Récit

Époque moderneGuerres napoléoniennes

Bataille de Marengo

Maréchal de l'Empire
6 juin
2019

Deux ans après la première campagne d’Italie, l’Angleterre forme de nouveau une coalition contre la France. Napoléon Bonaparte est engagé depuis plusieurs mois sur un nouveau théâtre de guerre : L’Égypte. L’opportunité des alliés de reprendre les territoires perdus est là.

Le visage de l’armée autrichienne d’Italie (commandée par le général Michael von Melas) est impressionnant, l’unité étant forte d’environ 60 000 à 65 000 hommes. Le général français Schérer qui est en charge de l’armée d’Italie (35 000 à 50 000 hommes), commet en partie les mêmes erreurs que les Autrichiens durant la campagne précédente. Il la scinde en 3 et la répartit sur la future ligne de front.

Progressivement, les Autrichiens vont enchainer des victoires face aux Français. Le 6 avril 1799 à Magnano, le général Schérer est vaincu et doit se replier. Le Directoire, mécontent des résultats du Français, décide de le remplacer par le général Moreau.

Une semaine plus tard, un contingent russe vient prêter main forte à von Melas qui se voit retirer son commandement au profit du feld-maréchal Souvorov. Toutefois, face à la puissance et à la fraîcheur des troupes alliées, le général Moreau doit abandonner la Lombardie, Alexandrie, Turin et Milan après la défaite de Cassano lors des journées du 26 et 27 avril 1799.

À Naples se trouve le général français McDonald. Au vu de la situation, celui-ci effectue à coup de marche forcée sa remontée afin de faire jonction avec les troupes de Moreau. En mettant en déroute par deux fois les troupes autrichiennes, il arrive à rejoindre la ville de Pistoia.

Le feld-maréchal Souvorov continue son avancée et culbute les troupes françaises sur son chemin. Moreau commet plusieurs erreurs empêchant sa jonction avec McDonald. Souvorov parvient même à les couper et à défier le général de l’armée de Naples à la bataille de Trébie.

Le général McDonald, défait, se replie sur la ville de Gênes. Le général russe va stopper son avancée pour donner du repos à ses troupes et recevoir de nouveaux effectifs. Toutefois, le 22 juin 1799, Moreau arrive à vaincre les coalisés à la bataille de San-Giuliano.

Durant l’été 1799, le Directoire remanie le commandement en nommant Joubert général en chef des armées d’Italie. Moreau a pour ordre de remonter vers les armées du Rhin. Néanmoins, Joubert meurt le 15 août 1799 à la bataille de Novi.

Moreau, qui s’apprêtait à rejoindre sa nouvelle affectation, prit en charge les hommes de Joubert. Il les amène à Gênes où se trouve le général McDonald. Le Directoire nomme alors un nouveau général en chef : Championnet.

À ce moment de la guerre, les Russes sont forts de nombreux succès face aux Français. Une jalousie née entre eux et les Autrichiens. Chacun se plaint des uns et des autres pour leurs « incompétences » à commander. Petit à petit, les forces coalisées se retrouvent renforcées et se voient rejoindre par une autre armée russe, celle de Korsakov.

À cause de retards dans les offensives alliées pour remettre en état leurs armées, le général Korsakov est battu à la bataille de Zurich le 25 septembre 1799 face à Masséna. Suite à ces mésententes, les jalousies et cette défaite, le Tsar Paul 1er décide de rompre son alliance avec les Autrichiens.

Aussitôt, les Russes se retirent de ce théâtre et Melas reprend le contrôle. Il continue l’avancée et assiège la ville de Gênes.

Championnet, qui était alors commandant des armées d’Italie tombe malade et se voit battu à la bataille de Genola le 4 novembre 1799. Néanmoins, le 9 novembre a lieu le coup d’État du 18-Brumaire.

Bonaparte revenu d’Égypte (malgré ses déboires) devient Premier Consul et remplace Championnet à sa demande par le général Masséna.

Bataille de MarengoLa bataille de Marengo de Louis-François Lejeune (1802).

Prélude à la bataille

Bonaparte qui a repris les commandes décide de former une armée de réserve à Dijon commandée par Berthier. La ruse est la suivante : faire croire que les troupes de Moreau qui se dirigent en Allemagne constituent le gros de l’armée. Pour être exacte, cette force française s’avance vers le Danube pour affronter les troupes stationnées au nord de la Suisse. Cela doit servir de prétexte que l’état-major d’Italie ne prête pas attention à ce contingent, ce qui est le cas. De la même manière, il ne demande même pas de renforts depuis l’Allemagne.

La stratégie est de détenir le Tyrol afin d’empêcher l’arrivée de nouveaux renforts en Italie pendant qu’un contingent se détache de l’armée de Moreau et progresse vers le Sud pour soutenir les troupes françaises.

Bataille de MarengoBonaparte franchissant le Grand-Saint-Bernard de Jacques-Louis David (1800).

