Info sur le jeu
PlateformePC Windows
ÉditeurGreen Tree Games LLC
DéveloppeurGreen Tree Games LLC
Date de sortieAvril 2025

Burden of Command

Ralta
12 mai
2025

Qu'obtient-on lorsque l'on croise la stratégie d'un jeu comme X-COM avec un jeu de rôle permettant de peaufiner son personnage principal ainsi que ses subordonnés, le tout habillé d'uniformes américains des années 40 ?

Burden of Command est un jeu plein de paradoxes ; au premier abord, tout est fait pour vous dissuader de continuer à jouer. Dès le début de la campagne, un narrateur décide de casser le quatrième mur en vous expliquant qu'il va démolir au mieux tout ce que vous croyez savoir sur les jeux vidéo de stratégie. Bottant hors du champ nos attentes, si l'on tente immédiatement d'anéantir l'ennemi – « pow, pow, vous êtes morts », comme le narrateur les appelle – on ne fera pas long feu. Il faut donc s'entraîner un peu afin de mieux cerner les mécanismes qui différencient ce jeu de ses concurrents.

Burden of Command

Ce jeu de stratégie fonctionne au tour par tour, selon les ordres donnés par votre groupe d'officiers. À chaque tour, un officier peut donner un certain nombre d'ordres à ses hommes ou à lui-même, et de même, ses hommes n'ont qu'un nombre limité d'actions. Il nous faut donc être stratégique sur ce qu'on doit faire et quand on doit le faire, car l'ennemi a aussi son mot à dire. Celui-ci peut répondre entre chacun de vos ordres et mettre de sacrés bâtons inattendus dans vos roues.

Une fois que l'on a utilisé les actions d'un des leaders, on passe la main à un de nos camarades, s'ils ont encore des ordres à donner. À la fin de tout cela, le tour est définitivement terminé, et une fois les actions ennemies effectuées, un nouveau tour commence. On constate alors les actions réussies et les échecs… Selon le moral des troupes ou leur état de santé, on peut avoir des pénalités.

En fonction des missions, on peut avoir de deux à cinq officiers de différentes unités – par exemple des unités d'armement lourd et d'infanterie. L'homme le plus important est souvent le capitaine de la compagnie, qui a plus d'ordres à donner que ses subordonnés, et qui peut, par exemple, ordonner une attaque au mortier alors même qu'il n'est pas aux commandes de cette unité, ou utiliser ses propres points d'ordre afin de permettre à l'un de ses subordonnés de ne pas avoir à sacrifier un ordre d'action et de se concentrer sur l'objectif.

Burden of Command

Mais avant d'être plongé sous le feu de l'action et les balles réelles, commencent les niveaux d'apprentissage, qui comptent parmi les tutos les plus longs que j'ai jamais faits ! Honnêtement, il m'a fallu presque trois heures pour enfin sortir des terres – pas trop – accueillantes de la Virginie. On y apprend à réfléchir non pas comme un joueur, mais comme un commandant. Et le fardeau est loin d'être léger. Rappelant les jeux des années 90 avec leur niveau de difficulté élevé, Burden of Command ne permet pas le save scumming – c'est-à-dire que toutes les décisions prises sont définitives, sans retour en arrière, même si votre main glisse et clique une fois au lieu de deux. Faites l'erreur comme moi de ne sélectionner que votre capitaine au lieu de toute son équipe, pour qu'il se retrouve perdu en plein champ sous les tirs incessants de l'ennemi, sans rien pour le protéger..., il faudra alors attendre le prochain tour afin de rectifier cette étourderie… si votre capitaine est encore parmi les vivants, bien sûr. Eh oui, j'en parle par expérience durement acquise et je ne commettrai plus la même erreur… du moins, je l'espère.

L'apprentissage des mécanismes est brutal et sans aucune douceur. Comme pour les titres de FromSoftware, c'est en échouant souvent que l'on apprend, mais contrairement au Soul-like, on ne peut plus revenir en arrière dans Burden of Command. Les échecs de votre personnage sont définitifs, ancrés dans les mémoires de tous ceux qui l'entourent. On ne peut rien y faire sauf continuer d'avancer, apprendre les leçons du jeu, même si le narrateur reste évasif sur certaines. On ne peut pas juste courir directement vers son objectif sans se retrouver face à un tireur d'élite qui nous met une balle dans la tête… Évidemment ! C'est pour ça qu'il existe des repères-marqueurs, espèce d'idiot ! Oh, vous ne saviez pas que les tireurs d'élite ennemis vous visaient ? Eh bien, tant pis. Il vaut mieux passer par des zones boisées, offrant un peu de protection dans les broussailles, même si l'on est censé être en sécurité sur les terrains d'entraînement.

