Info sur le jeu |
Plateforme
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ÉditeurBlackMill Games, M2H |
DéveloppeurBlackMill Games, M2H |
Date de sortieSeptembre 2022 |
Isonzo
Verdun nous avait habitué à des affrontements confinés et des courses effrénées entre deux tranchées. Tannenberg nous a proposé de grandes manoeuvres de contournement et des renversements de situation sur les territoires capturés. Isonzo, le dernier opus de WW1 Game Series, nous promettait un petit tour sur le front italien. Est-ce que les joueurs s'attendaient à un nouveau style de jeu ? Oui, bien sûr. Mais à une synthèse des meilleurs points de Verdun et Tannenberg ? Pas vraiment. Et c'est pour le mieux.
Changer d'air
Levons toute ambiguité : Isonzo est le troisième opus de la saga WW1 Games Serie devant, à terme, couvrir de nombreux théâtres d'opérations du premier conflit mondial. Dans ce style de jeu de niche, aucun FPS ne s'était véritablement démarqué jusqu'à Verdun. Ce premier opus, tout en se voulant réaliste, était une véritable surprise au niveau du gameplay en plaçant le joueur dans l'ambiance terrible de la ligne de front en France et en Belgique entre 1914 et 1918.
Tannenberg, quant à lui, représentait le premier essai d'adaptation des développeurs à un style de jeu différent, plus libre que Verdun avec des secteurs à capturer plutôt que des tranchées. Fallait-il y voir une tentative de séduire un autre type de joueurs alors que la date de sortie correspond peu ou prou à celle de Battlefield 1, lui aussi se déroulant pendant la Première Guerre mondiale ? Sûrement, mais là n'était pas la raison principale de ce changement de style, qui tenait davantage au style de combat sur le front de l'est.
En effet, de dimensions beaucoup plus grandes que le front franco-belge, le théâtre d'opérations à l'est se trouve être plus adapté à la guerre de mouvements et aux grandes offensives d'enveloppement - ce qu'on tenté de traduire dans Tannenberg les développeurs. Malgré un nécessaire temps d'adaptation, Tannenberg a séduit les joueurs de Verdun (et d'autres), notamment en permettant de jouer d'autres factions comme les Austro-Hongrois, Russes ou Bulgares, avec leur cohorte d'armes nationales toutes plus sympathiques les unes que les autres.
Et donc Isonzo dans tout ça ? L'exercice était périlleux pour les développeurs, qui devaient proposer un jeu différent tout en gardant l'ADN de la série. Refaire un style de jeu comme Verdun ou Tannenberg avec uniquement de nouvelles armes aurait été mal accueilli. Rassurons ici le lecteur : Isonzo est un jeu bourré d'innovations, et on sent que les développeurs se sont appuyés sur les leçons de Verdun et de Tannenberg pour proposer une expérience de jeu bien spécifique.
Les environnements à défendre ou à attaquer sont très divers. - Certaines cartes sont particulièrement portées sur la profondeur.
Dans l'enfer italien
Tout d'abord, faut-il préciser à nouveau que l'action se déroule cette fois-ci entre 1915 et 1918 dans le second front le plus meurtrier du conflit à l'ouest, c'est-à-dire en Italie ? Ce front relativement mal connu du grand public est pourtant celui avec le plus de potentiel pour l'aspect "cartes" d'Isonzo. Oubliez les grandes cartes plates de Verdun ou Tannenberg : dans Isonzo, vous jouerez constamment à flanc de montagne ou dans d'étroits chemins vertigineux. Par conséquent, les cartes sont plus longues que dans les autres opus, mais pas forcément plus larges, la topographie étant un des aspects principaux du jeu.
Toutes inspirées des batailles menées entre Italiens et Austro-Hongrois, les cartes sont fidèlement reproduites, et les développeurs ont fait un effort considérable sur l'aspect graphique du jeu. La différence visuelle entre Verdun et Isonzo est très importante, tout comme l'optimisation. Peut-être est-ce dû aussi au fait que le joueur quitte des tranchées boueuses pour des sommets plus ensoleillés ?
Le travail sur les explosions a été particulièrement soigné. - Le gaz est toujours présent.
