Info sur le jeu
PlateformePC Windows
ÉditeurHooded Horse
DéveloppeurSlavic Magic
Date de sortieAvril 2024
(Accés anticipé)

Manor Lords

L'Amiral
Thématique
27 avril
2024

Si vous êtes un tant soit peu intéressé par les city builders et l'Histoire, vous avez forcément entendu parler de Manor Lords, le jeu aux plusieurs millions d'ajouts à la liste de souhaits Steam. Et c'est le vendredi 26 avril que la version de ce jeu développé par un seul homme a été rendue disponible sur la plateforme de Valve – sous la forme d'un accès anticipé. Une seule question était alors sur tous les claviers : le jeu valait-il l'attente ?

Disons-le sans ambages : souligner que Manor Lords était très attendu est un euphémisme. J'écrivais moi-même le 9 juillet 2020, date à laquelle le studio Slavic Magic a pour la première fois évoqué son jeu, que Manor Lords me semblait être une « petite pépite ». Très vite, la communauté des fans de city builders s'est mobilisée et a décidé de ne pas laisser tomber ce projet dans l'oubli. Chaque bande-annonce distillait des promesses qui pouvaient paraître un peu trop folles pour ces joueurs qui ont découvert le genre avec Banished : de nombreuses ressources à récolter, un placement assez libre de bâtiments, de l'agriculture modulable… Mais aussi, cerise sur le gâteau, des combats qui semblaient tout droit tirés d'un jeu de la saga Total War.

Je vais être honnête : « chat échaudé craint l'eau froide »… De nombreux projets de city builders m'ont déçu par le passé, notamment avec des bandes-annonces trop lointaine de l'objet du jeu, ou un gameplay dont on fait le tour en l'espace de quelques heures. Bref, si Manor Lords me tentait beaucoup, je craignais de tomber sur une énième copie de Banished avec des graphismes améliorés. De quoi me faire plaisir pendant une dizaine d'heures avant de passer à autre chose… et de terminer déçu.

Manor Lords  Manor Lords1. Un humble départ ! - 2. La carte régionale avec mon territoire de départ.

Banished, l'inspiration obligatoire

Sauf que c'est tout le contraire qui s'est passé en lançant le jeu il y a quelques jours. Évacuons le sujet d'emblée : oui, il y a de nombreuses similitudes entre le pionnier du genre, Banished, et Manor Lords… tout simplement parce que « l'ancêtre » du city builder a posé les bases d'un renouveau. Dans le jeu de Slavic Magic, le joueur est à la tête d'une petite colonie qu'il doit développer en assignant (ou pas) les travailleurs à plusieurs bâtiments afin de produire des ressources.

Mais c'est ici que la comparaison s'arrête. Manor Lords n'est pas une copie de Banished en 2024 : c'est un jeu à part entière. Le joueur est donc placé à la tête d'une petite communauté qu'il va amener vers la prospérité : la récolte des ressources est simple mais efficace, avec le trio de base « bois-baies-viande ». D'autres ressources comme le fer, la pierre et l'argile sont disponibles dans cette version d'accès anticipée – une liste qui va se développer au fil des mois, dixit le développeur. Après avoir construit un puits et une église, les besoins des villageois s'améliorent et leur satisfaction en attire d'autres. Rien de bien novateur jusque-là, mais la recette est toujours aussi efficace. Ce sont d'autres détails qui font de Manor Lords un jeu particulier…

Manor Lords  Manor Lords3. L’outil de création des censives est vraiment intuitif. - 4. Un arbre de développement où il faut dépenser des points gagnés à chaque amélioration du village.

Travail, Famille…

Arrêtons-nous un instant : dans Manor Lords, le joueur n'assigne pas des travailleurs aux bâtiments, mais des familles entières. Ce qui signifie qu'il n'y aura donc pas un seul travailleur qui ira ramasser les baies, mais en général trois individus. Pour plus d'efficacité, il faudra assigner des familles au grenier à l'entrepôt, ces dernières étant chargées d'y acheminer les ressources.

Enfin, l'acheminement des ressources aux habitations est la grande nouveauté de Manor Lords : ce dernier se fait via le marché… qui n'est en fait qu'un lopin de terre délimité par le joueur. Les habitants y installent ensuite des étals en fonction de leur travail et y récupèrent leur lot de subsistance. Au fil de la partie, vous verrez donc des étals se développer ou se modifier, et des habitants s'y interpeller tout en y faisant leurs courses.

Car le placement libre est en fait l'ADN de Manor Lords : au lieu de placer les habituelles maisons carrées, le joueur trace une zone dans laquelle des censives vont s'installer. Les censives (« burgage plots » en anglais) sont des parcelles en longueur composées d'une habitation suivie d'un lopin de terre qui, historiquement, n'était pas imposable et dont l'exploitation relevait uniquement de la volonté du paysan, pas de son seigneur.

Manor Lords  Manor Lords5. Ma milice, à gauche, va affronter des brigands, à droite. - 6. L’édification de l’église du village.

