Last Stand Vol.3 : Bataille de Camerone
Un nouvel article consacré aux Last Stands, défenses acharnées ou faits héroïques dans l'histoire militaire.
Aujourd'hui, un peu de patriotisme/chauvinisme avec pour sujet la résistance de la Légion étrangère à Camerone au Mexique en 1863. Fait peu connu du grand public, il n'en reste pas moins l'un des plus mythiques de la Légion Étrangère, une des unités les plus réputées au monde.
Expédition de Mexique, sous le commandement de Jurien de la Gravière (L'Illustration, 1862).
MEXIIIICOOOOOOOOOOOooooooooo
Mais que faisaient donc des Français au Mexique en plein règne de Napoléon III ? Pour faire court, ce dernier cherchait à appuyer les conservateurs mexicains à rétablir la monarchie au détriment des libéraux mexicains (qui avaient gelé le paiement des dettes mexicaines à l'étranger dont celles en France) tout en instaurant sur le trône du Mexique l'archiduc Maximilien, le frère de l'empereur d'Autriche François-Joseph.
Cette expédition en faveur des conservateurs et clericaux avait donc pour finalités d'agrandir le prestige de la France, d’espérer le remboursement des dettes mexicaines, de récupérer le soutien des catholiques français après la campagne d'Italie de 1859 (création du Royaume d'Italie au détriment du pape) et de resserrer les liens avec les pays européens tout en créant une nouvelle zone d'influence en Amérique. Mais rien ne se passa comme convenu...
Le corps expéditionnaire, sous les ordres du contre-amiral Jurien de La Gravière, est composé de 3000 hommes et d'une flotte de 14 navires de toutes sortes. Les Britanniques expédient 700 hommes et les Espagnols 6000.
Dès le départ, un problème apparaît : qui commanderait l'ensemble de ces forces ? Le général espagnol Prim, arrivé un mois avant les troupes franco-britanniques en décembre 1861, tente de s'imposer à la tête du dispositif. Ses homologues étrangers refusent.
Aucune unité de commandement n'est donc réalisée alors que d'autres renforts français accostent à la mi-mars. Très vite, les Européens comprennent que leur dettes ne seront pas remboursées et que les conservateurs mexicains ne font pas l'unanimité. Anglais et Espagnols plient bagages. Les Français décident de rester.
Seuls contre tous
La lutte s'engage donc contre le gouvernement des libéraux. La marche vers Puebla se déroule sans grandes difficultés. Mais une fois aux portes de la ville, les Français butent sur les défenses mexicaines, tenues par 12 000 hommes.
Ne parvenant pas à remporter la décision, la retraite est sonnée. Etabli à Orizaba, entre Vera Cruz et Puebla, le corps expéditionnaire fortifie ses positions et se renforce petit à petit. Au début de mars 1863, Puebla est de nouveau attaquée.
Le 30 avril, une colonne d'approvisionnement approche de la ville. Craignant une attaque, les officiers français envoient une compagnie de la légion étrangère, commandée par le capitaine Danjou et composée de 2 sous-lieutenants et 62 sous-officiers ou soldats, éclairer le parcours du convoi. 800 cavaliers et plus d'un millier de fantassins mexicains, s'apprêtent alors à attaquer la colonne. La rencontre a lieu près du village de Camaron de Tejeda.
Alors que les légionnaires se reposent après une marche forcée, les Mexicains sont repérés. Très vite, leurs cavaliers chargent les légionnaires qui brisent l'assaut en formant un carré. Pour retarder l'ennemi et permettre au convoi de passer, ces derniers se réfugient dans une exploitation agricole (hacienda).
"Nous avons des cartouches et nous ne nous rendrons pas" Capitaine Danjou
La ferme est loin d'être une position inexpugnable et le faible nombre des forces françaises laisse envisager un combat sans issue. Le faible effectif oblige à n'occuper que la cour de l'hacienda et, dans la batisse mitoyenne, la chambre du nord-ouest.
