Hell Let Loose : L'enfer sur terre pour les nouvelles recrues en 2023 ?

Ralta
20 septembre
2023

C'est avec une certaine appréhension que je me suis récemment lancé dans Hell Let Loose via le service cloud de NVIDIA, GeForce Now, disponible sur ordinateur, Steam Deck, iPad, ou télé connectée. Mon principal objectif était de tester l'efficacité de GeForce Now face à un FPS bien remuant.

Hell Let Loose est sorti en 2019 et est disponible sur Steam depuis 2021. J'avais entendu parler des polémiques entourant le changement de direction après l'acquisition de la licence, développée par Black Matter, par l'éditeur Team 17 pour environ 55 millions d'euros.

C'est lors du PC Gaming Show 2023 que la bande-annonce de la dernière mise à jour, nommée "Devotion to Duty", a été dévoilée. On y découvrait des personnages ne tenant même pas correctement leurs fusils et des voix off semblant sortir d'un talkie-walkie au fond d'un placard !

Un démarrage peu convaincant pour le nouveau propriétaire de l'IP, surtout face à l'audience de l'un des plus grands événements de l'année pour les jeux PC. On pourrait se demander ce que les équipes de Team 17 et d'Expression Games, le studio qui co-développe dorénavant le jeu avec Team 17, avaient en tête. Et, pour ma part, je me demandais aussi pourquoi j'avais dépensé de l'argent (prix recommandé – 44,99€, souvent en promotion sur Steam) pour un jeu dont l'éditeur n'avait même pas pris la peine de peaufiner sa présentation...

Petite explication au sujet du trailer complétement raté

Il est important de noter que, selon certains employés de Team 17, ils estimaient que leur entreprise était en train d'acquérir un trop grand nombre de jeux, parmi d'autres problèmes de gestion, comme cela a été révélé par Eurogamer l'année dernière. De plus, lors d'une session Ask Me Anything sur Reddit il y a deux mois, l'équipe a expliqué que les problèmes liés à la bande-annonce étaient dus à leur collaboration avec un nouveau partenaire en communication et à des délais trop courts, selon le community manager.

En tout cas, je ne m'attendais pas à une catastrophe similaire à celle de Saints Row (2022) ou, plus récemment, de Lord of the Rings : Gollum (2023) chez d'autres éditeurs. Ces deux projets bâclés avaient entraîné la fermeture pure et simple de leurs studios, mettant ainsi la clé sous la porte... Il est difficile d'espérer des miracles lorsque l'éditeur ne prend pas la peine de soigner sa présentation pour une exposition diffusée mondialement sur YouTube...

Hell Let LooseMême les Allemands sont en train de se demander comment on voit à travers un bras

Malgré le fait que j’avais clairement des raisons d’être sceptique, une fois lancé, on se rend compte que le jeu ne se situe pas sur la même ligne de médiocrité que les infâmes déceptions des années précédentes. Au contraire, pour ce genre de jeu – un FPS multijoueur hardcore – il semble que la mission soit accomplie à un niveau acceptable. La courbe d'apprentissage reste assez abrupte, ce qui le rend intéressant.

Découvrir Hell Let Loose en 2023

Tout commence par la page de lancement qui propose des options pour soit passer par les casernes pour un stage d'apprentissage, soit rejoindre directement une unité de combat. Cependant, pour cela, il faut d'abord trouver un serveur.

Tous les serveurs sont gérés par des joueurs expérimentés qui, par passion pour le jeu, louent l'espace à un coût assez élevé, de 16 à 48 dollars par mois en 2022, et peuvent imposer leurs propres critères. Certains serveurs sont dédiés à une langue spécifique - espagnol, français, allemand, russe, anglais, etc. - ce qui est logique pour faciliter la communication pendant les missions. D'autres sont affiliés à certaines guildes, tandis que certains sont ouverts aux débutants. Le principal défi réside dans la recherche d'un serveur qui correspond à vos préférences en termes de langue, de disponibilité et de temps d'attente raisonnable. Il est également important de surveiller le ping, c'est-à-dire la latence du transfert de données. Hell Let Loose a tendance à afficher un ping plus élevé que la réalité.

