Trèves, la « Seconde Rome » de l’Occident

L'Amiral
Thématique
Curiosités historiques
18 août
2017
Croix romaine située au milieu de la place principale de Trèves, marquant le centre du forum romain.Croix romaine située au milieu de la place principale de Trèves, marquant le centre du forum romain.

On le sait, les Romains n’ont pas été bien loin dans leur conquête de la Germanie. Les étendues sauvages remplies de peuples germaniques bien décidés à se défendre n’ont pas rendu la tâche facile. Et la bataille de Teutobourg en l’an 9 détruit durablement les rêves (ainsi que trois légions romaines) de conquête de la Germanie.

Néanmoins, certaines ethnies ont été soumises par les Romains, et parmi eux, les Trévires, peuple celte, installés au bord de la Moselle, fleuve affluent du Rhin.

Fondée en l’an 16 par l’empereur Auguste suite à une révolte des Trévires, Augusta Treverorum va prendre une place prépondérante dans l’Empire romain d'Occident au fil des années. Petite compilation des monuments à découvrir dans cette ville millénaire.

Augusta Treverorum la romaine

La ville de Trèves est la plus vieille ville d’Allemagne. En effet, sa fondation en l’an 16 en fait la seule et presque unique ville romaine qui s’est considérablement développée sous l’Empire romain. D’autres villes ont existé, comme Colonia Agrippina (l’actuelle Cologne), mais leur développement n’a jamais pu égaler Augusta Treverorum.

Construite autour d’un pont (toujours debout de nos jours) sur la Moselle, cette colonie romaine a très vite profité des conditions météorologiques parfaites pour la plantation des vignes. Les rives de la Moselle, qu’elles soient en France, au Luxembourg ou en Allemagne, ont vu la vigne y être cultivée par les Romains dès leur arrivée.

C’est donc dans une région riche de par ses vins que les Romains vont établir leur colonie. Les vestiges romains y sont très bien conservés, en particulier le monument emblématique de la cité : la Porta Nigra.

La Porta Nigra, vue de face.  La Porta Nigra, vue de derrière.  L'intérieur de la Porta Nigra, sculptures médiévales.La Porta Nigra, vue de face. - La Porta Nigra, vue de derrière. - L'intérieur de la Porta Nigra, sculptures médiévales.

Suite au développement de la cité, une enceinte de 6 kilomètres de long a été édifiée pour protéger cette ville essentielle. Entre 186 et 200, la porte d’entrée nord des remparts est construite avec des blocs de six tonnes de grès blanc fixés entre eux par des crampons métalliques. Au Moyen-Âge, l’édifice gagne son surnom de « porte noire » à cause des micro-organismes ayant noirci les pierres.

Vue sur le cardo romain depuis la Porta Nigra.Vue sur le cardo romain depuis la Porta Nigra.

La Porta Nigra a évité la destruction et la réutilisation de ses pierres à cause de la présence d’un ermite grec, Siméon, qui s’y cloître en 1028. Il décède en ermite le 1er juin 1035, et l’évêque Poppo de Trèves décide de convertir le monument romain en église. Siméon est canonisé quelques années après sa mort, conservant la porte comme lieu saint. Le niveau de la terre fut alors relevé jusqu’au premier étage pour accéder à l’église.

De nos jours, la Porta Nigra est visitable entièrement, et du premier étage le visiteur peut encore voir le début du cardo romain (l’axe nord-sud de la Ville). À noter que Napoléon Ier, à son arrivée à Trèves, a souhaité conserver le bâtiment en l’état et l’a fait restaurer.

Les autres vestiges romains importants sont les restes des thermes impériaux et de l’amphithéâtre. Les vestiges sont hélas peu présents, mais suffisants pour se rendre compte de l’opulence dans laquelle l’élite romaine vivait à Augusta Treverorum.

Enfin, pour terminer la visite de la période romaine, un détour à la basilique de Constantin est obligatoire. Construit entre le IIIème et IVème siècle, le bâtiment est tout d’abord une aula, c’est-à-dire une galerie couverte, qui sert de salle de trône à l’empereur Constantin. Long de 67 mètres et haut de 33 mètres, le bâtiment a été détruit au fil des siècles, puis remanié et enfin reconfiguré selon l’origine romaine au XIXème siècle. Il est attenant au palais du Prince Électeur, merveille architecturale du XVIIème siècle. Enfin, quelques morceaux du mur d’enceinte romain sont encore visibles le long des rues principales.

La place principale.La place principale.

Trèves du Moyen-Âge à nos jours

La Maison des Rois-Mages, typiquement médiévale. On y accédait par la porte à droite via une échelle escamotable.La Maison des Rois-Mages, typiquement médiévale. On y accédait par la porte à droite via une échelle escamotable.

Les invasions barbares à partir du IVème siècle après J.-C. ravagent Trèves. Les Francs pillent et brûlent la ville quatre fois, puis les Huns rasent entièrement la cité. Mais le développement du royaume Franc fait de Trèves une ville à nouveau prospère. L’expansion du christianisme amène la construction de nombreux édifices religieux, dont la cathédrale Saint-Pierre.

