesse, comme ces inexplicables temps de chargement atrocement longs et laborieux, ou des manques d'options élémentaires dans l'interface utilisateur, comme la sauvegarde manuelle (cependant ajoutée par un premier patch à l'heure où vous lirez ces lignes). Le simple fait de revenir à la carte du monde pour aller rencontrer une troupe de gladiateurs ou de comédiens pour venir jouer chez vous vous oblige à passer par de tels temps de chargement qui vous laisseront le temps d'aller vous refaire un café. Tout à fait compréhensible pour un jeu poli pendant six années par son unique créateur, et rien qui ne soit pas corrigible avec un bon suivi, mais cela découragera peut-être les moins patients ou les plus jeunes. Ceci dit, on connaît le proverbe, Rome ne s'est pas faite en un jour. C'est qu'ils n'étaient pas fous, ces Romains.

7.5
Pax Augusta

Ceux qui vont y jouer après quelques patchs te saluent
Sans aller jusqu'à dire qu'il a été démoulé trop chaud, disons que le premier patch sorti a fait plus que du bien à Pax Augusta, manquant d'un bon coup de polish pour être tout à fait présentable. Déjà en meilleur état, le titre offre aux amoureux du genre une très bonne replongée dans l'urbanisme romain du Ier siècle avant notre ère, comme on aimerait en voir plus souvent. Tout repose maintenant sur le suivi de son développeur.
Intérêt historique :Il faut le dire : peu de jeu, voire même aucun, n'a poussé à ce point l'exactitude et la précision dans ce qu'il représente. À tous les étages de son gameplay, le titre de Roger Gassmann reflète son amour profond de son sujet, en utilisant les termes et les noms appropriés ou en gamifiant certains aspects de la vie antique romaine, jusque dans les dialogues ou les écrans de chargements.
  • +Le thème attractif
  • +Niveau de détails très poussé
  • +Bien équilibré, pas trop punitif ni trop facile
  • +Excellent système de personnalisation des grands bâtiments civiques
  • +Très bien documenté
  • -Interface parfois peu lisible
  • -Options manquante (charger une partie, infobulles)
  • -Très lent à charger, assez mal optimisé
6
Direction artistique

Tout le monde n'a pas les moyens de maîtriser l'Unreal Engine, mais toujours est-il que ça n'est pas par ses graphismes que Pax Augusta va retenir l'attention avant tout, même s'il n'est pas laid. L'exactitude et le niveau de détail compensent largement.

4
Technique

C'est clairement LE point faible de ce titre indé, comme on pouvait s'y attendre. Le jeu souffre de quelques bugs visuels, de ces temps de chargements beaucoup trop long vu ce qu'il affiche, et se permet même de faire ronfler un peu trop fort une carte graphique récente. Ceci dit, il est au moins stable, n'ayant provoqué aucun crash, et reste peaufinable au fil de quelques patchs à l'avenir.

8
Jouabilité

Dans l'ensemble très bonne, Pax Augusta est bien équilibré dès sa sortie et se place en droite lignes des standards du genre en apportant quelques idées, comme la gestion du calendrier, ou l'usage des esclaves.

8
Durée de vie

Comme toujours très élevée, les city-builders n'ont que peu voire pas de problèmes de rejouabilité. Votre première cité vous occupera pendant un grand nombre d'heures, et il existe un paquet de cartes disponibles.

9
Ambiance

Vraiment excellente, l'ambiance reflète un travail de fond assidu et une passion pour son sujet que n'ont pas beaucoup de studios avec mille fois plus de temps et de moyens derrière eux. Peu de jeux ont atteint ce niveau.

8
Scénario

Sans trop en dire, le jeu vous catapulte à une époque précise, mais sans vous forcer à rencontrer toutes les têtes connues d'alors : vous n'êtes là que pour développer votre cité et votre province, et c'est bien suffisant. L'ambiance fait le reste pour reconstituer la carrière d'un magistrat romain.


  • Cernunnos Testeur, Rédacteur
  • "Messieurs, c'est une plage privée! Je crois que nous dérangeons!" - Un officier britannique sur Sword Beach