Le déroulé des parties est légèrement différent de celui de Verdun ou de Tannenberg. Une partie démarre en tant qu'offensive, elle-même décomposée en plusieurs phases, qui sont autant de cartes à jouer. Si les champs de bataille sont relativement longs et que la progression se fait en ligne droite (comme dans Verdun), les objectifs sont pour l'instant divers : soit il s'agit d'un objectif à détruire (en posant une charge), soit d'un autre à capturer.
On l'aura compris : il n'y a rien de bien novateur dans ce genre d'objectifs, mais la variété est intéressante et permet de changer les situations. Défendre, en tant qu'assaillant, un objectif qui ne va pas tarder à exploser est tout aussi jouissif que de se ruer sur une position pour la submerger. Les assaillants disposent d'un système classique de tickets (300 par manche), qui se réinitialise à chaque fois qu'un secteur entier est capturé. Enfin, petit ajout qui apporte davantage à l'ambiance qu'au gameplay : les joueurs ont une minute pour se préparer avant le lancement de l'offensive. Le temps est mis à profit pour installer des positions ou préparer des frappes, puis, au coup de sifflet, les joueurs s'élancent pour pratiquer des trous dans les réseaux de barbelés et frapper l'ennemi.
Un Verdun plus grand public ?
Isonzo se démarque principalement de ses deux "grands frères" par sa gestion des escouades. Ces dernières accueillent toujours quatre joueurs en même temps, mais les classes ne sont plus fixes : une escouade peut très bien accueillir deux officiers et deux fusiliers. La gestion des rôles s'est déportée du côté de l'équipe avec des quotas, donnant un caractère beaucoup plus bigarré aux escouades.
Ces classes, justement, attardons-nous y : chacune est orientée vers un style de jeu bien particulier, et toutes sont communes aux deux factions. Les officiers (au nombre de deux par partie) auront la charge de lancer des frappes d'artillerie ou d'aviation via des postes de commandement, tandis que les fusiliers constitueront la masse de manoeuvre classique. Les assaillants, plus légèrement armés, feront office de troupe de choc quand les alpinistes et les tireurs d'élite agiront en tant qu'unité de soutien ou de repérage. Enfin, la classe des ingénieurs forme la véritable nouveauté dans Isonzo puisqu'ils sont équipés d'outils permettant la pose de sacs de sable, de réseaux de barbelés, de boucliers de snipers... mais aussi chargés de l'édification des postes de tir d'armes lourdes, comme les mitrailleuses. L'ajout de cette classe permet de remodeler le champ de bataille et de ne pas laisser les joueurs être uniquement guidés dans leur jeu par la topographie de la carte.
En laissant les joueurs composer leurs propres escouades, Isonzo sort d'un carcan qui pouvait être nuisible au plaisir de jeu dans les deux derniers opus. Cela permet une plus grande liberté d'action, notamment en donnant aux joueurs la possibilité de mener des opérations particulières - par exemple, une escouade d'assaut peut se concentrer sur un endroit avant de basculer en fusiliers pour la défendre.
Des armes lourdes, vraiment lourdes
L'autre innovation phare d'Isonzo tient dans l'apparition d'armes de soutien sur le terrain. Ne vous attendez pas à des pièces d'artillerie de 75 mm manipulables par les joueurs, car celles-ci demeurent hors carte et ne servent qu'aux barrages pour les officiers. Cependant, des mitrailleuses fixes peuvent être installées à des endroits prédéfinis par les ingénieurs, mais peuvent être aussi détruites par les adversaires - et ne seront pas reconstruites. De même, on peut noter l'apparition de canons de 65 mm côté italien, disposant d'une dizaine de munitions. L'installation de ces armes sont anecdotiques car elles sont très vite prises sous le feu, mais elles apportent une variation bienvenue à la série.
Les joueurs habitués à Verdun et à Tannenberg seront tout d'abord déboussolés par l'inertie des armes et le ressenti après leur utilisation. Habitué au Ruby ou aux revolvers de ces deux jeux, le rédacteur de ce test s'est très vite aperçu qu'il allait devoir s'habituer au nouveau maniement des armes : difficile d'enchaîner les tirs avec le Carcano 1891 comme avec le Berthier 1892... Pour, au final, une petite heure d'adaptation, mais des sensations bien différentes, et surtout très agréables : chaque arme a sa propre personnalité. Il faut aussi souligner que la plupart sont équipées de baïonnettes, de manière beaucoup plus importante que dans Verdun ou Tannenberg. Ainsi, n'hésitez pas à foncer : si votre fusil n'a plus de balles, il vous reste la baïonnette.