Fin mai 1800, après de nombreux préparatifs et de longs parcours, Bonaparte (avec l’armée de réserve) franchit le petit et le grand col du Saint-Bernard et arrive dans les plaines du Piémont. Le 2 juin, Murat entre à Milan. La stratégie peut s’enclencher : prendre à revers Melas qui maintient son siège à Gênes.

Malheureusement pour le premier consul, Masséna capitule le 4 juin à cause de la famine et la maladie. Aussitôt, Bonaparte décide de couper l’ensemble des lignes de retraite afin de forcer les Autrichiens à une bataille décisive.

Le 9 juin, Lannes remporte la bataille de Montebello contre le général Ott qui se dirige vers Alexandrie. Les voies de repli se referment pour le général autrichien qui fait marche entre Turin et Mantoue. N’ayant guère de choix, Michael von Melas décide de faire front en face de l’armée de réserve. Ce sont les Autrichiens qui choisissent le lieu de la bataille, à l’est d’Alexandrie dans les plaines du Pô.

Le 13 juin, Bonaparte ne sait pas où est le général Melas ; toutefois il connaît la position du général Ott qui est retranché aux abords de la forteresse d’Alexandrie. Il divise donc son armée en une sorte de grands cordons prêts à agir. Au Sud, il envoie Desaix à Novi et la division La Poype sur la riche gauche du Pô.

Ce même jour, les Autrichiens franchissent la Bormida. Les troupes sont face à face et patientent jusqu’au lendemain. Entre elles se trouve le ruisseau Fontanone.

L’armée autrichienne compte 30 000 soldats et 100/150 canons contre environ 22 000 à 25 000 Français, dont 15 canons.

Melas divise en 3 son armée, il commande le centre, Ott la partie Nord ou gauche (selon le point de vue) et O’Reilly la partie Sud.

Pour les Français, au Sud du village de Marengo, se trouve le corps de Victor épaulé par Kellermann (gauche française), au Nord-Est (ou la droite) formé par Lannes et ses troupes. L’ensemble du dispositif français forme un coude qui s’étend des troupes de Victor à celles de Lannes.

Bataille de MarengoPremière phase de la bataille.

La Bataille

Dès 6h du matin, les troupes autrichiennes se mettent en mouvement dans la plaine après avoir traversé la Bormida. Les premières escarmouches commencent vers 8h, les quelques avant-postes français sont très vite détruits/capturés. La canonnade devient de plus en plus forte.

Bonaparte commence à sentir la mauvaise surprise. Il ne sait pas où se trouve Melas, mais les premiers rapports semblent lui montrer qu’il est juste devant lui. Ce même général autrichien ne sait pas lui aussi qui il a face à lui.

Les troupes françaises se mettent avec beaucoup de difficulté en ordre de bataille. En un claquement de doigts la majorité des canons français sont mis hors d'état de nuire. Melas se dirige vers Marengo avec pas moins de 20 000 hommes sous son commandement.

En effet, les fantassins impériaux viennent buter sur la division du général Gardanne qui se situe devant le Fontanone. Les hommes se tirent dessus à moins de 50/70 mètres de distance. Les Français subissent beaucoup de pertes du fait de l’artillerie autrichienne qui rompt les rangs. Après quelques heures de combats, les hommes de Gardanne sont épuisés. Victor les fait se replier derrière le ruisseau. À ce moment de la bataille (entre 9h et 12h) le village de Marengo est toujours aux mains des Français.

Vers 11h du matin, plusieurs divisions autrichiennes sont repoussées, mais d’autres arrivent. L’avantage du terrain est légèrement favorable aux Français, car celui-ci est difficilement praticable pour les attaquants qui se retrouvent vite dans des postures problématiques.

Les troupes du général Ott tentent de contourner et détruire les troupes de Victor, heureusement, Lannes et Kellermann arrivent en soutien et percutent les Autrichiens de plein fouet. Lannes passe le Fontanone, mais il est surpris par l’artillerie alliée qui pilonne la progression française. Aussitôt, ils se replient de nouveau derrière le ruisseau. En parallèle, Kellermann met en déroute des contingents de dragons ennemis.

Le flanc droit français (mené par Lannes) semble frémir et les avancées des colonnes du général Ott sont de plus en plus décisives. Bonaparte ordonne aux unités de réserve d’aller au contact de l’ennemi. Les Autrichiens ont l’avantage et Marengo est à deux doigts de tomber.

De 12h à 13h, Lannes tient son flanc contre des divisions autrichiennes qui tentent de le contourner par le Nord. Cette fois-ci, les Autrichiens établissent un pont pour traverser le ruisseau et se diriger plein Sud. Les Français ne peuvent contrer cette avancée, car leur progradation est couverte par une artillerie toujours très meurtrière. Progressivement, les coalisés englobent Victor qui doit se replier sous couvert d’être anéanti. Lannes tente tant bien que mal de couvrir sa retraite alors que lui-même voit son flanc enfoncé. Les Français arrivent à reculer en bon ordre.

Napoléon Bonaparte ne peut que constater l’étendue des dégâts et la perte de terrain progressive. Celui-ci envoie une lettre à Desaix et à la division La Poype pour les prévenir de la situation et réclame leurs aides.

