Info sur le jeu |
PlateformePC Windows |
ÉditeurMatrix Games |
DéveloppeurOn Target Simulations |
Date de sortieDécembre 2014 |
Flashpoint Campaigns : Red Storm - Player's Edition
L'occasion est trop belle de revenir à ce jeu d'exception, paru en octobre 2013 puis remis sur les rayons à la toute fin de 2014, davantage pour lui insuffler une nouvelle vie commerciale que pour marquer l'évolution de son contenu. Car de nouveau contenu il y a peu. Sur le plan nominal, la Player's Edition apporte un nouveau scénario (« Eyes, Ears and Teeth ») et une nouvelle campagne de dix scénarios (« Wolves ») jouable du côté de l'OTAN (Pour être précis, la Player's Edition compte aussi trois scénarios et une campagne concoctés par les joueurs qui n'étaient pas dans l'édition originale.).
Les bonnes raisons de se réjouir proviennent plutôt de l'apparence nettement améliorée des cartes et de la révision du système d'attribution de la victoire, qui en avait bien besoin. Les quelques polissages du moteur de jeu et de l'interface sont également appréciés, sans pour autant révolutionner l'expérience de jeu.
Mais là n'est pas l'essentiel. Ce qui importe, c'est que les Flashpoint Campaigns soient en vie, portées par une petite équipe qui y consacre tous ses loisirs, en maintenant un véritable lien organique avec la communauté de fans.
1. Les positions de départ de l'armée ouest-allemande dans le premier scénario de la campagne « School Teacher ». Le relief en milieu forestier est nettement perceptible. - 2. ien de tel que de faire travailler les autres à sa place. Ces Tunguska de défense anti-aérienne ont trouvé leur cible sans aucune intervention de ma part. - 3. Déploiement soviétique au début du scénario « Eyes, Ears and Teeth ».
Confort accru
Principales caractéristiques
Notre camarade Zglub [lien vers le test] nous a présenté la bête peu après sa sortie de cage. Les lecteurs pressés peuvent se rabattre sur ce bref résumé des mécanismes de FCRS :
- Le jeu met en scène une Troisième Guerre mondiale entre les forces de l'OTAN (États-Unis, Grande-Bretagne et Allemagne de l'Ouest) et celles du Pacte de Varsovie (URSS) durant les années 1980. Les lance-missiles de tous types sont à l'honneur.
- L'échelle est « grand tactique », avec des hexagones de 500 m de rayon, des tours de 15 à 35 min (environ dix fois moins en temps de jeu) et des unités constituées le plus souvent de compagnies. La résolution du tour est simultanée (WEGO) et très explicite quant au déroulement de l'action sur le champ de bataille.
- La structure hiérarchique est modifiable au gré du joueur, avec prise d'effet immédiate (dans la prochaine version du jeu, ce type de remaniement aura un impact négatif sur l'état de préparation des unités concernées)
- Le niveau d'initiative (durée du tour) et la capacité de commandement (nombre d'ordres possibles pendant le tour) sont dynamiques et dépendent de la qualité d'organisation des armées en présence. Ces valeurs se dégradent à la suite de la perte d'un PC, de l'arrivée de renforts ou de l'usure générale des troupes, entre autres facteurs.
- L'IA est en mesure de prendre en charge certaines fonctions tactiques, comme le déplacement régulier des PC pour les soustraire au feu ennemi ou l'attribution des frappes d'artillerie. Elle seule est en mesure de cibler des hexagones « vides » qui émettent une forte empreinte thermique ou un trafic radio élevé (autrement dit qui cachent une artillerie ou un PC ennemi).
- Le système d'ordres est centré sur les attitudes (défendre, tenir, avancer prudemment, avancer rapidement, etc.). Le joueur ne choisit donc pas les cibles ni les munitions, sauf dans le cas de l'artillerie, s'il le désire.
- Les armes sont extrêmement variées et vont des fusils d'assaut aux ogives nucléaires et chimiques. L'artillerie est capable de lancer des munitions chimiques et même des mines.
- La météo agit comme un protagoniste du champ de bataille. À tout moment, un crachin peut boucher les vues à 500 m, voire à 300 m, et les variations de luminosité sont une gêne pour les senseurs des lance-missiles.
Première évidence, les cartes de Flashpoint Campaigns : Red Storm (FCRS) se rapprochent désormais des standards de l'industrie. Ce n'est pas encore la perfection — le relief reste un poil discret —, mais c'est amplement fonctionnel. En cas de doute, il reste toujours la possibilité d'afficher les niveaux d'élévation (Ctrl-E).
Comme par le passé, un détour par les options du jeu est nécessaire pour activer le brouillard de guerre et ajuster le nombre d'ordres en fonction des capacités du personnel d'état-major. Le réalisme est ainsi sauvegardé. Une fois la partie engagée, les réflexes propres à FCRS reviennent vite en mémoire, comme le réglage soigné de l'ordre de bataille afin de s'assurer que toutes les troupes resteront à portée de leur poste de commandement (PC). Il importe aussi de bien encadrer les unités de soutien, car certaines ne rempliront pas leur rôle si elles sont mal aiguillonnées ; c'est notamment le cas de la défense antiaérienne (air defense ou AD), qui répond optimalement à l'ordre « tenir » (hold), et des hélicoptères, qui seront pérennes s'ils se limitent à « défendre » (screen).
Bien que l'IA se soit avérée très performante dès l'édition originale, elle butait parfois sur certains processus plus complexes. Elle semble maintenant s'être dégagée de ces limitations et tourne au quart de tour quand il s'agit de gérer l'artillerie amie. Exit les comportements douteux qui voyaient parfois une batterie de M109 arroser ses propres troupes. On peut désormais confier sereinement nos tubes au centre de coordination des feux (Fire Support Coordination Center ou FSCC), qu'il faut activer sous l'onglet « Active Fire Support ».