En fonction de la richesse de la région (à ne pas confondre avec les deniers personnels du joueur), il sera possible d'y développer un poulailler, une chèvrerie, mais aussi un forgeron ou un fabricant d'arcs au niveau 2. Car la progression dans Manor Lords ne débloque pas de bâtiments « communaux », mais des extensions de plus en plus développées pour le village. Vous n'aurez pas d'armurerie à placer, mais il vous faudra améliorer une censive au niveau 2 pour avoir de nouvelles armures…

C'est tout un nouveau pan de jeu qui fait son apparition, et qui rafraîchit totalement le genre. Enfin, toutes les ressources sont accessibles à travers les échanges commerciaux – mais attention : l'ouverture d'une route est payante ! Si la gestion de la richesse de la région distincte de celle du joueur peut porter à confusion au début, on comprend vite comment gérer au mieux.

Manor Lords  Manor Lords7. Vue « touriste » en pleines moissons. - 8. Le moulin ne doit pas être placé trop près des arbres pour bénéficier d’un bon vent.

La carte et le territoire

L'autre innovation de Manor Lords consiste en une carte spéciale, puisque cette dernière est composée de plusieurs régions neutres que le joueur doit revendiquer avec de l'influence. Cette dernière s'obtient en prélevant l'impôt ou en neutralisant des camps de bandits sur la carte. Dans le cas du jeu contre une IA, chaque participant peut contester la revendication militairement, les deux camps amenant leurs troupes à un endroit prédéfini afin de régler la querelle par les armes. Chaque région dispose bien sûr de ses forces et faiblesses en fertilité et ressources : il faut donc choisir soigneusement ses revendications.

Cet aspect n'est pour l'instant pas le plus développé dans Manor Lords puisque plusieurs options ne sont pas « cliquables », notamment celles faisant appel au roi. Dans les faits, l'idée est intéressante et semble plutôt prometteuse.

Manor Lords  Manor Lords9. J’ai fait appel à des mercenaires qui arrivent bannières au vent. - 10. Notez le soin apporté aux environnements et aux armures.

La bataille

En général, un city builder ne dispose pas d'un volet militaire très poussé. C'est tout le contraire pour Manor Lords puisque des brigands peuvent attaquer le village du joueur, qui ne pourra se défendre au départ qu'avec… une milice paysanne. Attention cependant à ne pas perdre trop d'hommes lors des combats, car ce sont autant de travailleurs qui ne seront ensuite plus disponibles. De même, si les caisses personnelles du joueur le permettent (via l'impôt, ou avec le butin des camps de bandits détruits), il est possible d'engager des compagnies de mercenaires dont l'efficacité dépend directement du coût de recrutement. Il faudra attendre un niveau de développement supérieur pour édifier un manoir plus ou moins fortifié et ainsi disposer d'une suite de fantassins lourdement armés, et qu'on peut librement personnaliser.

Les combats en eux-mêmes ne surprendront pas les joueurs de Total War puisque les unités se déplacent en formations et subissent des malus en fonction de leur fatigue ou de leur moral. Ainsi, une unité installée sur une hauteur aura un avantage tandis que les bois dissimuleront les troupes aux yeux de l'adversaire. Ces combats, très nerveux, sont aussi très réussis visuellement avec des animations réalistes – et quel plaisir de voir les hommes attendre, tous équipés de bric et de broc (vision beaucoup plus réaliste qu'un TW) avec leurs bannières flottant au vent ! Les affrontements avec l'IA sont donc fortement codifiés, comme au Moyen-Âge, avec des batailles rangées pour s'opposer à des revendications. Un plaisir pour les yeux et surtout pour ceux qui rêvaient pendant des années d'allier l'aspect militaire de la saga Total War à un city builder.

Enfin, la cerise sur le gâteau consiste en l'apparition du mode « touriste » (sic) : le joueur peut incarner son personnage à la troisième personne et se promener dans son village.

Manor Lords  Manor Lords11. Ma milice et mes mercenaires n’ont laissé aucune chance aux brigands. - 12. Mon humble manoir.
A+
Manor Lords

Le meilleur est à venir
Manor Lords coche toutes les cases du bon jeu à venir en tenant ses promesses faites durant les mois précédents. Les combats sont réalistes (vous n’alignerez jamais plus de quatre ou cinq formations) et l’économie est novatrice tout en conservant une base classique. Graphiquement, le jeu est magnifique avec des environnements très soignés et des détails variés. Cette version anticipée est déjà suffisamment agréable pour y passer quelques dizaines d’heures. En bref, si vous appréciez les city builders mais que vous aimeriez une pointe de combats, Manor Lords est fait pour vous.
Intérêt historique :Même si aucune région n’est citée, Manor Lords se déroule dans une Europe centrale du milieu du Moyen-Âge. On sent que le développeur a fait de nombreuses recherches pour que les bâtiments « collent » à cette esthétique médiévale. Les villages ont un charme spécifique qu’aucun city-builder n’a atteint jusqu’à présent.
  • +Gestion classique mâtinée d’innovations
  • +Graphismes et ambiance superbes
  • +Combats agréables qui ne tombent pas dans les clichés
  • -Tutoriel encore un peu brouillon
  • -Distinction entre l’argent de la région et du seigneur encore parfois floue pour le joueur novice
  • -IA encore mal équilibrée

  • Witz Rédacteur, Testeur, Chroniqueur, Historien
  • « L'important n'est pas ce que l'on supporte, mais la manière de le supporter » Sénèque