Grande Femme de l'Histoire : Zheng Shi

Mère des phoques
Thématique
Piraterie
12 novembre
2013
Zheng Shi au combat, gravure de 1836Zheng Shi au combat, gravure de 1836

郑氏 / Zheng Shi (se prononce Tcheng Shi avec un ton descendant), est considérée comme la pirates la plus éminente de tous les temps. Malgré cela son véritable nom est inconnu, Zheng Shi signifiant simplement « La veuve de Zheng ». La traduction cantonaise est Jihng Sih.

Madame Tsching a marqué son temps et pourtant elle reste peu connue du grand public. HistoriaGames revient sur sa grande épopée.

Ils se marièrent et eurent beaucoup de pirates


Le passé de Zheng Shi avant son entrée dans la piraterie est quasiment inconnu, les seules informations concrètes sont qu'elle est née en 1775 et qu'auparavant elle se prostituait à Canton. C'est à l'âge de 26 ans que les pirates de Zheng Yi la capturent.

Zheng Yi la connaissait déjà en tant que professionnelle, la trouvait d'une grande beauté et bien plus encore puisqu'il en étant amoureux ce qui le conduit à la demander en mariage. Demande qu'elle accepta à condition de bénéficier de 50% de tous les biens de son prétendant.

Lorsque son mari décède au Vietnam après 6 ans de mariage, Zheng Shi reprend le commandant et épouse Chang Pao, le fils adoptif de son défunt mari.

Le veuvage mène au pouvoir

Appuyée par les membres de sa belle-famille : neveu, cousin et nouvel époux, tous les trois pirates - le dernier elle le promut lieutenant - Zheng Shi écarte ses rivaux et accède au pouvoir. À la mort de son mari l'organisation comptait 400 navires. Zheng Shi décupla ses forces navales qui comptent alors 2000 navires et 80 000 pirates, des hommes, des femmes et même des enfants.

Leurs actes de pillage visaient les navires marchands et les villages situés le long des rivières. De ce fait, elle et ses pirates ont extorqué les commerces des villes côtières de Canton à Macao ainsi que dans tous ceux croisés sur les mers près de la Chine. Elle y imposa aussi des taxes et des impôts.

Vivant autrefois à Canton, c'est désormais à Macao qu'elle s'installe pour établir ses stratégies. Ses ennemis la surnommaient « La Terreur de la Chine du Sud ».

Le code de Zheng Shi

Pour diriger une organisation de si grande ampleur, Zheng Shi se devait d'être implacable, autoritaire, crainte ou respectée, pour cela elle imposa son propre code de lois :

Est puni de mort par décapitation quiconque :

  • Donne des ordres sans en avoir reçu l'habilité par Ching Shi
  • Désobéi à une personne d'autorité
  • Vole le fond public et/ou pille les villages qui fournissent l'organisation

Est puni de flagellation quiconque :

  • Déserte, avant d'avoir l'oreille tranchée, celle-ci sera présentée en exemple à tout l'équipage
  • Garde une partie du butin ou des trésors, flagellation au fouet dans le dos

Toutes les marchandises et butins devaient :

  • En premier lieu être présentés devant l'inspection du navire
  • Puis enregistrés par les commissaires de bord avant d'être distribués par les leaders
  • L'argent brut devait être remis au chef d'escadron qui gardait 20%  et rendait le reste au fond public

Des lois ont été conçues uniquement pour les prisonnières :

  • La pratique la plus courante était de les libérer
  • Si une prisonnière épousait un homme du navire, celui-ci lui devait fidélité
  • Violer une prisonnière était puni de décapitation
  • Quant au rapport consentis, l'homme était décapité et la femme jetée à la mer avec des poids

Les historiens déclarent que c'est le code de Zheng Shi qui a rendu son équipe aussi redoutable, soudée, disciplinée, inflexible et même invincible.

La retraite à 35 ans

Seulement un an après son commandement, en 1808, le gouvernement chinois prenant peur face à tant d'ampleur décide d'éliminer Zheng Shi ainsi que toute sa flotte. Dès Janvier elle s'attaque à elle, le gouvernement perd alors 63 navires et se retrouve obligée de compenser les pertes avec l'achat de bateaux de pêches, tandis que Zheng Shi en a profité pour capturer ses ennemis qui se retrouvèrent dans l'obligation de la rejoindre. Ceux qui résistaient avaient les pieds cloués au plancher.

Le gouvernement chinois fait appel au Portugal et à l'Angleterre afin de vaincre Zheng Shi, sans succès. Seul O-po-tae, un pirate rival réussit à la faire battre en retraite. Seulement il se retrouve très vite effrayé à l'idée que sa rivale vienne se venger de lui, il part demander l'amnistie au gouvernement chinois. Zheng Shi réalise que ses ennemis ont de fortes chances de la vaincre. Elle débarque à l'improviste au gouvernement afin de signer l'amnistie pour elle et tout son équipage, ce fut en 1810.

La majorité des membres de l'équipage se reconvertirent dans l'agriculture, son mari, lui, accepta un poste au gouvernement, quant à Zheng Shi elle garda son butin pour retourner à Canton y ouvrir un casino qu'elle dirigea jusqu'à sa mort, elle avait 69 ans.

L'occident ne l'a pas oubliée



Zheng Shi dans Pirate des Caraïbes, incarnée par Takayo FischerZheng Shi dans Pirate des Caraïbes, incarnée par Takayo Fischer.

Alors que les sources asiatiques, même chinoises, au sujet de Zheng Shi sont très maigres, la plus grande des pirates est connue et reconnue par les occidentaux :

  • L'auteur Argentin Jorge Luis Borges rédige en 1954 une nouvelle nommée Zheng Shi, la Dame pirate dans laquelle elle est décrite comme « une femme pirate qui opérait dans les eaux asiatiques, le long de la mer jaune jusqu'aux côtes d'Annam (Vietnam actuel) »
  • En 2003, le réalisateur Argentin Ermanno Olmi réalise Chantant derrière les paravents inspiré de la nouvelle de Jorge Luis Borges dont le nom n'apparaît pas dans les crédits à cause de désaccord sur les droits d'auteurs.
  • Un personnage du même nom apparaît dans le manga Afterlife, il s'agit d'une gardienne qui combat les démons pour protéger les membres de la pègre
  • Son personnage est présent dans le troisième film Pirates des Caraibes, incarnée par l'actrice Japonaise Takayo Fischer (image ci-dessus)

Pour aller plus loin

  • Murray Dian, Pirates of the South China Coast, 1987
  • Mason Paul, Pirates, 2005
  • Arne Jernelöv, Amazonia, 2011
  • Gallinulus Pinguis Sainte-Mère des bébés phoques, Rédactrice, Testeuse, Chroniqueuse
  • "Personne ne peut longtemps présenter un visage à la foule et un autre à lui-même sans finir par se demander lequel est le vrai" Nathaniel Hawthorne