Une fois cette étape franchie, vous pouvez choisir votre équipe en fonction du camp, Axe ou Alliés, bien que ce choix n'ait pas beaucoup de conséquences, car les camps changent à chaque bataille. Vous pouvez également sélectionner votre classe, que ce soit simple "bullet sponge" en blouson vert (ou gris...), officier, commandant, éclaireur, médecin, ingénieur ou commandant de char. Cependant, en raison de la complexité du jeu, il est préférable d'acquérir de l'expérience avant de prendre des rôles gradés, sous peine d'être rapidement évincé en raison de votre inexpérience. Pour les nouvelles recrues, il est donc recommandé de commencer en tant qu'infanterie pour acquérir de l'expérience et une meilleure compréhension des mécanismes du jeu.

Et il y en a beaucoup, même pour la carte, il faut quelques tours avant de réussir à la comprendre. On y voit des points bleus, vos camarades, et des rouges, les ennemis, mais aussi des verts qui sont des points de spawn – importants notamment pour les QG et les garnisons en chemin - et pleins de signes codés pour les différents objectifs. Chaque case change de couleur en fonction de la faction qui contrôle la zone, et ce, en temps réel.

Le réalisme du jeu est revendiqué, mais est-ce que cela se passe aussi rapidement lors des vrais conflits ? Il faut se débarrasser de ses habitudes conditionnées par les séries emblématiques de Call of Duty ou Battlefield. Ici, votre killstreak (série d'éliminations) n'a aucune importance, contrairement aux objectifs de l'équipe et surtout à la mise en place des garnisons permettant un contrôle maximal de la carte.

Hell Let Loose privilégie ainsi une expérience sociale, favorisant la communication par micro, bien que le clavier reste une option acceptable. Il est donc essentiel de parler à ses coéquipiers. Ce jeu ne convient pas vraiment aux (trop) nombreux amateurs de Call of Duty. Pas une seule fois je ne me suis fait traiter de "nullité" par des gamers de douze ans, Grande Victoire ! La coopération reste vitale pour progresser dans le jeu – même si, paradoxalement, jouer en solo peut sembler plus amusant, voire divertissant.

L'intérêt que beaucoup de joueurs trouvent dans les jeux vidéo est de devenir, ne serait-ce que le temps d'une partie, le petit dieu de leur bac à sable ou le héros de leur propre récit... Rarement pour être assujettis à des intérêts communs et à recevoir les ordres d'inconnus. Voilà précisément la situation dans laquelle on se retrouve en débutant dans Hell Let Loose.

De manière tout à fait naturelle, les autres équipes de son camp vont suivre ceux dans les véhicules et/ou converger d'eux-mêmes de manière organique vers des objectifs bien définis, et surtout, historiquement corrects. C'est là que l'on trouve la perle rare cachée dans ce jeu. On est en train de revivre - certes de manière synthétique et sans véritable danger - l'histoire de la Seconde Guerre mondiale. Cela n'empêche pas de se casser la main sur le bureau après avoir été tué pour la énième fois sans même avoir pu voir la couleur des yeux de votre agresseur…

Je ne dis pas cela avec légèreté, l'apprentissage est laborieux, mais lorsqu'on fait face à un FPS hardcore, on ne s'attend pas à être immortel et surpuissant - se rechargeant tous les douze pas et à encaisser des coups de poing de la Wehrmacht ou de l'Armée rouge sans subir de gros dégâts. C'est dans la lignée spirituelle des jeux Soulsborne et d'autres titres comme ARMA III, habillé dans un cadre réaliste de la Seconde Guerre mondiale.

On s'habitue rapidement à voir l'écran afficher 'Vous êtes mort'. Aucune assistance ne vient améliorer la vie du joueur, à la différence de nombreux autres FPS. Par exemple, il n'y a pas de réticule, à l'exception des viseurs en fer montés sur les fusils (un peu comme si Henry de Kingdom Come Deliverance se battait sur les plages du débarquement en '44).

Hell Let LooseHabituez-vous...

Lorsque l'on tente de viser, il est nécessaire de ralentir ses mouvements, et si l'on est en position couchée, on ne peut guère déplacer le viseur. Lorsque l'on est sous le feu ennemi, les bords de l'écran deviennent flous (en raison du stress et de l'adrénaline), et quand on est touché, ils virent au rouge, comme c'est courant dans la plupart des FPS.

Chaque camp comprend quatre catégories principales d'assignations : commandant, infanterie, armure et reconnaissance. Chacune de ces catégories est subdivisée en quatorze classes : infanterie, assaut, infanterie automatique, commandant, officier, médecin, soutien, mitrailleur, anti-char, ingénieur, commandant de char, personnel de char, observateur et tireur d'élite.

Certaines de ces classes sont plus efficaces que d'autres. Par exemple, l'infanterie, en particulier pour les Américains armés du Garand, est très efficace. La classe de soutien est aussi un incontournable car elle permet aux commandants et aux officiers de construire les points de réapparition et, par conséquent, de contrôler la carte.

