HistoriaGames, le site sur les jeux vidéo historiques

L'Empire assyrien

L'antiquité est depuis longtemps le terrain de jeu privilégié de bon nombre de studios et de joueurs, en particulier lorsqu'il s'agit de stratégie et de gestion. Age of empire, Civilization, Pharaon ou Caesar pour les city builder, et bien sûr Rome : Total War ont largement participé à l'histoire de notre média favori.

Si l'antiquité classique jouît généralement d'une représentation enviable, sûrement grâce aux péplums qui ont nourri notre imaginaire et à la proximité culturelle que représentent encore l'Empire romain et les cités grecques pour notre occident contemporain, les âges du bronze et du fer intéressent de plus en plus, en témoignent les récents Nebuchadnezzar, Old World, Total War Saga : TROY ou encore la première ère de Humankind pour n'en citer que quelques-uns.

Dans ce contexte, nous avons souhaité en apprendre un peu plus sur cette période méconnue du grand public et l'ouvrage fraîchement paru de Josette Elayi, historienne française connue pour ses importants travaux sur l'Antiquité, nous a semblé une porte d'entrée tout indiquée.

L'Empire assyrien, voilà un nom que nous sommes nombreux à connaître sans savoir précisément ce que recouvre cette appellation exotique. Quelques clichés nous parviennent peut-être. Des hommes barbus, armés d'arcs et de lances, persécutants des villages désertiques et fondants des cités aux murs ocres que les fouilles nous révèlent aujourd'hui. Ce sont les mêmes clichés qui nous viennent à l'esprit lorsqu'on évoque Sumer, Babylone ou encore le plus tardif Empire perse Achéménide de Darius. Le temps, la proximité géographique et culturelle de ces civilisations et leur inexorable déclin des siècles avant notre ère, tout semble fait pour nous les rendre inaccessibles, presque mythiques.

Lire un livre sur l'histoire de l'antiquité, c'est donc s'intéresser à la méthode historique particulière à l'étude de cette époque. La numismatique (l'étude des pièces de monnaies), l'épigraphie (l'étude des inscriptions gravées) et l'archéologie sont au centre de l'ouvrage et une certaine dose de curiosité sera nécessaires pour traverser ces quelques 300 pages (hors notes et annexes touffus de fin d'ouvrage).

En effet, faire de l'histoire antique, en particulier lorsqu'on évoque ce berceau de la civilisation qu'est le croissant fertile (ça y est, les premiers cours d'histoire-géo vous reviennent ?), c'est se confronter à un double problème, tout à fait paradoxal. D'abord, le contexte politique actuel en Irak et en Syrie est loin d'être favorable au travail des archéologues. Le trafic d'antiquités y est largement répandu et les récentes destructions en règle par l'état islamique nous ont certainement privé à jamais d'un matériel de première qualité. À l'inverse, les sources déjà en notre possession sont d'une abondance exceptionnelle et il faudra des décennies aux chercheurs pour venir à bout des 500 000 à 1 000 000 de tablettes déjà découvertes !

L'ouvrage se concentre en particulier sur ce que l'on appelle l'empire néo-assyrien. Si une importante introduction vous rappellera les origines de l'empire et ses premières interactions avec Babylone et l'Égypte notamment, c'est donc surtout sur l'âge du fer que se concentre cette histoire, c'est-à-dire la période s'étalant de 934 à 610 avant J.-C. (ou AEC comme on dit aujourd'hui), soit le moment où l'Assyrie devint le plus grand empire ayant jamais existé jusqu'alors, jusqu'à sa chute par les armes face aux Mèdes et aux Babyloniens (armées babyloniennes dans lesquelles on trouvait un certain Nabuchodonosor...).

Le tout est remarquable, à la fois grâce à l'érudition et à l'accessibilité du travail de Josette Elayi. On y découvre les différents peuples de cette Mésopotamie en proie aux premières grandes ambitions impériales et l'on assiste ainsi à l'émergence d'un système administratif et militaire qui façonnera les siècles à venir. Sanguinaires et pragmatiques, l'invention de la terreur politique n'est pas loin : pyramides de têtes tranchées, peau des vaincus écorchés tapissant les murs des cités et autres actes sadiques... Les peuples dès lors se soumettent sans combattre et l'empire assyrien naissant évite par ces procédés de nombreux massacres. Un concentré d'humanité ?

Pourtant, si son histoire est violente, elle ne doit pas faire oublier qu'un empire, aussi précoce et éphémère qu'il fut, ne disparaît jamais sans laisser de profondes traces sur les plans techniques, scientifiques et culturels. On doit à l'Assyrie le concept d'état tampon, toujours d'actualité, tout comme le principe de la vis d'Archimède. L'espionnage également fut l'un des plus perfectionné de son époque et la bibliothèque d'Assurbanipal, l'un des derniers souverains assyriens, constitue le plus important fond littéraire de la Mésopotamie antique.

Si l'antiquité, et en particulier l'age du fer vous intéresse, nous ne saurons trop vous conseiller de vous pencher sur cette histoire récente et documentée de l'Empire assyrien, et plus généralement sur la riche bibliographie de Josette Elayi.