Moyen-âgeGuerres byzantino-ottomanes
Chute de Constantinople
1453 : après avoir vécu 1000 ans de plus que son frère de l'Occident, l'Empire Romain d'Orient, connu à la postérité sous le nom d'Empire Byzantin, est en déclin. Sa capitale, la grandiose ville de Constantinople, ne s'étant jamais remise de son saccage - en 1204 - par les Croisés lors de la quatrième Croisade et des 70 ans d'occupation qui ont suivis, est affaiblie. Complètement entourée par un Empire ottoman en plein expansion, la ville vit ses dernières heures et avec elle, tout l'Empire.
Préparation du siège
Dès son arrivée au pouvoir le 9 février 1451, Mehmet II, alors âgé de 21 ans, a comme dessein de conquérir la Ville des Villes. D'abord amical envers les Grecs, le jeune sultan ne tardera pas à dévoiler ses intentions hostiles. C'est pourquoi, dès l'automne 1452, malgré les protestations des Grecs, il entreprend la construction d'une forteresse de forme triangulaire sur la rive européenne du Bosphore, faisant directement face à celle érigée par son grand-père sur la partie asiatique. De cette manière, Mehmet II se fait maître du détroit et peut ainsi contrôler commerce, ravitaillement et renforts ennemis.
Le danger est donc imminent mais Occidentaux et Byzantins préfèrent l'ignorer. Pire - et ce fut une grande erreur - les Grecs ne donnent que peu d'importance à Urbain, un ingénieur hongrois, et à son idée de canon. Les Byzantins ne disposant en effet pas des matériaux nécessaires, n'ayant pas les moyens de le payer et de, surcroit, ne jugeant pas son invention utile, le bonhomme passa au camp turc et construisit pour le sultan un imposant canon qui, disait-il, détruirait même les murs de Babylone. L'engin était tellement grand qu'il fallait 60 bœufs pour le transporter et 200 hommes de chaque côté pour le garder en équilibre.
Carte des forces ottomanes et byzantines lors du siège de Constantinople
Carte réalisée par Sémhur. Source : http://commons.wikimedia.org
Le siège de Constantinople
Le 6 avril 1453, le sultan Mehmet II entreprend le siège de la ville. Ses effectifs sont assez mal connus et varient de 300 à 400.000 hommes d'arpès Ducas, Chalcocondyles et Léonard de Chios, tandis que Phranza n'observe que 258.000 soldats, ce qui parait plus probable. D'après d'autres sources, l'armée ottomane ne dépasserait pas les 80.000 hommes (60.000 cavaliers et 20.000 fantassins). La marine turque est composée de 320 navires mais 18 seulement peuvent être considérés comme des vaisseaux de guerre.
Côté Empire Romain d'Orient, l'Empereur Constantin XI Paléologue, abandonné de tous et en froid avec les autres nations chrétiennes, ne peut compter que sur 4.970 hommes selon Phranza, soutenus par 2.000 étrangers, commandés par Jean Justiniani, un noble Génois à qui on a promis la souveraineté de l'île de Lesbos.
Dès les premiers jours du siège, Mehmet II s'applique à bombarder les murailles, jusqu'alors invincibles, de la ville et ce, jusqu'à sa chute. Cependant, les grands canons turcs ne peuvent tirer que sept fois par jour et plusieurs finiront même par exploser, dont celui d'Urbain, entraînant la mort des canonniers. Les Byzantins ne disposent que de peu de canons et chaque explosion ébranle les vielles murailles. Après de longs et meurtriers combats, les Byzantins parviennent, une fois la nuit tombée, à réparer les dégâts sur les murs et à détruire les travaux qu'entreprenaient les Ottomans, des telle sorte que tout était à recommencer le lendemain pour les soldats du sultan.
