L'aventure de l'imprimerie - Deuxième partie

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21 juin
2018

Comme promis dans la première partie, on va aujourd’hui regarder plus en détail les suites et conséquences des inventions de cette moitié du XVème siècle, puis on verra une illustration ludique de l’imprimerie de Gutenberg...

Dans la première partie, nous nous sommes concentrés sur les procédés qui existaient avant le XVe siècle, le fonctionnement de l’imprimerie de Gutenberg et donc les découvertes faites par celui-ci.

Nous allons nous intéresser aujourd’hui aux conséquences de ces faits, conséquences qui remontent même jusqu’à nos jours. Premièrement, un rapide mot sur la diffusion de l’imprimerie.

Dans les décennies qui suivent 1450 (date arbitraire choisie pour plus de simplicité, mais on l’avait vu, il n’existe pas UNE date précise pour l’invention de l’imprimerie), on voit apparaître un peu partout en Europe des presses à imprimer.

Une des raisons de cette expansion rapide est le Conflit ecclésiastique de Mayence, de 1461 à 1462. Cette « guerre », qui est à propos du siège épiscopal de Mayence, poussera les ouvriers typographes de la ville à émigrer afin d’éviter les violences et l’interdiction faite par Adolphe de Nassau d’imprimer à l’avenir à Mayence. Cela permet donc de diffuser les inventions de Gutenberg.

Ainsi, des ateliers apparaissent déjà à Bologne en 1466, à Bâle en 1467, à Rome puis Venise en 1470, etc. Cependant, la rapidité de cette diffusion est principalement due à l’utilité de l’imprimerie à caractères mobiles. En effet, on l’avait vu, il y avait une demande de plus en plus forte dans le domaine des livres, due à de nombreux facteurs.

L'aventure de l'imprimerie - Deuxième partieIl est intéressant de noter l’apparition très rapide de nombreux foyers d’impression, ainsi que la corrélation entre la diffusion de l’imprimerie et le mouvement humaniste.

Les innovations

Les premiers livres imprimés avant le Ier janvier 1501 sont appelés incunables. Ils ne sont pas encore très différents des livres manuscrits, qui continuent d’ailleurs à être produits – comme toujours, il ne faut pas imaginer que les copistes disparaissent tous instantanément, tant s’en faut. Le premier livre imprimé par Gutenberg, la fameuse Bible dite B42 imprimée à environ 180 exemplaires, fait logiquement partie de ces incunables.

L’impression de livres a conduit à une série d’innovations qui ont perduré jusqu’à nos jours. On peut ainsi citer les filigranes, qui permettaient aux papetiers de marquer la provenance de leur papier au moyen d’un fil de laiton.

Une autre invention, encore plus importante, est la pagination. En effet, auparavant les livres n’étaient pas numérotés ; cette pratique apparaît avec l’imprimerie, afin d’aider les relieurs à ne pas intervertir les pages – il n’y avait pas besoin de numéros de page avec les manuscrits, étant donné que les copistes ne revenaient pas en arrière et qu’ils recopiaient les livres linéairement.

Cela permet donc aux lecteurs de se repérer plus facilement dans le livre ; on peut également citer un passage beaucoup plus facilement, en indiquant simplement (mais précisément) le numéro de page. La mise en page générale connaît également quelques autres innovations : divisions en chapitres, index et tables des matières.

Enfin, il faut noter l’apparition d’un élément qui nous paraît évident, mais qui n’existait pas avant le livre imprimé : la page de titre (qui n’existe d’ailleurs même pas sur les incunables). Cette dernière permet de faire connaître le titre (et donc le contenu du livre) ainsi que des informations plus commerciales : le nom de l’éditeur, le lieu et la date d’impression, etc.

La diffusion du savoir

Bien évidemment, la diffusion de l’imprimerie induit une production bien plus grande de livres, ce qui conduit à réduire leur coût. Le savoir devient donc accessible au plus grand nombre.

Un élément contemporain des débuts de l’imprimerie contribue par ailleurs à cette diffusion du savoir : la chute de Constantinople en 1453. Cela conduit les savants de cette ville à se réfugier en Italie (et notamment à Venise).

L'aventure de l'imprimerie - Deuxième partieMiniature du siège de Constantinople en 1453 réalisée à Lille en 1455.

Cela donne une impulsion importante à la Renaissance, comme il est assez largement connu (même si ce n’est bien évidemment pas le seul facteur). Cependant, on parle généralement assez peu d’une autre conséquence de cette arrivée des savants de Constantinople en Italie : ils emportent leurs manuscrits avec eux.

C’est un fait capital, en ce que ces manuscrits sont en langues originales, et n’ont donc pas été « corrompus » (dans certains cas) par une mauvaise traduction latine. On redécouvre donc notamment les œuvres de Platon, et plus généralement le savoir provenant de l’antiquité.

