Néandertal : l'expo au Musée de l'Homme jusqu'au 7 janvier 2019
En 2010, une équipe de biologistes étudiant les gènes de l'homme de Néandertal ont fait une découverte surprenante : les Eurasiens et Eurasiennes possèdent entre 1 et 4% de gènes provenant de cet ancêtre lointain ! Une révélation qui, si elle n'a pas changé grand chose dans notre vie quotidienne – avouons-le – a fait l'effet d'une bombe dans les milieux scientifiques.
En effet, ces résultats remettent en question pas mal de certitudes : Néandertal et Homo Sapiens ont eu une descendance commune, et fertile. Théoriquement, cela signifie donc qu'ils ne sont pas – stricto sensu – deux espèces différentes. Et cela change pas mal de choses sur la vision de l'évolution humaine.
C'est donc dans ce contexte de découvertes récentes, et de plus en plus rapprochées, que le Musée de l'homme a décidé de présenter cette exposition sur l'homme de Néandertal, histoire de faire le point sur l'état des connaissances actuelles, mais également de tordre le cou à certaines idées reçues.
Lorsqu'on évoque Néandertal sur la chronologie, il faut compter sur une période allant de -350 000 environ, à -35 000. Une fourchette qui ferait passer un anachronisme de quelques siècles pour une broutille !
Pour bien remettre en perspective les différentes problématiques que pose le sujet, l'exposition a été conçue en trois étapes : le temps d'une journée, le temps d'une vie, le temps d'une espèce. De même, dans un souci d'allier rigueur scientifique et découverte grand public, chaque espace mêle reconstitutions, objets originaux et ateliers interactifs.
La première partie de l'exposition s'intéresse à la vie quotidienne de Néandertal au travers d'un site archéologique découvert à La Follie, près de Poitiers. Que nous apprend-il sur la façon dont vivait notre ancêtre ?
Placé dans la position du scientifique découvrant le site, le visiteur est invité à s'interroger sur la notion de reste archéologique : ce qu'il reste est tellement parcellaire qu'il faut parfois déployer des trésors d'imagination pour interpréter le site. Et attention à ne pas y plaquer ses propres modèles socio-culturels, s'il vous plaît !
L'exposition se penche également de façon très intéressante sur la représentation que les différentes époques se sont faites de Néandertal. Sa découverte en 1856, à peine trois ans avant la publication de la théorie de Darwin sur l'évolution des espèces, ne pouvait être comprise, dans la logique de l'époque, qu'au travers de l'opposition homme civilisé (Sapiens) versus homme-singe (Néandertal).
Cette représentation lui a collé à la peau, velue de préférence, et l'imaginaire collectif continue souvent de se le représenter armé de sa massue, traînant sa femme par les cheveux. À ce titre, l'exposition montre ainsi comment, à partir des mêmes caractéristiques crâniennes, on peut représenter le même individu de manière différente, selon l'image que l'on s'en fait, ou que l'on souhaite donner de lui.
Si l'exposition n'élude pas certaines questions épineuses comme le cannibalisme, elle prend bien soin d'en écarter tout jugement moral. Cette pratique est replacée dans son contexte et l'on y rappelle – au cas où certains l'auraient oublié - qu'elle n'est pas uniquement le fait de Néandertal.
Mais, au fait, comment a-t-il disparu ce loitain ancêtre ? Est-ce à cause d'une maladie ? D'une raréfaction des ressources ? D'une lutte avec Sapiens ? D'un déclin démographique ? La troisième partie de la visite s'avère l'occasion de se rendre compte à quel point les hypothèses sont diverses, et surtout qu'il est difficile, en la matière, de prouver quoi que ce soit !
Enfin, la dernière salle s'attache à montrer à quel point, aujourd'hui, Néandertal est encore très présent. Elle présente toute une multitude d'objets, parmi lesquels par exemple des bandes dessinées, des jouets ou des parfums qui participent - ou qui tirent profit - de l'imaginaire collectif encore très vivant autour de cet ancêtre.
C'est ici que le visiteur fait la connaissance de Kinga. Oeuvre d'Elisabeth Daynès, reconnue mondialement pour ses reconstitutions de visages, cette femme néandertalienne a été ici habillée et coiffée de façon moderne. L'occasion de se poser la question : si nous la croisions dans le métro, reconnaîtrions-nous cette aïeule finalement pas si lointaine ?
- Akialam Lectrice, spectatrice, visiteuse d'expo et blogueuse !Twitter | Facebook
- “La première et la plus simple émotion découverte par l'esprit humain est la curiosité.” Edmund Burke
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