Récit

Époque moderneGuerre de Sept Ans

Première tentative Russe et la bataille de Rossbach

Maréchal de l'Empire
Thématique
14 septembre
2020

Jusqu'à la fin de l'été 1757, les mouvements militaires de la Russie sont plutôt timides. À l'aube de la guerre de Sept Ans, ces derniers prennent le parti de rejoindre l'Autriche et la France pour limiter l'influence croissante de la Prusse.

En mai 1757, l'armée russe composée de 72 000 hommes sous les ordres du maréchal Stepan Fiodorovitch Apraskine arrive en Prusse Orientale après avoir traversé la Pologne.

Du côté prussien, le maréchal Hans von Lehwaldt est un peu isolé. Il ne peut compter que sur 24 000 hommes pour tenter de contrer l'invasion. Toutefois, celui-ci tente un coup de poker.

Bataille de Gross-Jägersdorf

En août 1757, il met ses troupes en branle afin d'intercepter l'armée russe en marche pour lui infliger le plus de dégât. Le 30 août, à l'aube, il les surprend en train de traverser la rivière Pregel à proximité du village de Gross-Jägersdorf. Surprises, les troupes russes paniquent et le général Lopoukhine est tué dans les combats. D'autres violents affrontements se déroulent dans les bois de Norkitten.

Après avoir repris leurs esprits, les Russes se ré-organisent et entraînent les Prussiens face à leur artillerie. Celle-ci est sans pitié. En à peine 4 salves, le centre prussien est mis à mal et une retraite est ordonnée. Malgré l'effet de surprise, la victoire est pour les Russes.

Les Russes font le choix de pas poursuivre leurs attaquants, car ils viennent de perdre 6 500 hommes. Quant aux Prussiens, ils déplorent 4 500 pertes. Le maréchal Apraskine décide de se retirer de la Prusse-Orientale et de se porter en Pologne. Ce repli lui vaudra un passage devant un tribunal militaire de retour à Saint-Pétersbourg...

Malgré l'issue particulière de cette bataille, elle marque un tournant dans le conflit. Les Russes font quelques entrées sur le territoire prussien, mais surtout, les hommes de Frédéric II arrivent à tenir tête à l'ensemble des troupes qui arrivent de toutes parts.

Prélude de la bataille de Rossbach

Le 9 septembre 1757 est signé la convention de Kloster Zeven, un traité de paix entre de petits États allemands comme l'Électorat de Brunswick-Lunebourg, le Landgraviat de Hesse-Cassel et la principauté de Brunswick-Wolfenbüttel. Cette paix leur est imposée à la suite de leur défaite à la bataille de Hastenbeck.

C'est le maréchal Louis-François-Armand de Vignerot du Plessis de Richelieu (duc de Richelieu) qui en est l'instigateur. De ce fait, l'armée française peut continuer sa progression vers Magdebourg et ainsi menacer de plus en plus le flanc de Frédéric II. Celui-ci décide de détacher un contingent de 7 000 hommes pour venir attaquer l'avant-garde française et retenir l'inexorable avancée française.  Le 3 octobre 1757, le duc de Richelieu stoppe son avancée et se retire derrière le fleuve Weser pour un mois.

Toutefois l'état de l'armée de Richelieu n'est pas bon : les troupes sont épuisées et faiblement ravitaillées ce qui entraîne des problèmes de discipline.

bataille de RossbachCharles de Rohan, représenté en habit de Capitaine-lieutenant des Gendarmes de la Garde du Roi, tenant le Bâton de maréchal de France.

Néanmoins, Frédéric II de Prusse apprend que le prince de Soubise arrive par le Sud-ouest et qu'une jonction doit être effectuée avec le prince de Hildburghausen. En effet, il est à la tête d'une armée autrichienne qui a pour but de libérer la Saxe, forte d'environ 11 000 hommes.

