L'armée aztèque au combat, une troupe fastueuse menant une guerre foudroyante

Le Spartiate
Thématique
Civilisation précolombienne
26 août
2015

L'armée aztèque au combat, une troupe fastueuse menant une guerre foudroyante

Aimant l'originalité et sortir des sentiers battus, c'est tout naturellement que je me suis intéressé à la civilisation aztèque. Mes articles auront pour but de faire découvrir cette société avant la conquête espagnole, et d'en dresser un tableau le plus proche de la réalité possible.

Bienvenue au Mexique et bonne lecture !

Si vous n'avez pas lu le premier article, alors il est temps de se rattraper : Religion et art de la guerre chez les Aztèques.

Une méritocratie fondée sur la cohésion de ses combattants

Sur le champ de bataille, tous les guerriers Aztèques revêtent un uniforme correspondant au nombre de prisonniers que chacun a pu capturer au cours de la bataille. Le seul point commun entre tous ces combattants, c'est le port d'une armure faite de coton. En effet être équipé d'une armure en fer ou en acier est très éprouvant en milieu tropical, les Espagnols le comprennent assez vite durant la Conquista.

Les roturiers, quant à eux, portaient une coupe de cheveux spéciale comme vous pouvez le voir ci-dessous. Ils n'ont pas de casques et pour la plupart manient habilement la fronde. Être tout en bas de l'échelle social n'est pas un frein pour monter dans la hiérarchie, il suffit juste d'apporter des prisonniers à sacrifier.

Coupe de cheveux  Uniforme d'un cuextecatl

Concernant les hommes nés sous les auspices de la guerre, si ceux-ci apportent deux prisonniers à l'empereur, ils sont récompensés par celui-ci de l'uniforme cuextecatl (image ci-dessus). S'ils en rapportent quatre, ils devenaient "chevalier" Jaguar, s'ils en ont six ils obtiennent la tenue coyote, etc. De nombreux grades existent et même les prêtres participent au combat. Les guerriers d'élite portaient des casques en bois représentant des animaux.

Il est important de savoir que chez les peuples précolombiens, chaque personne a un double animal appelé nagual. Le double animal de ces guerriers d'élite devenait alors le jaguar, le coyote ou encore l'aigle et ne faisait plus qu'un avec lui. On peut faire la comparaison avec les berserkir nordique dont le double animal est le loup, l'ours ou le sanglier sur le champ de bataille.

De plus, le "saint patron" du combattant aztèque, le dieu Tezcatlipoca a pour nagual le jaguar qui est un animal représentant les ténèbres contrairement à l'aigle. Les guerriers associés à ces animaux sont particulièrement importants, ils doivent plus que tout autre assurer leur mission cosmique en apportant du sang aux dieux.

Un quetzalPour un nombre déterminé de prisonniers ennemis capturés et suivant leur ethnie, un uniforme spécifique est donc attribué au combattant. Ces uniformes sont réalisés à partir de produits de luxe, et les plumes de quetzal, un oiseau tropical en image ci-contre, sont particulièrement prisées et ornent les plus beaux uniformes. Des artisans spécialisés les confectionnent avec talent, ce sont les amanteca. Tous ces biens proviennent des tributs envoyés régulièrement par les peuples soumis aux Aztèques.

CuahchiqueQuant aux hommes les plus méritants, ils intègrent des unités d'élite comme celle des cuahchique (en image ci-contre). Un conseil suprême responsable de l'armée est mis en place durant la saison des guerres, elle comprend quatre commandants. Chacun joue un rôle précis : ravitaillement, planification des marches, préparer le plan de bataille et superviser l'attaque en cours. Ces postes de commandement sont attribués aux hommes ayant suivi une formation dans l'école des prêtres, le calmecac.

La société militaire aztèque est donc en grande partie fondée sur un système méritocratique où chacun, même de la plus basse extraction, peut accéder à des postes élevés. Ce n'est pas un système de caste en ce qui concerne l'armée. De plus, chaque combattant est solidaire de son frère d'armes.

Ainsi l'infanterie mexicas possède une grande cohésion, car un régiment est constitué d'hommes provenant du même quartier (calpulli). En l'espèce, l'Aztèque se bat aussi pour protéger les membres de sa famille, ses voisins et ses amis directement sur le champ de bataille.

Lorsque l'armée part en campagne, la mobilisation se fait sur la base d'unité de 8000 hommes tirés des 20 calpulli de Tenochtitlan. La nourriture est fournie par la famille, les jeunes guerriers portent les paniers de nourriture composés de haricots, viande séchée, maïs ainsi que d'autres mets pour les plus vieux. Avant de partir, la famille du guerrier fait des offrandes aux dieux en se perçant la langue, les oreilles, les bras, les jambes afin de les nourrir et d'obtenir une protection.

Durant la campagne, les troupes se ravitaillent grâce aux dépôts de nourriture, d'armes, de vêtements disposés dans tout l'empire. Les cités et tribus conquises devaient les maintenir en l'état et les entretenir.

Ainsi, la troupe pouvait parcourir 15 à 30 km par jour, ce qui est plutôt important en milieu tropical. Les Aztèques considèrent l'expédition guerrière comme suivant la trajectoire du soleil et que cet astre guerrier est accompagné d'une multitude d'oiseaux multicolores. Une fois arrivés devant l'ennemi, la bataille peut commencer pour la plus grande gloire des dieux.