Les heures passent et environ vers 15h les Français se retrouvent au village de San Giuliano. Bonaparte est là, harangue les troupes et se présente avec la Garde Consulaire. Elle est même donnée ! Elle lutte et tente de flanquer une colonne ennemie, la vue des bonnets à poils redonne de la confiance et de l’espoir. Elle est soutenue par la cavalerie qui tente par-ci par-là des attaques sur les divisions autrichiennes.

Les troupes impériales forment une masse inouïe que rien ne semble arrêter et qui décime tout Français sur son passage. Michael Von Melas, heureux de la situation est légèrement blessé. Il profite de la situation pour se rapatrier sur Alexandrie et annoncer la victoire éclatante. Les Autrichiens se ré-organise, avancent et enfoncent le flanc droit français. L’artillerie laisse un peu de répit aux Français, car elle doit se repositionner, les troupes de O’Reilly se préparent à couper la retraite des Français en faisant route au Sud-Est et le commandement de l’armée est confiée au général Anton Von Zach.

Bonaparte tente de mettre en place une retraite rapide et en ordre.

Bataille de MarengoSeconde phase de la bataille.

Un miracle nommé Desaix

À 17h, un homme se présente près de Bonaparte : c’est Desaix et ses 6 000 hommes prêts au combat qui arrivent du Sud.

L’état-major se réunit et doit décider quoi faire. L’hypothèse d’utiliser les troupes fraîches pour contenir les Autrichiens pour un repli est rapidement écartée. Les officiers ne sont pas fous, mais juste expérimentés. Ils constatent que le général Zach marche en colonne très compacte. Un retournement de situation serait suffisant pour semer le trouble dans leurs rangs alors qu’ils ont l’avantage.

La plupart des cavaliers sont mis aux ordres de Kellermann ; Desaix dispose de huit canons qui s’ajoutent à ceux restants et capturés. Cela permet d’établir une petite batterie d’une quinzaine de bouches à feu. On replace les divisions qu’on tente d’épauler tant bien que mal malgré leurs pertes. Desaix se situe globalement au centre avec les troupes fraîches.

La batterie française est mise face à la colonne qui avance, cachée par des fusiliers français. Alors qu’il ne reste que quelques centaines de mètres, les français dévoilent les canons qui tirent sans relâche à la mitraille. En l’espace de quelques secondes, les 5 000 hommes qui forment cette colonne d’attaque se voient perdre plusieurs centaines des leurs. Quelques demi-brigades françaises contiennent la poussée de l’assaut autrichien.

Les 12 000 soldats de la république restants chargent. Kellermann attaque et sabre la colonne ennemie de nombreuses fois sur les flancs, Desaix est en tête. Une mêlée sanglante a lieu et une confusion extrême. Un train de munition autrichien explose. La colonne est encerclée et littéralement culbutée. Les hommes crient de part et d’autre, les Français sont revigorés par ce retournement de situation, les combats sont violents.

Bataille de MarengoMort du général Desaix de Jean Broc (1806).

Les cavaliers impériaux se retrouvent face à Kellermann, qui à la tête de ses cavaliers sabre sans relâche et tiennent bon. Non seulement le flanc gauche est enfoncé, mais la plupart des unités de cavalerie autrichiennes sont mises en déroute ainsi qu’un grand nombre d’artilleurs. Les Autrichiens emplis de doutes commencent à reculer. Desaix, qui est lancé, reçoit une balle en plein cœur. Il tombe, mort.

Forts de cette fureur, les Français capturent le général Zach et pas moins de 2 500 hommes de la colonne autrichienne. Les généraux O’Reilly et Ott ne peuvent rien faire. En l’espace de quelque temps, les troupes autrichiennes sont à la débandade, sans ordres, sans formations. Ils tentent d’effectuer un repli organisé, mais compliqué par la poussée des Français.

La nuit commençant à tomber, les Autrichiens repassent en hâte la Bormida et se replient sur Alexandrie talonné par les Français qui ne pourront les poursuivre plus loin faute de munitions.
C’est alors que Michael Von Melas ne peut que constater l’échec et la défaite autrichienne face à ce retournement de situation.

Bilan

Les Autrichiens auront perdu pas moins de 12 000 morts, blessés ou disparus, 15 drapeaux et pas moins de 100 canons capturés.

Les Français comptabilisent près de 6 à 8 000 morts, blessés ou disparus. Qu’on le veuille ou non, c’est une terrible bataille aux pertes immenses.

Au vu de ces combats, Melas demande une suspension des hostilités qui sera signée quelques jours après à Alexandrie. En parallèle, le général Moreau remporta la victoire à Hohenlinden, ce qui va amener la maison Impériale à signer la paix de Lunéville et à re-donner les territoires conquis aux Français.

Cette bataille va affirmer la position dominante politique de Napoléon Bonaparte qui rentra à Paris victorieux.

La bataille de Marengo scelle cette nouvelle victoire (qui n’en avait pas l’air) et une nouvelle campagne pour les Français.

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    "Du sublime au ridicule, il n'y a qu'un pas." Napoléon Bonaparte