Pour l'armée du prince de Soubise, son effectif est porté à 30 000 hommes dont 12 000 qui viennent de l'armée du maréchal de Richelieu. À cela s'ajoutent les 11 000 Autrichiens, portant l'effectif complet à 41 000 soldats, rassemblées sur la rive Ouest du fleuve la Saale. Mais dans les rangs français règne la discorde. Le prince de Soubise n'a aucune confiance en ses hommes et les dépeint comme des voleurs, plus enclins aux meurtres et aux pillages que de se battre sur un champ de bataille. De nouveau, des problèmes de discipline règnent dans les rangs de l'armée française.

Frédéric II de Prusse est à la tête d'une armée d'environ 25 000 hommes dont un contingent qui est parti retarder Richelieu pour éviter toute jonction avec Charles de Rohan-Soubise. De ce fait, il tente aussi d'intercepter l'armée du prince de Soubise. Il part dès le 31 octobre 1757 et en trois jours, il parcourt environ 300 kilomètres et traverse la Saale pour engager la bataille.

bataille de Rossbachbataille de Rossbach, artiste inconnu.

La bataille

Les premiers rapports prussiens surestiment l'armée coalisée, à environ 60 000 hommes. Frédéric décide de positionner ses hommes selon une direction Nord-Sud entre le village de Breda et Rossbach le 5 novembre 1757.

Du côté des Austro-Français, l'entente n'est pas évidente entre Soubise et le prince de Hildburghausen. Et ce n'est qu'après de longues heures de négociation entre les deux hommes qu'un semblant de coopération apparaît. Le plan, qui n'est pas totalement approuvé par Hildburghausen, est de contourner l'armée de Frédéric par le Sud et de tourner vers l'Est le long d'une ligne de crête pour le surprendre avec l'avantage du terrain. Les hommes se mettent en marche le 5 novembre 1757. L'avant-garde est notamment constituée de deux régiments de cuirassiers autrichiens.

bataille de RossbachManœuvre des troupes pour la position

Soudain, Soubise commence à douter de son plan lorsqu'il voit ses troupes tourner vers l'Est. Pourtant le prince autrichien est en faveur d'une attaque immédiate et directe. Le temps de la discussion entre les deux hommes, les troupes ralentissent voire s'arrêtent.

Pendant ce temps, sur le toit d'une ferme à Rossbach, Frédéric étudie le mouvement des troupes (du moins ce qu'il en voit à cause du terrain accidenté). Il constate qu'elles se déplacent vers le Sud, et en conclut que les troupes ennemies se retirent vers Freiberg, là où se trouve du ravitaillement. Il laisse sa place d'observateur au capitaine Gaudi tandis qu'il s'en va manger.

Toutefois, le capitaine, plutôt fin observateur et bon analyste, constate que les troupes prennent une direction plein Est. Il avertit le roi mais celui-ci ne le croit pas. Puisque ce sont des régiments de cavalerie qui ouvrent la voie, selon lui, ce n'est autre qu'une simple reconnaissance. Alors qu'il remonte sur le toit de la ferme pour expliquer son opinion à ses hommes, Frédéric II aperçoit l'infanterie qui se dévoile progressivement. Il comprend qu'il a tord et décide se replier avec le gros de ses troupes plus à l'Est. Frédéric II donne l'ordre de se porter derrière la ville de Lundstedt qui se trouve à l'Est de Rossbach pour prendre pied sur une ligne de crête pour avoir l'avantage du terrain. Il laisse un faible contingent à Rossbach pour couvrir sa manœuvre.

Frédéric se positionne sur les lignes de crêtes de la colline Janus avec son infanterie et son artillerie pour avoir un vis-à-vis sur les troupes alliées. Seydlitz, le commandant de la cavalerie prussienne, se trouve à l'Est de la position de son roi, derrière une colline (Pölzen) sur deux lignes, prêt à surgir.

