Découverte d’un site majeur de mégalithes en Auvergne
... Ou quand l’archéologie préventive permet la résurgence de trésors du passé.
Si vous suivez notre site et l’actualité de notre page Facebook c’est que vous êtes certes des passionnés de jeux vidéo mais plus encore, vous êtes des passionnés d’Histoire. Et vous n’aurez certainement pas manqué cette information reprise en Une tant dans la presse spécialisée que dans la presse généraliste nationale (au point d’en devenir la seconde information la plus lue mardi soir dernier) : un site inédit de mégalithes multimillénaires a été mis à jour en Auvergne.
Souvent décriée par les promoteurs de projets immobiliers de par les ralentissements et les coûts que cela représente, les fouilles archéologiques préventives ont ce mérite de faire ressurgir de la terre notre passé lors des chantiers actuels. C’est ainsi, dans le cadre de travaux d’élargissement de l’autoroute A75, qu’un site de fouille préventive d’1,6 hectare a été mis en place par l’Institut Nationale de Recherche Archéologique Préventive (INRAP) sur le territoire de la commune de Veyre-Monton, dans le Puy-de-Dôme.
Ce site a permis aux archéologues de mettre à jour une trentaine de monolithes, d’1 m à 1,60 m, s’étirant sur 150 m dans l’emprise de la fouille et vraisemblablement au-delà, comme ils l’indiquent dans leur communiqué. Ces menhirs sont bordés d’un autre alignement de gros blocs de pierre, dans la continuité duquel cinq pierres composent un ensemble en fer à cheval. Enfin, six autres blocs régulièrement espacés forment un cercle de 15 m de diamètre.
Au cœur de cet alignement, inédit dans la région, a été mis au jour un cairn de 14 m de long et 6,5 m de large, quadrangulaire, construit autour d’une sépulture monumentale qui accueille les restes d’un homme de grande taille. Puissant d’autrefois ? Religieux ou noble local ? Aucun indice pour le moment n’a pu être mis à jour par les archéologues pour préciser la chose.
Comparable au site armoricain de Carnac que l’on ne présente plus, ce site auvergnat s’insère dans un dense maillage d’expressions mégalithiques présentes dans toute l’Europe occidentale. Il n’en reste pas moins étonnant à bien des égards.
Tout d’abord par l’étonnante perspective présentée par le plus grand alignement de ces mégalithes où les plus grands menhirs sont situés en haut de pente au nord, les plus petits au sud, moins espacés les uns des autres. Cet alignement suit un axe nord-sud, à proximité immédiate du passage d’un col, désormais emprunté par les automobilistes.
Ensuite, au sein de l’alignement principal, l’équipe a fait une découverte pour le moins surprenante : une statue anthropomorphe sculptée dans un menhir en calcaire. On y distingue une éminence arrondie qui fait office de tête, posée sur deux épaules sommairement dégrossies. Sous les seins, on peut deviner des enlèvements symétriques, très érodés, qui ressembleraient à des avant-bras posés sur l'abdomen. Ce type de statue est rare et il s’agit du seul exemplaire connu en Auvergne. Son style fruste et ses petits seins rapprochés permettent de le comparer avec les rares exemplaires septentrionaux, bretons ou suisses.
Cet ensemble, pourtant majestueux, est resté pendant des milliers d’années caché aux populations locales car les monolithes semblent avoir été intentionnellement éliminés du paysage. Ceux-ci ont en effet été abattus et c’est l’ensemble du site (menhirs, cairn, sépulture) qui a été arasé. Difficile de connaître les raisons d’une telle volonté d’effacement, mais les archéologues avancent les hypothèses d’un changement de communauté occupant le site, ou encore d’un changement de croyances qui auraient conduit à cette destruction.
Difficile pour l’heure actuelle d’en dire plus car même si l’occupation du site semble avoir été longue, les contemporains de cette période n’ont laissé que peu d’indices quant à la datation du site. C’est le laboratoire de Lyon qui est chargé, dans les prochains mois, de dater, par le radiocarbone, le squelette et les rares restes de faune présents sur le site. En attendant, les archéologues, en se basant sur les éléments de comparaison extrarégionaux, estiment situer l’occupation principale du site au sein d’une période couvrant du Néolithique à l’âge du Bronze, soit plusieurs millénaires...
Il s’agit là d’une découverte qui ne peut que nous interpeller et qui nous oblige à nous pencher sur nos origines et sur celles des lointaines civilisations ayant occupé notre territoire. Et ce trésor du passé recèle encore bien de secrets qui trouverons, espérons-le, une réponse dans les temps à venir.
Sources : Les mégalithes de Veyre-Monton (Puy-de-Dôme) : alignements de menhirs, tombe, cairn et statue