La cavalerie mexicaine, pied à terre, arrive et encercle l'hacienda, coupant tout moyen de retraite aux assiégés, et s'infiltrant même par endroits !
Les Français refusent de se rendre, l'assaut débute. On se bat au fusil, à la baïonnette, au sabre. La lutte est acharnée, mais le nombre fait son oeuvre. Qu'à cela ne tienne, le capitaine Danjou refuse de rendre les armes et mène une charge qu'il paye de sa vie.
Les officiers tombent les uns après les autres et les offres de reddition se succèdent sans être acceptées. Les légionnaires blessés continuent de lutter aux côtés de leurs frères d'armes valides. Les fantassins du colonel mexicain Milan arrivent alors, augmentant encore l'asymétrie du combat.
Sous un soleil de plomb, assoiffés, écrasés par le nombre, presque tous blessés, les légionnaires n'en démordent pas et offrent une résistance acharnée.
9 heures se sont écoulées depuis le début de l'assaut. Les Mexicains n'ont plus qu'une dizaine d'adversaires, mais quels adversaires ! Le colonel veut des prisonniers.
Les pertes françaises s'accumulent et bientôt, ils ne sont plus que six en état de lutter : le sous-lieutenant Maudet, le caporal Maine et les fusiliers Catteau, Wensel, Constantin et Leonhard. Ceux-ci, retranchés dans un hangar dans l'hacienda, conservent leur dernière balle et chargent, préférant périr que se rendre.
La charge se termine dans les rangs mexicains. Trois légionnaires sont alors encerclés par les baïonnettes ennemies, qui ne cherchent pas à les pourfendre. En effet, un officier arrive, c'est le colonel Cambas. Celui-ci obtient la reddition des légionnaires sous certaines conditions : que les blessés soient pris en charge et que les survivants puissent conserver leurs armes. Il est difficile pour les Mexicains de refuser les honneurs à de tels ennemis.
Défilé des pionniers lors de la cérémonie de Camerone en 2006 au quartier capitaine Danjou à Aubagne.
Durant 9 heures, 65 légionnaires firent face à quelques milliers de combattants mexicains. Acculés et dépassés en nombre, le courage ne les quitta pas. Seulement une vingtaine d'entre-eux survécurent à cette épreuve. Les Mexicains, surpris par une telle résistance, leur rendirent les honneurs.
Ainsi, le colonel Milan, commandant les troupes lors de la bataille, se serait exclamé une fois celle-ci terminée : « Mais ce ne sont pas des hommes, ce sont des démons ».
Aujourd'hui encore, Cameron est considérée comme l'un des plus grands faits d'armes de la Légion.
Inscription sur la plaque ci-dessus :
" ILS FURENT ICI MOINS DE SOIXANTE
OPPOSÉS À TOUTE UNE ARMÉE
SA MASSE LES ÉCRASA
LA VIE PLUTÔT QUE LE COURAGE
ABANDONNA CES SOLDATS FRANÇAIS "
Bibliographie :
- W. SERMAN, J-P BERTAUD, Nouvelle Histoire Militaire de la France 1789-1919, Fayard, 1998, 855 pages.
- H. POINTE (Le), Gloires et légendes : histoire militaire de la France racontée par ses drapeaux : de 1792 à nos jours / Henri Le Pointe ; préface de Edouard Detaille, Jouve, 1911, 533 pages.
- LANUSSE, Les héros de Camaron, Flammarion, 1891, 269 pages.
- A. HUARD, Souvenirs de la guerre du Mexique, 1862-1867 : le combat de Camérone, 1er mai 1863, la prise de Puebla, 17 mai 1863, 1906, 30 pages.
- Lyrik Ancien membre d'HistoriaGames
- "I'm ashamed of you, dodging that way. They couldn't hit an elephant at this distance" Major général John Sedgwick avant d'être mortellement frappé par une balle sudiste...