Découverte d'une cité enfouie en Éthiopie
Généralement oubliés, pour ne pas dire “complètement passés à la trappe” en temps normal, les empires africains sont aujourd'hui sous les feux de la recherche historique et scientifique : en Éthiopie, des fouilles archéologiques viennent de mettre au jour les vestiges d'une des plus importantes cités du royaume d'Aksoum.
Ce royaume émergé dans l'Antiquité et qui a subsisté jusqu'au Haut Moyen-âge fut un partenaire diplomatique et commercial de l'Empire romain, qui dût sa prospérité à la richesse de ses terres et son commerce avec l'Inde via la mer d'Arabie et le golfe d'Aden. Il s'effondra face à la Perse avant l'an Mil.

Dernièrement, une équipe d'archéologues de l'université de Baltimore menée par mr. Michael Harrower a entrepris une campagne de prospection et de fouilles dans la région de Yéha, à une cinquantaine de kilomètres de l'ancienne capitale du royaume, Aksoum.
Plusieurs sondages successifs auraient révélé la présence de vestiges de bâtiments dans une colline ; ce qui aurait petit à petit mené à la découverte d'un site de 14 hectares ! Nommé Beta Samati, c'est-à-dire "foyer d'audience" en langue tigrigna.
Les datations menées sur le mobilier récolté suggèrent que la cité a existé entre le VIIIème siècle avant J.-C. et le VIIème de notre ère ; ce qui en fait un cas d'étude exemplaire. En effet, la ville, ayant vu passer l'intégralité du royaume d'Aksoum avant d'être abandonnée au désert, va permettre d'obtenir des renseignements d'autant plus exhaustifs vu que, en raison de l'extrême instabilité politique du pays depuis le XXème siècle, les fouilles archéologiques y étaient rares.

Dans l'ensemble, les structures de bâtiments découvertes sont variées : habitations, ateliers, bâtiments administratifs, publics, religieux. Les poteries et les nombreuses pièces de monnaie découvertes confirment qu'un important trafic commercial transitait par Beta Samati.
Plus curieux encore, les archéologues ont découvert les vestiges d'un vaste bâtiment rectangulaire qui s'apparente à une basilique romaine. Si l'on savait que le royaume d'Aksoum avait été parmi les premiers à accueillir le christianisme en Afrique sous le règne d'Ezana (IVème siècle), on en ignorait encore trop le détail et les moyens concrets.
Par tradition, la conversion du puissant royaume aksoumite au christianisme reposait sur la seule volonté du roi Ezana. Mais cette découverte remet cette légende en question: « C'est ce qui rend la découverte de cette basilique si importante! C'est une preuve fiable de la présence chrétienne au nord-est d'Aksoum à une période très précoce », a précisé Mr Harrower au journal Smithsonian Mag.
Le bâtiment n'était pas vide : la fouille des niveaux de sol a permis d'en sortir un certain nombre de petits objets témoignant d'activités variées, commerciales, civiles et religieuses (rappelons que la basilique n'a, à l'origine, qu'une fonction civique et commerciale). Notamment une petite bague en or et cornaline de seulement dix millimètres de large, arborant une tête de taureau, ce qui témoignerait d'un mélange subtil de croyances polythéistes, appelées à s'intégrer à la nouvelle religion, représentées par un pendentif de croix en pierre et une inscription sur un des murs.

Cette magnifique bague est un exemple de mélange entre les influences méditerranéens et le style purement éthiopien. « Ils utilisaient certaines des idées venues de la Méditerranée mais les tournaient d'une façon différente, vers un style africain unique », a détaillé Michael Harrower. « L'anneau est l'artefact le plus excitant et impressionnant que nous avons trouvé pour le moment. Habituellement, nous recherchons les informations scientifiques et pas nécessairement de l'or. Mais toutes sortent des gens me demandent: “avez-vous trouvé de l'or?”, et oui, nous en avons effectivement trouvé ».
La bague sera exposée comme le reste, probablement localement. En attendant, les fouilles ne font que commencer sur ce site.