Exposition "L'Inca et le Conquistador" au musée du Quai Branly

7 août 2015 par Lyrik | Conquista | Exposition | Musée

Aujourd'hui, direction l'Amérique. Mais oubliez de suite les États-Unis. Comme dans le précédent article de Brasidas, dirigeons-nous vers le sud. Il y a environ cinq siècles, une série d'événements allaient aboutir au choc de deux civilisations différentes, point d'origine de l'Amérique du Sud actuelle.

C'est cette confrontation que vous permet de (re)découvrir l'exposition temporaire du musée du quai Branly, L'Inca et le Conquistador, au travers du récit historique des événements, de peintures et d'objets d'époque. L'exposition a débuté le 23 juin dernier et se conclura le 20 septembre prochain.

À la conquête du nouveau monde

Même si le sujet vous semble complètement inconnu, l'exposition est faite de telle sorte que le visiteur ne soit pas perdu et puisse comprendre les tenants et aboutissants de cette conquête sans trop de difficultés. La visite débute d'ailleurs par la présentation de la vie des grands protagonistes de cette confrontation, Pizarro et les différents dirigeants de l'empire Inca.

Commence alors l'explication de la conquête espagnole, avec la rencontre entre deux civilisations et la capture d'Atahualpa puis la guerre qui opposa les Incas aux nouveaux venus. Enfin, l'après conquête est abordée, de la guerre civile que se menèrent les conquistadors autour de deux figures, Pizarro et Almagro jusqu'aux lois établies pour protéger les populations locales (notamment par Bartholomé de Las Casas) et tenter de cohabiter.

Tout au long de la visite, des pancartes explicatives (hélas trop nombreuses) viennent compléter la présence d'objets relatifs au sujet détaillé. Ainsi, pour la confrontation des Espagnols et des Incas après l'assassinat d'Atahualpa, des pancartes relatent la série d'affrontements qui se succédèrent et quelques armes et équipements des deux camps sont exposés, comme une hallebarde espagnole ou un casque Inca, histoire d'imaginer la différence entre les adversaires.

Deux mondes, un champ de bataille.

Comprendre la victoire des Conquistadors (Conquérants en Castillan) ne se limite pas à retenir leur supériorité technologique, toute relative. L'audace, la diplomatie, la ruse et la tactique sont autant d'autres facteurs à prendre en compte (sans compter les maladies). Parmi cette centaine d'aventuriers, pris pendant quelques temps pour des dieux à leur arrivée par les autochtones, tous n'avaient pas une expérience des armes.

Aventuriers avant tout, c'est l’appât du gain qui les poussaient à avancer en profitant de la situation tumultueuse de l'empire Inca. C'est ainsi que Francisco Pizarro, le bâtard d'une paysanne et d'un homme de la petite noblesse, parti de rien, gagne petit à petit en expérience militaire dans les alentour du Nouveau-Monde puis monte ses propres expéditions. En 1532, après la découverte d'une embarcation indigène remplie de richesse, la conquête du Pérou actuel devient effective. L'Empire Inca, loin d'être unifié, est en pleine guerre civile entre les frères Huascar et Atahualpa, laissant le pouvoir fragilisé, facilitant par la même l'aventure des Conquistadors. Profitant des dissensions entre les deux frères ennemis, les Espagnols, faisant preuve d'audace, parvinrent en 40 ans à renverser l'état inca en exécutant en 1572 Tupac Amaru, le dernier souverain Inca de Vilcabamba, épicentre de la résistance aux Espagnols.

Démêler le vrai du faux

Ces événements, vieux de plusieurs siècles ont été écrits et réécrits, façonnés et refaçonnés, au gré des croyances des deux camps, les deux n'ayant pas eut la même vision au cours de cette confrontation. Les deux visions sont justement au cœur de cette exposition. Ainsi, pour la capture de Atahualpa, dans la version Inca, c'est le refus de Pizarro de boire par peur d'être empoisonné et le gobelet renversé à terre qui provoquèrent la colère des Incas et l'attaque des Espagnols. Dans la version espagnole, il s'agit du moment où Atahualpa aurait jeté la bible que lui tendait le prêtre de l’expédition. Chacun des côtés présente donc une injure ou un blasphème comme élément déclencheur d'un acte de pure audace : la capture de l'Inca, devant sa suite médusée. L'exposition aborde aussi d'autres faits ambigus comme la mise à mort de l'Inca et les troubles de l'après conquête. On pourrait seulement lui reprocher le trop grand nombre de textes, affichés près des objets en vitrine, créant un effet d'attroupement devant et obstruant ainsi la vue en cas de forte affluence.

Gratuite pour les moins de 26 ans (une dizaine d'euros au-delà en fonction du ticket acheté), l'exposition L'Inca et le Conquistador aborde un fait historique trop peu mis en valeur de nos jours. Mélangeant textes et objets d'époque, elle permet aux visiteurs d'effectuer un voyage dans le temps et de comprendre comment un empire a pu s'écrouler en quelques décennies. Présentant les faits selon les différentes versions, elle permet de faire le point sur une facette de l'histoire encore entourée de mystères, comme celui de la localisation du corps d'Atahualpa. Une exposition très intéressante à ne pas rater donc !

Rendez-vous sur le site officiel pour avoir plus d'informations.