Du côté des alliés, lorsqu'ils constatent que les troupes prussiennes manœuvrent, ils prennent cela pour un repli, les amenant donc à engager la poursuite. Sans changer leurs plans, les Autrichiens et Français continuent leurs marches en direction de l'Est. Leur but est de se servir des deux collines de Janus et Pölzen pour surprendre les Prussiens dans ce qu'ils croient être leur marche de repli. Or, ces deux collines sont déjà garnies des troupes prussiennes prêtes à l'assaut.

bataille de RossbachLe piège

À 15h, deux grandes colonnes alliées précédées par la cavalerie autrichienne apparaissent devant Frédéric. Depuis la colline Janus, l'artillerie ouvre le feu. En même temps que l'avant-garde alliée s'avance, Seydlitz lance une première charge. Les cuirassiers autrichiens réagissent bien et se déploient en bon ordre devant les cavaliers prussiens. S'engage un brutal corps-à-corps, mais soudain la deuxième ligne de Seydlitz les submerge et obtient l'avantage numérique ; le commandant de la cavalerie prussienne mène lui-même les charges et se fait grièvement blesser. Les cuirassiers autrichiens n'ont pas d'autres choix que de se replier, et Seydlitz n'engage pas la poursuite car il n'oublie pas qu'à proximité se trouve l'infanterie française. Toutefois, l'affrontement des cavaliers ne dure à peine qu'une demi-heure.

L'infanterie arrive en deux colonnes, particulièrement étirées et désorganisées. Car durant leur progression des unités de la réserve sont venues couper les colonnes pour se placer entre elles et notamment gêner le train d‘artillerie.

Lorsque les troupes françaises distinguent la position de l'infanterie et de l'artillerie prussiennes, ces derniers préfèrent garder la formation de la colonne plutôt que d'établir une ligne de bataille. À cette époque, l'un des grands débats dans les rangs militaires français concerne le mode de formation à adopter : ligne de bataille ou colonne. Mais comme à l'accoutumée, c'est cette dernière qui est retenue.

Il est décidé de mener une charge en colonne à la baïonnette à l'assaut de la colline Janus. C'est une erreur fatale. Les Français montent à l'assaut avec un front de colonne large d'une cinquantaine d'hommes. L'artillerie prussienne s'en donne à cœur joie, et les boulets raflent en quelques salves plusieurs centaines d'hommes à la fois.

Lorsqu'ils arrivent à moins de 70 mètres de la ligne prussienne, les salves se font de plus en plus précises. De nouveau les soldats tombent comme des mouches, par dizaines. Un repli est ordonné. Les Français redescendent de la colline mais se voit, en partie, culbutée par ses propres cavaliers qui sont chassés et poussés par la cavalerie de Seydlitz.

Les bataillons prussiens descendent la colline et repoussent l'infanterie française, baïonnettes au creux des reins, vers le Sud. Celles-ci sont très désorganisées du fait des unités de réserves qui se sont mêlées à la marche. Les princes de Soubise et de Hildburghausen sont blessés en tentant de garder un semblant d'ordre face à leurs ennemis.

Les Français et Autrichiens se replient, la bataille à durer moins de deux heures et les alliés ont perdu pas moins de 4 000 à 5 000 soldats et 5 000 autres soldats ont été faits prisonniers. Côté prussien, seuls quelques bataillons ont été engagés et ne déplorent que 548 pertes.

Conséquences

La défaite pour les Français va amener l'effondrement d'un mythe. En effet, cette dernière est considérée depuis fort longtemps comme la plus forte d'Europe. Avec cette victoire, Frédéric II de Prusse considère cette bataille comme une simple promenade.

Qui plus est, cela va permettre au Parlement Britannique (très proche de Frédéric) de rompre le traité de Kloster Zeven et de permettre des manœuvres militaires britanniques près de Hanovre. À Paris, les avis sont partagés, certains vont critiquer sérieusement le commandement militaire, alors que d'autres, comme Voltaire, vont faire l'éloge de Frédéric II de Prusse. 

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