Info sur le jeu |
Plateforme
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ÉditeurBigben Interactive |
DéveloppeurFrogwares |
Date de sortieJuin 2016 |
Sherlock Holmes : The Devil's Daughter
Deux années après la sortie de Crimes & Punishments, Sherlock Holmes a étonnamment pris un coup de jeune. Si les enquêtes qu'il va résoudre n'ont aucun lien entre elles, c'est plutôt sa relation avec sa fille, Katelyn, qui va donner un fil conducteur au scénario. Cherchant la présence d'une mère, l'enfant va se rapprocher de sa nouvelle voisine, Alice. Ce que Sherlock voit d'un très mauvais œil, avant d'être confronté à la question suivante : qui de Katelyn ou d'Alice est la fille du Diable ?
Pour donner vie aux personnages, des doubleurs officiels de la série Sherlock ont prêté leur voix à la version française. Leurs prestations sont convaincantes, vivantes et frappantes. Celle de Sherlock Holmes atteint son summum lors de la phase d'exorcisme, où les paroles sont improvisées, mais les intentions bien dissimulées, tout comme la préméditation de cet instant.
Le professionnalisme du doublage est indéniable, or une légère irrégularité s'y est glissée, certains personnages vont prononcer le « H » de Holmes tandis que d'autres le laisseront muet.


Dans une interview menée par notre ancien camarade Le_Moine pour LeMagJeuxHighTech, Aurélie Ludot, Project Manager, est interrogée pour connaître les raisons du rajeunissement des personnages : « Dans nos précédent jeux, Sherlock était cassant, froid et par certains côtés « old school ». […] Mais pour cet opus, nous le voulions vulnérable aux émotions. Puis il nous fallait un personnage qui pouvait être un père crédible. Certes maladroit, mais aimant. Évidemment, on ne peut modifier un seul personnage. Autrement dit : il ne s'agit pas d'une évolution cosmétique et cantonnée à deux personnages, mais bien d'une avancée sur le jeu en son ensemble. »
Parmi les avancées souhaitées par le studio, on retrouve la liberté accordée aux joueurs. Les différents niveaux du jeu ont été agrandis pour des déplacements plus fluides. Sortir d'un bâtiment important comme l'immeuble de Holmes, l'hôpital ou Scotland Yard ne signifie pas l'ouverture de la carte pour choisir sa destination. Au contraire, les joueurs se retrouvent dans les rues de Londres où ils sont libres d'errer, de chercher un cocher, de s'attarder sur les jeunes enfants qui vendent le journal et de remarquer la richesse des détails. Les rideaux et murs sont ornés de motifs, les rues des quartiers populaires sont animées par les mères de famille étendant leurs linges tandis que leurs maris ivres sont avachis à même le sol.
En revanche, il est dommage que des irrégularités se soient glissées dans les décors. Par exemple, il y a un impact dans le miroir de sa voisine, mais Sherlock n'y prête guère attention. Aussi, bien qu'il y ait une partie d'échecs à jouer dans Le Testament de Sherlock Holmes, les échiquiers sont placés à l'envers dans ce présent opus. Étant joueuse d'échec, c'est un petit détail qui m'a un peu interloqué. Cependant, il en faudra plus pour gâcher l'expérience de jeu.
S'il s'agit d'erreurs qui se sont glissées dans la réalisation. Les développeurs ont conscience des points faibles du jeu. Ainsi, pour passer le temps avec de longs chargements, qui durent entre 30 secondes et une minute, un rappel automatique apparaît à l'écran : il est possible à ce moment là de se pencher sur les indices trouvés pour les relier entre-eux. Pendant que les joueurs cherchent des connexions, le chargement se poursuit.
Également, afin de cacher les faiblesses de certaines phases de gameplay, il est possible de littéralement passer des étapes. Certaines, comme les phases d'équilibre et d'écoute, peuvent vite s'avérer pénibles avec le couple souris-clavier. Ce point sera revu plus tard.



Sherlock enquête sur l'Amérique
Avant de revenir sur l'expérience de jeu et le gameplay, intéressons-nous à certains éléments historiques présents dans cet opus de Sherlock Holmes :
- Tecun Uman, au cœur de la deuxième affaire : Devenu officiellement le héros national du Guatemala en 1960, les autochtones de ce pays et de l'Amérique centrale le portaient en estime depuis des siècles. Ils l'invoquent dans leurs prières, poésies, danses et sculptures. Les légendes narrant sa défaite militaire face au conquistador Pedro de Alvarado possèdent de nombreuses variations, mais toutes symbolisent aussi la fin de la culture Maya. L'Occident situe cette défaite autochtone à la date du 20 février 1524 dans l'actuelle Quetzaltenango. Deuxième ville du Guatemala, son nom actuel lui vient des Nahuas qui s'allièrent à Alvarado. Mais les descendants des Maya continuent de la nommer Xelajú.
- La taverne du Dragon vert : Réputée pour être le lieu de rendez-vous des Fils de la Liberté dont Samuel Adams, Paul Rievere et Joseph Warren sont les fondateurs. Ils sont aussi les hommes à l'origine de la Boston Tea Party du 16 décembre 1773. Pour garder l'anonymat, les protestataires s'étaient déguisés avec des costumes d'inspiration Mohawks. Sherlock Holmes va d'ailleurs trouver pour indice un chant nommé « Mohawks » qui appelle, entres autres, à la méfiance envers le thé venu d'Angleterre, comparé à une entourloupe dans les paroles.
Tecun Uman est au cœur de la deuxième affaire. En effet, Sherlock est finaliste d'un tournoi de boulingrin dont le premier prix est un calendrier Quiché Maya. Au dos sont inscrits des symboles maya que Sherlock devra traduire : « Maudit celui qui profane le temple sacré, il connaîtra la mort par la statue du héros, seul l'élu sera épargné ». Une malédiction à laquelle deux témoins et suspects croient sincèrement. Ils déclarent que la victime a été tuée par la statue de Tecun Uman, possédée par l'esprit du héros venu les maudire. L'enquête de Sherlock le mènera dans un atelier bien fournit en statue de Tecun Uman, face à une seule statue du conquistador Pedro de Alvarado, l'ennemi fatal du héros Maya. Afin d'arriver à l'ultime conclusion, l'imagination de Sherlock poussera les joueurs à résoudre les énigmes mortelles d'un temple Maya profané.
Lors de la troisième affaire, Sherlock se grime en bandit afin d'entrer dans une version londonienne de cette taverne. Il y découvre une salle de jeux illégaux, une salle de recèle, mais surtout les manigances des personnes impliquées dans la tentative d'assassinat dont il fut victime la nuit précédente. C'est son chien Toby qui joue un rôle salvateur en réveillant Sherlock. Le détective se retrouve face à une bombe artisanale qu'il doit désamorcer. Ce n'est pas l'unique fois que Toby apporte son aide au cours des enquêtes. Il est même jouable pendant la première affaire où son flair canin sera primordial. La présence de Toby démontre l'originalité dont peut revêtir le gameplay.