Alors que les Ottomans se sont heurtés à une résistance farouche de la part de Constantin XI Paléologue et des Byzantins, cinq grands vaisseaux marchands armés pour la guerre (un bateau portait le pavillon impéral et les quatre autres appartenaient aux Génois et étaient chargés de vivres et de soldats) ont enfin eu des vents favorables et se sont dirigés vers Constantinople pour la soutenir ; la petite flotte se heurte donc à la gigantesque armada turque. Cependant, une grande partie des vaisseaux ottomans étant d'une bien piètre qualité, les bateaux génois, commandés par des pilotes habiles et remplis de vétérans arrivent à repousser les deux attaques turques (une de loin, l'autre de près) et parviennent même à leur infliger des pertes considérables. Les ottomans meneront finalement une troisième offensive qui fut encore plus meurtrière que les deux premières et qui mena à une déroute de la flotte. D'après Phranza, les Turcs auraient perdu ce jour-là 12.000 hommes, ce qui paraît tout de même invraisemblable. Suite à cette victoire, les navires alliés (et ce fut d'ailleurs la seule aide reçue par les Byzantins) purent mouiller en toute sécurité dans le port, la Corne d'Or, qui était protégé par de grosses chaînes. Ces renforts redonnèrent du courage à tous les Grecs.
Le siège de la ville stagnait et Mehmet II pensait que le seul moyen d'arriver à prendre Constantinople était de mener un assaut simultanément sur terre et sur mer. Cependant, il était impossible pour lui d'attaquer par le côté de la mer, l'accès au port étant fermé par une grande chaîne, appuyée de plusieurs navires byzantins et les Turcs redoutaient bien évidemment de devoir livrer un nouveau combat sur mer. L'ingénieux stratagème que trouva alors le sultan fut de transporter ses plus légers navires par voie terrestre, de la rive du Bosphore jusqu'à la Corne d'Or, ce qui faisait approximativement une distance de 16 km. Le relief étant assez inégal, Mehmet II fit aplanir le terrain et couvrit le chemin d'une plateforme composée de planches qu'on avait enduites de graisse de bœuf et de brebis afin de les rendre plus glissantes. En une nuit, les premiers navires avaient atteint le port, comme le sultan l'avait planifié.
Le siège commençait à s’éterniser et Grecs comme Turcs étaient démoralisés : les défenseurs sont épuisés, les fortifications remplies de brèches, Constantin XI est obligé de dépouiller les Églises afin de payer ses soldats et les auxiliaires génois et vénitiens s'accusent mutuellement, tandis que les Turcs s’impatientent. Le 25 mai, après des négociations infructueuses, Constantin XI Paléologue rejette toute option de réédition, bien décidé à défendre sa ville jusqu'à son dernier souffle. Du côté turc, on commença donc à préparer l'assaut général.
L'entrée de Mehmed II dans Constantinople
Huile sur toile de Jean-Joseph Benjamin-Constant,1876, Musée des Augustins (Toulouse)
Celui-ci est lancé le 29 mai 1453 par mer et par terre. Les premiers assauts, composés de troupes indisciplinés uniquement à la recherche de butin, fut repoussé par les défenseurs, épuisés. Vint ensuite les puissants et frais Janissaires. Les Grecs étaient harcelés de toute part par l'artillerie. Blessé, Jean Justiniani, qui avait joué à rôle important dans la défense de la ville, abandonna son poste et se retira, entraînant avec lui de nombreux Latins. La ville semblait perdue. Alors que l'assaut des Ottomans se faisait de plus en plus violent, Constantin fut tué, après une héroïque défense reconnue même par les Turcs, ce qui mena à une déroute générale des derniers défenseurs de la ville. Après un siège de 53 jours, Constantinople était aux mains de Mehmet II, qui devenait ainsi Mehmet II le Conquérant - Fatih Sultan Mehmet.
Conséquences
Après son pillage, Mehmet s'appliqua à repeupler et embellir Constantinople et en fit la capitale de son Empire. Quelques années plus tard, le sultan mit définitivement fin à l'Empire Byzantin en conquérant les derniers domaines qui restaient. La chute de Constantinople (et plus tard le siège de Rhodes par Soliman Le Magnifique) mit définitivement fin à la présence d'un État chrétien dans la région et permit à l'Empire ottoman de s'étendre, devenant ainsi un des Empires les plus puissants de l'histoire, qui perdura plus de 600 ans.
La prise de Constantinople marque pour les Grecs le début d'une occupation qui durera 400 ans, voir 500 dans certaines régions du Nord, jusqu'à la guerre d'indépendance grecque de 1821.
- KingBis This is Sparta, Ancien membre d'HistoriaGames
- "Nous ne dirons pas que les Grecs combattent tels des héros, mais que les héros combattent tels des Grecs." Winston Churchill - "Πάταξον μέν ἄκουσον δέ" (frappe-moi, mais écoute-moi) Thémistocle