Édifiée sur les bases d’une maison romaine (qui aurait appartenu à Hélène, mère de l’empereur Constantin), cette gigantesque cathédrale a été terminée en 1270, après sa destruction par les Normands en 882. L’édifice accueille depuis le Moyen-Âge la Sainte Tunique (le vêtement qu’aurait porté le Christ avant d’être crucifié), en faisant un lieu de pèlerinage très fréquenté depuis le XVIème siècle. La cathédrale baroque accueille de nombreuses sépultures de pontifes religieux et politiques du Saint-Empire Romain germanique.

La ruelle des Juifs.La ruelle des Juifs.

La ville en elle-même accueille sa « rue des Juifs » (Judengasse). La communauté juive de Trèves a toujours été très marginale, mais son impact a été relativement important sur son développement.

Les ruelles médiévales sont encore très présentes et donnent un sentiment d’authenticité à la cité. Le palais du Prince Électeur, aujourd’hui siège de l’administration régionale, est visible à côté de la basilique de Constantin. Les nombreux édifices religieux sont très bien conservés, et se fondent dans les ruelles médiévales. Des habitations anciennes aux façades médiévales restaurées côtoient les échoppes atypiques au gré de la promenade dans les rues.

Enfin, le parcours Karl Marx, dans les rues de Trèves, permet de découvrir la jeunesse et l’origine familiale d’un des théoriciens du communisme du XIXème siècle. Il est en effet né à Trèves dans une famille d’avocats en 1818, y a effectué sa confirmation et sa scolarité, puis y a épousé sa femme. La maison natale de Karl Marx, au n°10 de la Brückenstraße, est aujourd’hui un musée dédié à la naissance et à la vie du théoricien. La maison raconte son enfance à Trèves mais aussi ses déboires en France, en Belgique et en Angleterre, pour terminer sur une rétrospective du développement des systèmes communistes dans le monde. Le musée parvient à décrire la vie de Marx et son oeuvre en toute objectivité, sans tomber dans le dithyrambisme, ce qui permet d’avoir une vision nouvelle sur l’homme et son travail.

Maison natale de Karl Marx.  Intérieur de la basilique de Constantin, maintenant temple protestant.  Le palais du Prince Electeur ; à gauche se trouve la basilique de Constantin.  Le palais du Prince Electeur, de plus près.Maison natale de Karl Marx. - Intérieur de la basilique de Constantin, maintenant temple protestant. - Le palais du Prince Electeur ; à gauche se trouve la basilique de Constantin. - Le palais du Prince Electeur, de plus près.

Y aller, y manger, y dormir

Trèves est idéalement située près de grands noeuds de communication. Accessible via l’autoroute A31 en France, puis via l’autoroute A1 au Luxembourg, le touriste peut aussi l’atteindre en longeant la Moselle sur la fameuse route des vins, où il pourra admirer les vignes plantées sur des kilomètres. Côté avion, l’aéroport luxembourgeois du Findel n’est pas loin et concernant le train, une ligne régulière relie Strasbourg et Metz à Trèves.

L’offre de restaurants est très complète sur Trèves. De la petite gargote au restaurant bien noté, tous les goûts sont présents à Trèves. Petit plus pour le restaurant de la Cave Historique (« Historischer Keller » en allemand), au n°46 de la Simeonstraße, qui se trouve... dans une cave médiévale réaménagée. On peut y déguster une des spécialités locales, le « Kellerkrütschen » (escalope panée sur du pain avec un oeuf au plat) ou encore le « Kaasler Teerdisch », à base de viande de porc, de choucroute et de purée.

Les types d’hébergement sont eux aussi très nombreux. Les hôtels de toutes gammes sont disponibles dans le proche centre-ville (dont un en face de la Porta Nigra), mais des logements via des sites de location entre particuliers sont eux aussi bien représentés.

La cathédrale de Trèves.  L'intérieur, avec l'orgue.  Le cloître de la cathédrale.  Une maison de la Renaissance restaurée sur la Neustraße. Les métiers l'ayant occupée y figurent.La cathédrale de Trèves. - L'intérieur, avec l'orgue. - Le cloître de la cathédrale. - Une maison de la Renaissance restaurée sur la Neustraße. Les métiers l'ayant occupée y figurent.

Conclusion

Si vous aimez l’Histoire, les beaux monuments, et que vous voulez découvrir l’Allemagne, la ville de Trèves est pour vous. La multitude d’édifices religieux qui se sont construits sur 2000 ans vont aussi ravir les passionnés d’architecture. La ville a su conserver son caractère médiéval avec ses ruelles étroites et chaleureuses, tout en conservant un cachet typiquement allemand.

Sa proximité avec la France (à environ 30 minutes en voiture de la frontière française) en fait donc une destination de choix pour quelques jours ou une semaine… afin de découvrir Trèves, la « Seconde Rome » de l’Occident.

  • Witz Rédacteur, Testeur, Chroniqueur, Historien
  • « L'important n'est pas ce que l'on supporte, mais la manière de le supporter » Sénèque