Des choix qui pèsent lourd sur la conscience, légèrement sur la trame principale
La volonté de Frogwares d'offrir plus de liberté aux joueurs se traduit par la possibilité de dresser le portrait des personnages, de répondre honnêtement ou non aux questions, de présenter une preuve face à un mensonge et de choisir le sort du coupable désigné : le condamner ou l'absoudre.
En revanche, les choix au cours de l'enquête restent guidés. Rejouer les affaires permet de constater que les décisions concernant Sherlock/Katelyn ne les détournent nullement de leur discussion finale. Quant aux choix pris à la fin d'une enquête, ils n'ont pas d'impacts sur le déroulement de l'histoire. Au début de chaque nouvelle affaire, Sherlock va simplement recevoir une lettre différente selon l'issue choisie vis-à-vis du coupable. C'est là, l'unique et subtile variation.
La liberté presque totale des joueurs se retrouve via les phases de grimage et de déguisement : docteur, bandit, pasteur, joueur de boulingrin... sont autant de rôles que Sherlock se devra d'assumer. Le reste du temps, libre aux joueurs de le vêtir d'un pardessus, d'une tenue négligée ou d'une robe de chambre. Avant de basculer vers le miroir où une douzaine de coiffures sont proposées, autant de barbes et une paire de lunettes afin de déguiser le détective.



Si le gameplay se veut plus libre, il est assurément d'une grande facilité. Les joueurs sont assistés. Les archives de Sherlock sont bien fournies mais elles sont impossibles à consulter en dehors des phases nécessaires. De plus, si un article non utile à l'enquête est sélectionné, Sherlock se refuse à le lire. Le jeu signale automatiquement quand l'œil de Sherlock remarque des détails importants. Un œil et la commande pour l'activer apparaissent à l'écran. Les éléments à examiner brillent.
Quant au portrait des suspects, les indices à relever sont peu nombreux, entre cinq ou sept, mais seuls deux sont à deviner par les joueurs. Une énigme des plus facile à résoudre puisque deux choix sont d'emblée à l'écran, tout comme la solution qui est volontairement floue mais restant lisible.
La véritable facilité du gameplay vient de la possibilité de « passer » à l'étape suivante. La proposition apparaît après quelques échecs, directement si l'enquête est rejouée. En passant tout ce qui est possible de passer, la durée de vie du jeu devient inférieure à dix heures. Une alternative tentante face à des phases parfois pénibles. D'autant que passer ces étapes que le jeu nomme « mini-jeu », niant légèrement leur importance, n'entrave pas le résultat recherché. Les indices seront donnés, les serrures crochetées et la partie de boulingrin gagnée.




Toutefois, les enquêtes ne pourront se résoudre sans relier les indices trouvés via les phases de déduction. Une fois les indices comparés, les liens prennent vie sous forme de neurones qu'il faut connecter afin d'obtenir une conclusion. Certaines réflexions ne mènent qu'à une seule possibilité, les autres laissent aux joueurs deux alternatives. En cas de contradictions entre les déductions, les neurones deviennent rouges, indiquant clairement aux joueurs que sa réflexion est bancale. Lui retirant un risque de se tromper, qui existe bel et bien puisque des indices peuvent passer inaperçus et l'échec peut s'avérer mortel pour les PNJ, Sherlock ou ses proches.
Lorsque Sherlock a désigné un coupable, trois choix s'offrent aux joueurs : vérifier la conclusion, rejouer la fin ou classer l'affaire. Si la dernière alternative est choisie, il faudra recommencer toute l'enquête pour essayer d'autres fins. Sans oublier que, quelque soit la fin d'une enquête, la trame principale n'est nullement altérée. Malgré toutes ses tentatives de résistance, Sherlock ne pourra échapper à sa confrontation avec la fille du Diable...






Sherlock Holmes : The Devil's Daughter
Liberté simplifiée
- +Une réalisation graphique détaillée
- +Un doublage français vivant
- +Un scénario absorbant
- +Des phases de jeu originales
- +Reconstitution de Londres soignée
- +Version propre, sans bug, ni crash
- -Trop facile et guidé
- -Des mini-jeux pénibles
- -Quelques irrégularités
Gallinulus Pinguis Sainte-Mère des bébés phoques, Rédactrice, Testeuse, Chroniqueuse
- "Personne ne peut longtemps présenter un visage à la foule et un autre à lui-même sans finir par se demander lequel est le vrai" Nathaniel Hawthorne