La colonie maudite de Roanoke bientôt retrouvée ?

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5 janvier
2021

Nous sommes en 1590 : au terme d'un voyage épuisant de plusieurs semaines à travers l'océan atlantique, l'explorateur John White atteint enfin les côtes du Nouveau Monde. Cela fait plusieurs années que la couronne britannique explore et tente de coloniser ce continent plein de promesses.

Mais John White est anxieux : la centaine de colons qu'il a laissé sur les côtes de Virginie sont livrés à eux-mêmes depuis déjà trois ans ! Le voyage est aussi périlleux que coûteux, mais surtout, l'attaque de l'Invincible Armada espagnole en 1588 a forcé White a patienter deux années dans une Angleterre sur le pied de guerre avant de pouvoir repartir. Trois années où les colons sont totalement livrés à eux-mêmes, à des milliers de kilomètres de mer de la plus proche terre habitée... autant dire sur la lune.

Et ses craintes sont confirmées : lorsque la chaloupe de son navire accoste sur la berge de la colonie, il n'y a plus rien : les baraquement de bois sont effondrés, tout le matériel de la colonie a disparu, les bateaux aussi, et... plus âme qui vive.

Malgré quelques recherches dans les bois alentours, les Anglais ne retrouvent que le mot “CROATOAN” gravé dans le tronc d'un arbre. La colonie s'est ainsi volatilisée sans explications !

On suppose que les malheureux, affamés, ont voulu partir pour l'île proche de Croatoan, mais la menace des navires espagnols et surtout l'arrivée d'épouvantables tempêtes force les explorateurs a abandonner les recherches : White repart bredouille en Angleterre. La colonie est déclarée disparue et les colons, tués par les indigènes (bien qu'aucune trace de combat n'aie été retrouvée nulle part).

La colonie maudite de Roanoke bientôt retrouvée ?Les volontaires de la First Colony Foundation au travail ©FCF

Depuis, le mystère perdure et est entré dans l'Histoire et la culture populaire. On a parfois retrouvé quelques maigres indices et de nombreuses théories ont été formulées sur le destin de ces malheureux, littéralement avalés par l'immensité du Nouveau Monde.

Mais ces dernières années, l'enquête a repris grâce aux efforts de la First Colony Foundation, une association d'archéologie américaine visant à orienter leurs recherches sur les premières colonies américaines au XVIe siècle.

Depuis 2015, ces passionnés ont menés plusieurs campagnes de fouilles sur les îles de la côte de Virginie et exhumé des poignées d'épées, du mobilier de cuisine et des fragments de tablette, notamment sur l'île d'Haterras, ancienne île de Roanoke, en partenariat avec l'université anglaise de Bristol et l'archéologue Mark Horton. Ces découvertes avaient déjà, alors, laissé suspecter que les colons mystérieusement disparus n'avaient pas été enlevés ou massacrés par les Amérindiens mais qu'ils les avaient simplement rejoints.

Dernièrement, et malgré les difficultés dues à l'épidémie du coronavirus, l'organisation a mené de nouvelles fouilles sur un autre site dans la baie d'Albermarle, à 270 kilomètres au sud de Washington. Sur ce “site Y”, les archéologues amateurs ont découvert en janvier 2020 de nouveaux indices, infimes mais certains : de nombreux fragments de poteries anglaises, espagnoles, françaises et allemandes, dans des couches de sol datées formellement après le retour de White en 1590.

La colonie maudite de Roanoke bientôt retrouvée ?Photographie des extraits de poteries retrouvées ©FCF

Cette découverte tend à suggérer que les colons étaient toujours vivants lorsque White est revenu sur les côtes de Virginie, mais les explorateurs anglais n'ont pas pu les retrouver avant de repartir. Tout porte donc à croire que poussés par la faim et abandonnés, les premiers colons anglais ont quitté la colonie avec leurs biens et se sont assimilés aux tribus des indiens algonquiens à proximité, et y ont fini leurs jours.