Info sur le jeu |
Plateforme
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ÉditeurGaijin Entertainment |
DéveloppeurDarkflow Software |
Date de sortieAvril 2021 (Bêta ouverte) |
Enlisted
Je vais être franc : le JcJ, moi, ça me gonfle.
Mais vraiment. On découvre un jeu sympa, on s'enthousiasme, on se prépare à passer un bon moment en oubliant que les trailers sont plus maquillés que les comptes bancaires de Patrick Balkany, et puis on se jette dans une arène tout guilleret.
Et là, c'est l'accident industriel : tout va trop vite, vous êtes systématiquement catapulté dans l'équipe qui se fait ratatiner, vous vous prenez des projectiles dans le front sortis de dieu sait où, tout le monde campe, les joueurs ont des comportements de volailles décapitées avec des skins qu'on qualifiera pudiquement d'extravagants (oui Battlefield V, c'est à toi que je pense), et en fin de compte, la partie ressemble plus à une foire agricole qu'à une bataille.
Alors quel espoir pour le travailleur fatigué qui veut s'immerger dans un jeu de tir à thème historique, sans devoir supporter les inconvénients du multijoueur et se faire tea-bag par des adolescents coréens ? Enlisted m'avait fait lever un sourcil : ces dernières années, des FPS sur le thème de la dernière guerre mondiale, il en a repoussé une bonne dizaine et il devient difficile de se démarquer.
Aujourd'hui, enfin passé en bêta ouverte après une longue phase d'alpha fermée, le titre des Lettons de Darkflow Software et des Russes de Gaijin s'annonce comme un shoot multijoueur gratuit, comme son colossal aîné War Thunder, qui lui a prêté son rutilant moteur Dagor Engine 6.0 et les modèles de son immense parc de véhicules aériens et terrestres.
Jusqu'ici, rien de très transcendant : deux équipes, un point de réapparition, deux objectifs à capturer, avec des tickets qui s'épuisent à chaque victime. Tous les jeux font ça depuis plus de vingt ans maintenant.
Mais dès le menu principal, Enlisted vous impose de faire un choix : combattre pour la Normandie, ou bien... pour Moscou. C'était suffisant pour lever mon deuxième sourcil : Enlisted ne vous expédie pas au hasard sur une carte multijoueur : vous combattez pour une campagne bien précise du dernier conflit mondial.
Rassurez-vous, ça n'est pas définitif : il est possible de changer manuellement. Mais prenons un exemple : en choisissant la Normandie, vous combattrez au sein de la campagne de l'opération Overlord : d'un côté les Alliés –les américains-, et de l'autre, les Allemands. Uniquement ces deux factions ; et en jouant dans cette campagne, chaque partie sera une bataille de cette campagne précisément, et pas une autre : qui un bocage normand, qui une série de positions antiaériennes aux premières heures du Débarquement, qui une escarmouche dans les marais de Carentan.
De plus, le joueur n'y est pas un mannequin anonyme : chaque réapparition se fait au sein d'une escouade particulière. Au nombre de trois maximum au démarrage de chaque match, ces escouades appartiennent à des unités historiques : régiment de grenadier, bataillon de mortiers, division d'infanterie, escadron de chasse... sachant que les noms, les uniformes, les insignes et les armements d'époque sont scrupuleusement respectés et bénéficient d'un souci du détail qui est surprenant, encore plus pour un free-to-play, là où la plupart se contentent d'être très généralistes.
En parlant d'armement, précisons aussi que cela possède un impact concret sur le gameplay : seuls les membres du 716e bataillon antichar pourront avoir (une fois débloqué) un fusil antichar ; les armes automatiques seront réservées aux unités de grenadiers ou de parachutistes, et seuls les unités du Génie peuvent bâtir des fortifications sur le champ de bataille à base de sacs de sable et autres barbelés.
Sachant que, de toutes manières, la plupart de vos troupiers iront au feu avec un simple fusil à verrou et un couteau-baïonnette, à la rigueur avec une grenade si vous êtes généreux. Que de bonnes intentions donc, qui vont flatter agréablement l'œil de celui qui cherchera dans Enlisted les petits détails qui renforcent l'immersion dans le jeu.