Bien que les objectifs militaires "historiques" aient leur importance, le jeu tourne principalement autour du contrôle du territoire et de la rapidité avec laquelle les joueurs peuvent se mettre en position après avoir été inévitablement tués.

En guise de développement personnelle, on avance façon RPG, notamment grâce à des points d'expérience que l'on obtient en faisant tout et n'importe quoi dans le jeu. On peut gagner de l'EXP en effectuant des tâches de soutien, comme la construction de murs autour de points d'importance, en soignant ses camarades ou en les ranimant, ainsi qu'en éliminant l'ennemi bien évidemment.

Toutes ces actions contribuent à augmenter notre niveau et, donc, à débloquer d'autres rôles et équipements dans le jeu. Les membres de notre équipe peuvent également nous juger à la fin de la partie, ce qui nous permet de gagner un peu plus de points d'EXP.

Ce n'est certes pas un système de progression original, mais la profondeur d'implication le rend unique. Par exemple, être un Allemand qui défend la "maison d'Oleg" dans les steppes autour de Koursk en juillet-août 1943 rapporte plus de points par minute que d'obtenir un killstreak contre plusieurs ennemis russes... Ce type de progression décourage forcément ceux qui essaient de jouer de la même manière que dans Battlefield ou Call of Duty.

Hell Let LooseUne bonne défense est tout aussi efficace qu'une bonne attaque dans Hell Let Loose

Le réalisme dans les mécanismes du jeu reste à la fois son point fort et son point faible. C'est inévitable : vous allez être tué, à mainte reprise même. Le fait de le savoir permet de mieux anticiper et de se redéployer à différents points (un choix impossible une fois mort), gagnant en efficacité sur la défense des garnisons et en rapidité sur les contre-attaques. Oui, vous allez marcher en temps réel pendant plusieurs minutes à travers des champs de bataille exigeants, tels que les forêts denses d'Aachen ou les bocages inondés de Normandie. L'impact de la météo sur chaque carte est remarquable, tout comme le respect du cycle jour-nuit.

Les zones facilement traversables en plein jour deviennent de véritables épreuves une fois la nuit tombée, que l'on soit agresseur ou défenseur. Tout devient difficilement reconnaissable sous le couvert de la nuit. Ce réalisme demeure le point fort du jeu, expliquant pourquoi une communauté de plusieurs milliers de joueurs se rassemble chaque jour de la semaine pour y jouer.

Hell Let Loose en 2023, un grand oui, mais...

Si vous recherchez le jeu de tir multijoueur le plus réaliste basé sur la Seconde Guerre mondiale, alors Hell Let Loose est fait pour vous. Maintenant, il reste à espérer que l'éditeur Team 17 continue d'écouter sa communauté pour améliorer le jeu sans succomber aux pièges de Call of Duty, en imposant un mode de jeu plus rapide avec toujours plus de killstreaks et de loadouts surpuissants.

Hell Let LooseDe jour comme de la nuit, ce n'est pas toujours une simple balade en forêt

Hell Let Loose reste fidèle à sa vision initiale, celle de créer un jeu de tir à la première personne réaliste et historiquement précis. Cependant, Il y a des points à améliorer, notamment ceux mis en évidence par la bande-annonce ratée de la récente mise à jour, ainsi que l'amélioration de factions nouvellement introduites, comme les Britanniques.

Dans l'ensemble, ce jeu demeure, pour les amateurs d'histoire, le jeu multijoueur le plus élaboré basé sur cette période. Il ne faut néanmoins pas oublier que l'on ne peut pas y jouer comme d'autres FPS ; la valeur de Hell Let Loose réside dans le travail d'équipe et la communication entre les joueurs. La courbe d'apprentissage est importante, mais les récompenses, tant en termes de compréhension des réalités historiques que d'expériences de jeu, sont très gratifiantes.

Je lui attribue donc le grade de Lieutenant-Colonel et espère qu'il gravira les échelons à mesure que les améliorations de gameplay seront implémentées. Les nouvelles recrues de 2023 peuvent commencer le jeu sur des bases solides, et il mérite vraiment l'attention de tous les amateurs de jeux historiques, ainsi que des joueurs aguerris des Soulsborne ou des aventures maladroites d'Henry dans Kingdom Come Deliverance.

  • Ralta Rédacteur
  • "L'histoire sera gentille avec moi car j'ai l'intention de l'écrire." - Winston Churchill