Burden of Command

Je pense que vous l'aurez compris : dès la première mission, ce jeu vous mettra le nez dans la boue ; il va vous traiter comme le pauvre petit rookie que vous êtes, tout vert et inexpérimenté, et il va se régaler de cela. Certains ne suivront pas ce parcours, et c'est bien plus qu'acceptable pour le narrateur ! Tout le monde ne choisira pas d'accepter ce fardeau. Certains abandonneront au cours de l'entraînement – et prendront le chemin de moindre résistance en réclamant un remboursement sur Steam –, et le narrateur en a pleinement conscience. Et il s'en moque royalement. Ce n'est pas ceux-là qu'il recherche pour mener sa compagnie Nickel.

Il faut donc vite apprendre ces leçons et bien les intégrer, car – même si ces balles sont pour l'instant factices – ce ne sera pas toujours le cas. Les nazis, les Italiens et les Français de Vichy ne vous attendront pas éternellement. Les mouvements et la manière d'attaquer sont gouvernés par les lois du combat. Il faut donc d'abord trouver sa cible, la fixer en place par le feu, la flanquer et la flinguer avec un assaut terminal. Mais ce n'est pas la peine d'y aller en mode Rambo. D'autres considérations sont mises en place, comme le moral des troupes, par exemple. Si un détachement a perdu son leader ou vient d'être attaqué, les hommes auront plutôt tendance à vouloir rester planqués – compréhensible – mais cela entraînera des répercussions sur la suite et ils n'auront pas forcément la forme pour attaquer quoi que ce soit. Il faut donc leur donner un buff ou les rallier préalablement.

Il faut aussi prendre en compte les systèmes de jeu de rôle que le jeu prône. Si vous venez de prendre une grosse raclée lors d'une mission, vos leaders et hommes s'en souviendront et prendront des debuffs (affaiblissements du moral) ; ils vous feront de moins en moins confiance. C'est bien plus réaliste que la plupart des jeux de stratégie que j'ai joués ces dernières années.

Burden of Command

Les missions suivent les hommes décrits dans les journaux des marches et des opérations (JMO) du VIIᵉ régiment d'infanterie. Débarquant en Afrique sous les tirs des Français de Vichy, ils prirent la route pour libérer Casablanca, puis franchirent les montagnes de Sicile, avant de foncer vers Rome et de finir par la libération de la France et la défaite de l'Allemagne. En général, les missions tournent autour de la prise d'une ville ou du maintien d'un objectif face à l'ennemi, mais le terrain est variable, ainsi que la taille des cartes. Il est donc nécessaire d'adapter son style de jeu afin de faire face aux aléas, comme le « brouillard de la guerre » qui nous cache les troupes ennemies. On peut vite se retrouver en difficulté dès le début de la mission si l'on envoie la mauvaise unité en avant-garde.

On peut parfois avoir accès à un soutien extérieur en faisant appel à un tir d'artillerie lourde, ou à de chars. Néanmoins, il y a aussi la possibilité qu'une aide demandée ne nous soit pas bénéfique : on peut subir un bombardement de son propre camp, ou bien les lignes pourraient être trop éloignées pour approvisionner correctement les chars en essence, les rendant ainsi inutiles.

Or, l'histoire de nos hommes nous offre souvent la possibilité d'avoir le choix du type d'assistance, et c'est ici qu'entrent les éléments de jeu de rôle. Ce sont nos choix qui vont déterminer l'histoire de nos officiers, s'ils se feront tuer ou blesser lors des missions. C'est toujours triste de voir l'un de nos officiers très expérimentés tomber sous le feu de l'ennemi, après l'avoir conseillé sur ses choix, lui avoir suggéré de faire tel type d'action lors des longs textes d'histoire, et l'avoir aidé à découvrir le type de leader qu'il voulait devenir – un véritable professionnel, un disciplinaire, un homme plein de compassion… Et chacune de ces décisions peut avoir un effet sur le déroulement des missions. Si on le perd, on ne perd pas seulement son expérience, mais aussi le temps qu'on lui a consacré, définitivement. Rappelez-vous : pas de marche arrière dans Burden of Command !

Burden of Command

En ce qui concerne le design du jeu, les images et les graphismes sont plutôt sommaires. On a l'impression d'être revenu trente ans en arrière. La dernière fois que j'ai joué à un jeu avec des graphismes aussi basiques, c'était à l'époque de Age of Empires (l'original, pas la version remasterisée) ou encore la série Battleground des années 90. Les développeurs ont clairement mis en avant leur passion pour l'histoire et ont voulu faire un jeu réaliste au niveau des comportements plutôt que de miser sur l'esthétique. C'est un choix, certes, et je ne suis pas contre. En l'occurrence, si vous décidez de tenter l'expérience, vous êtes avertis : ce n'est clairement pas pour ses graphismes que vous devez vous lancer dans le jeu.