Le dieu Tezcatlipoca
Le dieu Tezcatlipoca

La foudre de Tlaloc

Lorsque la bataille s'engage, tout le monde est à son poste. Les deux armées sont face à face. Les guerriers aztèques sont à la fois terrifiants et majestueux dans leur accoutrement bestial, orné de plumes de quetzal et de rubis aux couleurs éclatantes pour les plus aguerris, le visage peint pour la plupart d'entre eux. Même les roturiers sont soigneusement coiffés pour la bataille. Chacun porte la mort sur lui, ce qui est à la fois effrayant et somptueux. C'est pourquoi dans quasiment toutes les armées du monde, l'uniforme répond à des codes esthétiques afin de terrifier l'ennemi mais aussi pour parer le combattant de ses plus beaux atouts avant de tuer l'ennemi ou de se faire tuer. L'armée aztèque ne déroge pas à la règle.

Tribus versés aux AztèquesAu moment où les hommes sont prêts à en découdre, les magiciens ouvrent le bal en entamant des rituels afin d'apporter malheur et désolation dans les rangs ennemis. Ensuite, les guerriers d'élite, les cuahchique, insultent et provoquent l'ennemi. Ils n'hésitent pas à faire des gestes obscènes. Une fois les esprits échauffés, les généraux donnent leurs ordres par différents moyens, que ce soit par des bannières, des messagers, des signaux de fumée ou par des tambours. La variance de la musique dirige la troupe au sein de la mêlée. Les Aztèques possèdent aussi une sorte de trompette qui est en fait un coquillage, la conque. Elle a le même rôle que le cor qu'on utilisait sur les champs de bataille en Europe au Moyen Age. Grâce à tous ces signaux, les ordres de repli, d'encerclement ou d'attaque peuvent être exécutés sans problème.

De cette façon, les hostilités commencent dès que les premiers projectiles sont lancés, en général par les paysans avec leurs frondes afin de briser les rangs de l'armée d'en face. Puis l'infanterie court à toute allure vers les guerriers ennemis. L'objectif est d'encercler l'armée adverse afin de faire un maximum de prisonniers. C'est pour cela que pendant la saison des guerres, ce sont plusieurs armées qui partent de Tenochtitlan, en empruntant des chemins différents. Le but est que celle-ci fassent leurs jonctions au bon moment pour créer l'effet de surprise et submerger totalement l'adversaire et le pousser à se rendre.

Mais les ennemis des Mexicas connaissent le sort attribué aux vaincus, par conséquent ils n'hésitent pas à se battre jusqu'au dernier. Il est à préciser que les Aztèques engagent le combat en étant quasiment toujours en supériorité numérique. Ils n'hésitent pas à envoyer auparavant des marchands en tant qu'espions dans les cités adverses afin de récolter un maximum d'informations.

Une fois la bataille remportée, les prisonniers sont emmenés à Tenochtitlan pour nourrir les dieux. Sur place les habitants sont massacrés et remplacés par des colons. Le surplus de population aztèque permet un tel expansionnisme. Cette démographie dynamique s'explique par le talent qu'a cette civilisation de maîtriser son milieu naturel en asséchant les marais, en construisant des aqueducs et de posséder des routes commerciales importantes.

Une autre solution est aussi parfois employée, c'est-à-dire occuper un territoire donné avec une garnison en plaçant à la tête de la cité subjuguée un noble aztèque ou un chef local favorable aux Mexicas.

Enfin, une bataille rituelle appelée guerre fleurie avait lieu avec d'un côté la Triple alliance regroupant les cités de Tenochtitlan, Tlacopan et Texcoco contre la cité de Tlaxcala et d'autres factions de la région de Puebla. On estime que ce rituel a été créé en 1450 après une famine, celle-ci étant considérée comme un châtiment des dieux pour le trop petit nombre de sacrifiés qui leur ont été offerts. Un accord est trouvé entre les belligérants quant au lieu et à la date de l'attaque. Les formes et les origines de ce type de bataille consenties par les belligérants sont encore mal définies par les historiens actuels. Ce qui est certain, c'est que le but était toujours de faire un maximum de prisonniers.

Dans tous les cas, la campagne militaire se termine à Tenocthtitlan par le sacrifice des prisonniers au dieu Huitzilopochtli afin que ceux-ci puissent se transformer en étoiles et avoir l'honneur de combattre les ténèbres auprès du Soleil.

Bibliographie

  • Danièle Dehouve, Anne-Marie Vié-Wohrer, Le monde des Aztèques, Riveneuve, 2008, 335 pages.
  • Alfonso Caso (auteur), Bernard Dubant (Traduction), Le Peuple du soleil, la Religion aztèque, Guy Trédaniel éditeur, 1995, 133 pages.
  • Marianne Mahn-Lot, La conquête de l'Amérique Espagnole, Presses Universitaires de France - PUF, 1996, 127 pages.
  • John Pohl, Aztec Warrior AD 1325-1521, Osprey Publishing, 2001, 64 pages.
  • Brasidas Chroniqueur, Historien

  • "Les Spartiates ne s’inquiètent pas de savoir combien sont les ennemis, mais seulement où ils sont !" Cléomène III