Évidemment, tout cela suit une certaine progression : c'est en jouant que l'on débloque des compétences particulières pour ses escouades, que l'on reçoit des armes et de nouvelles recrues, et que l'on débloque de nouvelles unités ; ainsi les premières à être déverrouillées seront des blindés légers et un chasseur pouvant effectuer de mortelles passes de mitraillage.
Ce souci du détail qui me fait de l'œil, on le retrouve d'ailleurs aussi en jeu, avec des effets de lumières splendides et des cartes qui ont bénéficié d'une attention particulière pour les rendre authentiques et crédibles (mention spéciale aux maisons enfin meublées, contrairement aux appartements-témoins de la plupart des concurrents). Cependant, Enlisted est arcade, mais pas trop arcade.
Les tirs sont létaux, les rafales de mitrailleuses ne pardonnent pas. Une grenade en intérieur, c'est la promesse de finir en steak haché pour tous les occupants. Un kit médical permet de donner une seconde chance à un soldat blessé, mais l'exposera pendant de longues secondes jusqu'à ce qu'il pose son bandage. On pensera à tort que prendre un blindé est synonyme de frag facile : eh bien pas vraiment, car les munitions s'épuisent vite, que les machines sont lourdes et lentes et que l'œilleton obligatoire (on reste dans les bottes du chef de char) fait qu'on y voit peu et mal. Pas question non plus de réapparition sur le chef de section : on repart depuis la base arrière.
Et puis qu'on parle de réapparition, je m'aperçois que je n'ai même pas évoqué une caractéristique intéressante d'Enlisted : vous ne jouez pas un soldat, vous en jouez plusieurs.
Votre escouade de GI's possède plusieurs soldats : vous en jouez un, les autres sont dirigés par l'intelligence artificielle, et si vous mourez, vous passez dans les bottes d'un autre membre.
Vous sentez venir l'inconvénient ? C'est là où Enlisted commence à faiblir. Jouer une escouade au lieu d'un soldat isolé est excellent pour l'immersion et intéressant pour le gameplay, mais dans son état actuel, les bots sont catastrophiquement stupides. Ils se contentent de vous suivre et d'ouvrir vaguement le feu à la vue d'un ennemi, mais se révèlent incapables de se mettre à couvert, et ne comprennent pas non plus que s'entasser à cinq sur deux mètres carrés est suicidaire quand les explosions volent dans tous les sens.
De fait, et vu la létalité des combats, il n'est pas rare de mourir et de s'apercevoir que vous êtes le dernier survivant.
Les mouvements ne cassent pas des briques non plus, beaucoup d'animations sont trop lentes ou trop rapides, et pas exemptes de bugs.
Au terme de quelques heures de jeu, le titre laisse une impression mitigée. Si vous cherchez un FPS compétitif, il n'a pas franchement d'intérêt ; si vous cherchez l'immersion, il en a nettement plus. Mais dans les deux cas, il faudra lui laisser un bon bout de temps pour essuyer les plâtres, corriger les bugs et le comportement de l'intelligence artificielle, et enrichir son expérience, car même si chaque escarmouche est assez prenante pour retenir mon attention, on se lasse vite de l'unique mode de jeu : le studio a bien prévu un autre mode, « solitaire » où vous êtes seul au lieu d’être en escouade comme son nom l’indique, mais le jeu n’est clairement pas prévu pour des engagements qui deviennent alors beaucoup plus resserrés.
Enlisted
Rengagez-vous
- +C'est beau
- +Cartes belles et très authentiques
- +Pas trop permissif
- +Diversité des matériels et unités
- +Le système d'escouade de bots prometteur...
- -... à condition d'avoir une IA qui les dirige
- -Manque de finitions
- -Inertie de paquebot dans les mouvements du personnage
- -Animations à retravailler
- -Un unique mode de jeu pour le moment
- Cernunnos Testeur, Rédacteur
- "Messieurs, c'est une plage privée! Je crois que nous dérangeons!" - Un officier britannique sur Sword Beach