Un jeu nouveau avec des innovations
L'autre point innovant d'Isonzo tient dans la progression et le déblocage de nouvelles armes. Dans les deux précédents opus, les joueurs accumulaient des points qui leur permettaient de passer des niveaux ; chaque niveau franchi conférait des points à dépenser dans de nouvelles armes de la classe souhaitée. S'il était sommaire, ce système restait néanmoins efficace.
Pour Isonzo, les développeurs ont souhaité aller plus loin tout en conservant certaines bases. Ainsi, les joueurs gagnent toujours des niveaux en engrangeant des points d'expérience (par ennemi tué, par position sabotée, par ennemi blessé...), mais ils débloquent des armes et des compétences spéciales en remplissant des missions spécifiques. Par exemple, le second fusil du fusilier et la caisse à munitions sont débloqués après dix ennemis tués et un objectif capturé. Ces défis permettent de donner un peu plus de difficulté à Isonzo et à la progression, tout en détachant le gain de niveau du déblocage d'équipements.
Ci-dessus, j'ai bien écrit "caisse à munitions", oui : dans Verdun et Tannenberg, plusieurs joueurs se sont plaints de l'absence de moyens de récupérer des munitions. Le problème est réglé dans Isonzo, puisqu'un joueur disposant d'une caisse de munitions ou de grenades peut réapprovisionner ses coéquipiers.
Enfin, sur un point plus cosmétique, la progression dans les niveaux permet de débloquer des éléments d'uniformes pour personnaliser son soldat. Car oui, à l'inverse des précédents opus, le joueur peut personnaliser l'apparence de son soldat dans Isonzo, en choisissant le style de pilosité faciale mais aussi l'uniforme ou le casque qu'il portera. De quoi ajouter au petit côté "gain d'expérience" qui rafraîchit un peu la licence.
Une des principales innovations tient dans le fonctionnement de la classe d'officier et de l'artillerie. En partie, l'officier (pas plus de deux) dispose d'un pistolet lance-fusées qui lui permet de placer des points sur la carte, points sur lesquels il pourra lancer différents types de tirs, que ce soit de l'artillerie, du gaz ou de l'aviation. Plus le tir est puissant, plus il mettra du temps à se recharger, ce qui oblige le joueur à les choisir avec précaution. Terminé donc les chefs d'escouade utilisant à tort et à travers leur artillerie : en restreignant la classe, Isonzo permet plus d'efficacité et leur donne plus de poids. Pour finalement devenir un jeu très différent de ses grands frères...
Isonzo
WW1 Games Series au sommet de sa gloire
- +Ambiances visuelle et sonore parfaites
- +Cartes longues et variées
- +Système de classes et de progression bien équilibré
- -Défenseurs avantagés à l'excès par le terrain sur certaines cartes
- -Gestion de l'artillerie un peu brouillonne
- -Nouvelle inertie des armes un peu déconcertante
DIrection artistique
Notons-le de suite : les développeurs ont, pour Isonzo, choisi une nouvelle mouture du moteur Unity donnant de meilleurs graphismes que Tannenberg (mention spéciale pour les explosions). Isonzo n'est toutefois pas à la hauteur des plus gros jeux modernes sur le plan graphique.
Jouabilité
La prise en main d'Isonzo est classique et très simple. L'inertie des armes demande cependant un certain temps d'adaptation.
Ambiance
Entre les morceaux de musique, les tirs et les coups de sifflet, l'ambiance d'Isonzo est exceptionnelle. On se prend à écouter l'origine des tirs et à baisser la tête aux premiers obus.
Technique
Isonzo souffre encore de certaines erreurs de jeunesse à l'heure où ce test est rédigé. Mais c'est une affliction tout à fait normale pour un jeune jeu, qui se bonifiera avec le temps.
Durée de vie
Avec ses trois offensives, Isonzo dispose pour l'instant d'une durée de vie correcte digne d'un FPS multijoueur. Il faut cependant prier pour que de nouvelles cartes arrivent rapidement afin de ne pas lasser les joueurs.
Scénario
Isonzo n'a pas de scénario à proprement parler, mais les offensives proposées suivent le cours de l'Histoire avec une excellente mise en situation.
- Witz Rédacteur, Testeur, Chroniqueur, Historien
- « L'important n'est pas ce que l'on supporte, mais la manière de le supporter » Sénèque