Cela conduit les langues antiques comme le grec et l’hébreu à être étudiées. Dans la même idée, les mathématiques antiques redécouvertes dans les livres grecs conduisent à relancer l’intérêt pour les techniques.

Une autre conséquence de l’imprimerie à caractères mobiles de Gutenberg est l’exactitude des livres imprimés. En effet, on l’avait vu, des fautes pouvaient se glisser lors du recopiage des manuscrits. Les livres imprimés sont eux remarquablement exacts (il suffit de faire attention lors de la préparation à l’impression, et non pas pour chaque livre produit).

Conséquemment à cela, ce goût de la précision se retrouve également dans la langue. Ainsi, cela conduit à une harmonisation de l’orthographe et de la grammaire des langues. De plus, du fait de la redécouverte de textes antiques, ne nouveaux mots viennent enrichir le vocabulaire.

Finalement, cette diffusion du savoir à grande échelle soutient plusieurs mouvements : on peut notamment citer l’Humanisme, la Réforme ou encore le journalisme. L’imprimerie a également permis le développement de l’individualisme, en mettant ce procédé individuel par excellence qu’est la lecture.

Une illustration ludique de l’imprimerie à caractères mobiles



L'aventure de l'imprimerie - Deuxième partie

Le choix va peut-être paraître étonnant, mais je vous rassure, je ne l’ai pas fait que par mélancolie (même si...). L’illustration en BD de la presse à imprimer peut en effet se retrouver… dans Les Schtroumpfs ! Et en plus, il y a une certaine fidélité historique à noter.

Pour ceux qui seraient vraiment nostalgiques ou qui veulent simplement connaître la suite de cet album des Schtroumpfs, c’est le tome 22 : Le Schtroumpf reporter.

L'aventure de l'imprimerie - Deuxième partie

Premièrement, on a une vision « large » de la machine, sur la case ci-dessus. On peut tout de suite remarquer la grande ressemblance avec la machine de Gutenberg et son modèle, la presse à raisin. Alors bien évidemment, c’en est une version simplifiée ; reste que le principe de base de la machine s’y retrouve.

On a ensuite l’illustration d’une des inventions majeures de Gutenberg : les fameux caractères mobiles d’imprimerie typographique en plomb. Si vous avez bien suivi la partie 1 de cet article, vous vous rappelez sûrement que c’est cette découverte qui change réellement les choses, permettant de créer rapidement, facilement et « à l’infini » de nombreux textes différents.

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L’étape suivante est la disposition de ces lettres sur une réglette — le composteur — afin de créer les mots et les phrases. Le Schtroumpf bricoleur fait bien de préciser qu’il faut schtroumpfer ces lettres à l’envers. En effet, étant donné la technique d’impression, le texte se retrouve finalement à l’endroit. C’est donc une remarque historique tout à fait pertinente.

Sur la première case ci-dessous, le Schtroumpf bricoleur dispose les réglettes — les composteurs — sur ce qu’il appelle une plaque. Ce plateau s’appelle en réalité la galée, mais le processus est néanmoins fidèle, là encore.

L’étape suivante est la mise sous presse à proprement parler. On voit bien, sur la seconde case ci-dessous, le fonctionnement précis de la machine et l’intérêt de la presse à raisin.

L'aventure de l'imprimerie - Deuxième partie  L'aventure de l'imprimerie - Deuxième partie

Et voici le résultat final. Le Schtroumpf bricoleur fait bien de préciser que l’on peut réimprimer le texte autant de fois que désiré, ce qui est dû au matériau des caractères, qui est très résistant (le plomb, pour rappel).

L'aventure de l'imprimerie - Deuxième partie

Cependant, l’autre fait fondamental que ne mentionne pas ce brave Schtroumpf est que l’on peut surtout créer un autre texte très facilement grâce aux caractères, qui sont petits et mobiles. C’est là tout l’intérêt du processus.

Je tiens à préciser rapidement que, même si des recherches historiques de grande envergure ont été menées afin de garantir la validité de la chose, il n’est pas encore tout à fait certain que les premiers mots imprimés par Gutenberg aient été « Tu vois, ça schtroumpfe ». Affaire à suivre...

Conclusion

Nous avons donc exploré, même si nous sommes restés en surface, l’aventure de l’imprimerie au XVe siècle (ainsi qu’un bref historique des procédés existant auparavant).

Il est indéniable que l’imprimerie développée par Gutenberg est une invention majeure qui a permis d’ouvrir la voie dans de très nombreux domaines. Sans elle, les connaissances de l’humanité ne se seraient très probablement pas développées aussi rapidement. On peut donc véritablement qualifier l’imprimerie de véritable monument de l’histoire de la communication humaine.

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