En ce qui concerne le volet aérien, les hélicoptères sont davantage à même de participer au combat tout en se tenant à l'écart des zones dangereuses. Les joueurs aguerris conseillent la prudence : commencez par localiser et détruire les défenses anti-aériennes ennemies, puis envoyez les hélicoptères sur un trajet triangulaire qui les ramène à proximité de leur PC, où elles peuvent se ravitailler.
L'IA est en mesure de mieux gérer le ravitaillement d'urgence, les reconnaissances au contact de même que les comportements d'évitement. Les développeurs nous promettent qu'on ne verra plus des chars tourner les talons face à des transports de troupes... En ce qui me concerne, je n'ai relevé qu'une faute d'intelligence commise par la Player's Edition : les unités mobiles adverses se contentaient d'étriller mes PC, lorsqu'elles en avaient l'occasion, mais renonçaient à les poursuivre en vue de les éliminer.
Victoire méritée
Un changement d'importance concerne les conditions de victoire. Dans FCRS, la fin de partie survient dès que le niveau de pertes dans l'un ou l'autre camp atteint le seuil de 70 %. L'ordinateur évalue alors qui est propriétaire des objectifs et attribue en conséquence les points de victoire qui leur sont associés.
Pour éviter que les parties se ferment trop précocement, les joueurs ont maintenant l'option de les poursuivre jusqu'à leur terme (en nombre de tours) fixé par le scénario. C'est particulièrement nécessaire après qu'un joueur a brisé les reins de l'ennemi et qu'il ne lui reste plus qu'à acheminer ses unités jusqu'aux objectifs derrière la ligne de front. En multijoueurs, les adversaires peuvent déterminer dès le départ s'ils préfèrent s'en tenir à l'option par défaut (70 % de pertes) ou prolonger le plaisir.
Narration captivante
Une des grandes forces de FCRS est de combiner un système d'ordres facile à apprivoiser (parce que limité aux attitudes) et une mise en scène éclairante des actions effectuées par les deux camps. Il s'agit du seul jeu, à ma connaissance, qui fournisse un exposé à la fois fidèle, succinct et rythmé de l'évolution de la situation. La résolution du tour s'attarde quelques secondes sur chaque événement significatif du point de vue tactique, c'est-à-dire les mouvements, les tirs des unités de combat et les salves d'artillerie :
- Depuis la Player's Edition, chaque tir de missile anti-char autoguidé (anti-tank guided missile ou ATGM) — de loin la munition la plus efficiente au sein des unités mécanisées et blindées — est signalée par l'apparition d'une petite étiquette sur la carte, ce qui révèle les principales menaces à l'œuvre.
- Les ordres adressés aux artilleurs s'affichent eux aussi, avant que les batteries ne se manifestent par une pluie d'obus sur l'hexagone cible.
- Chaque perte amie ou ennemie est ponctuée par une explosion accompagnée de la mention de l'unité ou du véhicule perdu.
En suivant attentivement ce récit illustré, on reconnaît rapidement les points forts et les fragilités de notre dispositif offensif ou défensif, et ce, malgré qu'il s'agisse de systèmes d'armement dont les arcanes (capteurs et contre-mesures) demeurent nébuleuses pour les non-spécialistes.
Tabler sur les acquis
Il reste aux développeurs à redresser les dernières faiblesses du jeu, liées entre autres à la relative rigidité du système d'ordres. On peut déjà demander à une unité d'adopter une certaine posture au terme d'un déplacement, mais on ne peut pas modifier son attitude pendant le trajet, qui pourtant est divisible en trois points de passage. Il serait utile, par exemple, de pouvoir rendre une unité plus prudente sur un tronçon davantage exposé. On aimerait aussi avoir accès à une attitude défensive plus légère que « défendre », plus près d'un « esquiver », ou lancer les hélicoptères dans des reconnaissances musclées.
Ce genre de modifications ont été inscrites à l'agenda de la prochaine version du moteur de jeu (2.1), qui devrait sortir en même temps qu'une extension (Southern Storm) prévue en 2015. L'extension apportera un lot de scénarios se déroulant dans la partie sud de l'Allemagne de l'Ouest, où les Canadiens, Français, Tchèques et Allemands de l'Est feront leur apparition. Il sera par ailleurs possible aux joueurs de planifier graphiquement leur stratégie sur une carte tactique de façon à influencer le comportement de l'IA. Que du bonheur en perspective.
On le voit, le moteur de jeu évolue lentement dans la bonne direction et alimente notre espoir de le voir bientôt transposé à une époque plus récente ou plus lointaine que l'âge d'or de la guerre froide. Malheureusement pour eux, les amateurs forcenés de la Seconde Guerre mondiale ne sont pas en tête des priorités d'On Target Simulations. Il leur faudra faire preuve de beaucoup de patience...
Flashpoint Campaigns : Red Storm - Player's Edition
- +Toutes les qualités du jeu original (IA amie et ennemie performante, interface instructive, activation différenciée des camps, bonne rejouabilité grâce au serveur multijoueurs PBEM++ et à l'éditeur de scénarios/campagnes, introduction aux principes de la guerre moderne)
- +IA légèrement plus agressive
- +Jeu globalement équilibré et fonctionnel
- -Peu de changement depuis la version originale et évolution trop lente aux yeux des impatients
- -Absence de certaines fonctionnalités (promises dans l'extension prévue en 2015)
- Moet le wargameur québécois, pisteur de jeux de stratégie historiques, testeur de wargames
- "La route d'Auschwitz fut construite par la haine mais pavée d'indifférence." lan Kershaw