De plus, il reste des bugs et des détails à peaufiner un peu partout. C'est clair qu'avec des textes oubliés, ou laissés en place lors du développement – du type « insert image here » –, il y a des choses à améliorer. Mais, Burden of Command n'en reste pas moins un jeu qui a du potentiel par ses mécaniques atypiques et originales pour un jeu de stratégie, un genre qui a toujours besoin de renouvellement. La formule pourrait très bien être reproduite dans d'autre volet sur des fronts un peu plus originaux, voir d'autres conflits. Peut-être sur le front de l'est, en Orient, ou encore sur la Première Guerre mondiale ou le Vietnam ?

Vraiment, le jeu m'a bien énervé (parfois), m'a bien eu (à plusieurs occasions) et m'a largement intrigué pour continuer à batailler à travers ces interminables étapes d'entraînement. De plus, suivre les pas de la compagnie Nickel à travers l'Afrique du Nord et l'Europe occidentale fut intéressant.

Malheureusement, même si le jeu pourrait beaucoup intéresser le marché francophone, il n'est disponible pour l'instant qu'en anglais. Le problème étant qu'il y a du texte, beaucoup de texte, avec un vocabulaire militaire directement issu de l'époque de la Seconde Guerre mondiale, donc si vous n'êtes pas à l'aise avec la langue de Shakespeare, il vaut peut-être mieux attendre de voir s'il sera traduit. En tout cas, ce projet d'amour des développeurs de Green Tree Games et des historiens passionnés qui ont collaboré mérite amplement d'être reconnu par et pour les joueurs non-anglophones. Volens et Potens.

7.5
Burden of Command

Authentique, jusqu'au-boutisme
Le manque d'options linguistiques limite forcément les possibilités pour les Français de jouer à Burden of Command. Pour les vaillants efforts de renouvellement dans le genre RTS et la maîtrise de son sujet, il mérite néanmoins de fortes recommandations. Si les graphismes étaient un peu plus peaufinés, ce jeu mériterait un score supérieur.
Intérêt historique :L'histoire suit le VIIᵉ régiment d'infanterie américaine de la IIIᵉ division d'infanterie, dits les « Cottonbalers », qui ont combattu en Afrique du Nord, en Italie et en Europe de l'Ouest. Suivant l'inspiration du professeur John McManus, historien et auteur reconnu, Green Tree Games a embauché des chercheurs afin de puiser dans les fonds des Archives nationales et d'adapter l'histoire réelle en format vidéoludique.
  • +Maîtrise du sujet
  • +Originalité de son gameplay
  • +Expérience rare et authentique dans le jeu vidéo
  • -Visuellement daté
  • -Des petits bugs laissés en cours de route
  • -Compliquer pour les non-anglophones
-
Direction artistique

Les graphismes ne sont pas top. On ne peut rien dire d’autre. Néanmoins, en tant que joueur de RTS, ça m’est égal. Ce n’est pas l’aspect le plus important du jeu. Oui, on pourrait bien apprécier un beau jeu. Mais bon, le jeu marche sur la plupart des PC à sa sortie... c'est le plus important.

6
Technique

De petits bugs ici et là, comme des images qui n’apparaissent pas ou le moteur du jeu qui rame un peu pour calculer le RNG des assauts.

7
Jouabilité

Une fois que l’on a compris à quoi le jeu nous attend, ça devient assez facilement jouable. En revanche, il faut maîtriser l'anglais et être assez calé sur les acronymes militaires pour comprendre de quelles unités il est question – par exemple, la différence entre les mortiers, les mitrailleuses, les artilleries – car les images du jeu sont un peu difficiles à cerner.

7
Durée de vie

J’y ai passé une trentaine d’heures et je suis toujours en 1943. Du point de vue de la rejouabilité, il y a toujours moyen de relancer la campagne afin de changer ses personnages et leurs caractères – par exemple, en faisant passer un sous-officier zélote à un personnage plus compatissant – changeant par là même les options de dialogue. Cela permet aussi de rejouer les scénarios une fois arrivés à un certain stade de la campagne.

10
Ambiance

On est totalement transporté dans les années 40. Le langage, les sentiments, les documents d’archives. Ici, Green Tree Games a vraiment effectué un travail minutieux.


  • Ralta Rédacteur
  • "L'histoire sera gentille avec moi car j'ai l'intention de l'écrire." - Winston Churchill