Les généraux qui ont fait l'Histoire : Le général Leclerc

Petit Belge
31 octobre
2016

Le général Leclerc, de son vrai nom Philippe de Hauteclocque, est un des généraux français les plus glorieux de la Seconde Guerre mondiale.

Il fait partie des Français qui avaient encore la volonté de se battre après l’humiliation de Mai 40. Leclerc a tout fait pour rejoindre les Forces Françaises Libres du Général de Gaulle.

Ensuite, il a l’occasion de s’illustrer dans de nombreuses batailles. Leclerc a même l’immense honneur de libérer Paris et Strasbourg.

Cela lui vaut une renommée énorme, qui est toujours intacte aujourd’hui.

Les débuts d’un Grand

Philippe Leclerc de HauteclocquePhilippe Leclerc de Hauteclocque

Philippe de Hauteclocque est né le 2 novembre 1902 dans le Nord de la France, précisément dans la commune de Belloy-Saint-Léonard.

Il est donc adolescent au moment de la Grande Guerre. Alors, même s'il n’a pas participé à cette guerre, le jeune Leclerc a sûrement été marqué par cette période (comment ne pas l’être ?), mais il a aussi connu la joie de la fin de ce qui se devait d’être la « Der des Der ».

Maintenant, parlons de ce qui nous intéresse, c’est-à-dire sa carrière militaire. En effet, il commence sa formation en 1922 à l’Ecole Militaire de Saint Cyr.

Deux ans plus tard, en 1924, Philippe de Hauteclocque sort de Saint Cyr et fréquente ensuite les cours de l'Ecole d'application de Cavalerie de Saumur, qu’il réussit brillamment.

L’Avant-Guerre

La première affectation militaire de Hauteclocque est le 5° régiment de cuirassiers, occupant la ville allemande de Trèves. Rappelons qu’entre 1919 et le plébiscite du 13 janvier 1935, la Sarre fut sous occupation française selon les termes du Traité de Versailles.

Le lieutenant Philippe de Hauteclocque reste un an en territoire allemand avant de recevoir une nouvelle affectation : la 8e Spahis algériens au Maroc. Et c’est là-bas, durant la guerre du Rif, qu’il s’illustre pour la première fois sur le terrain.

Après avoir passé quelques années dans le désert, le jeune officier rentre en France, en 1931, à Saint Cyr, pour devenir instructeur. Ce serait apparemment à ce moment qu’il se blesse. Il serait, en effet, tombé de son cheval, et celui-ci retomba sur la jambe de l’instructeur de Philippe de Hauteclocque et la brisa. Ce petit fait expliquerait la légère claudication qu’il garda à sa jambe, l’obligeant à marcher avec une canne, pour le reste de sa vie. Notons qu’il faut prendre cela avec des pincettes, car l’événement est invérifiable à cause de son insignifiance (rappelons qu’à ce moment, il n’était encore qu’un homme parmi les hommes).

La guerre commence

En 1938, il réussit le concours d’entrée de l'Ecole de Guerre. Malheureusement pour lui (et heureusement pour sa gloire), la Seconde Guerre mondiale éclate et interrompt sa formation.

Lors de l’invasion de Mai 40, le Capitaine de Hauteclocque est dans l’état-major de la 4° division d'infanterie, près de la frontière belge. Sa division faisait partie du fer de lance des armées alliées, qui devait (en principe) arrêter l’envahisseur allemand.

Manque de chance pour Philippe de Hauteclocque, le 25 mai, il est fait prisonnier dans la poche de Lille. Mais ne baissant pas les bras, il réussit à s’échapper. Le lendemain, les Allemands mettent la main sur un civil en vélo, il s’agissait ni plus ni moins du Capitaine de Hauteclocque. Arrêté et interrogé par un officier allemand, le faux civil prétend avoir été réformé car il allait être jeune père de famille. Et là, miracle, l’officier le laisse partir, non sans mépris.

Après cette chance unique, notre futur héros arrive enfin à rejoindre ses lignes. C’est ensuite, le 15 juin, lors d’une contre-attaque en Champagne qu’il est légèrement blessé à la tête. Il est de nouveau prisonnier. Cependant, ça ne décourage pas Philippe de Hauteclocque, il faut seulement attendre deux jours pour qu’il s’échappe à nouveau !

C’est donc avec la volonté de continuer la lutte qu’il repart en bicyclette rejoindre les Alliés. Malgré l’occupation allemande sur la France, il arrive à rejoindre sa femme ainsi que leurs six enfants près de Libourne (Gironde). Il les met au courant de sa volonté de continuer la lutte contre le Reich.

Afin de continuer la guerre, il fallait être en Angleterre, dernière nation à se dresser contre les nazis. Pour ça, il se rend à Bayonne où il parvient à obtenir, le 8 juillet, son visa pour le Portugal. S’en suit, une traversée rapide des Pyrénées et de l’Espagne, pour y prendre un bateau qu'il l'emmène en Grande-Bretagne.

La Guerre continue

Le 25 juillet 1940, Philippe de Hauteclocque rencontre le meneur de la Résistance française en Angleterre, Charles de Gaulle. C’est lors de cette entrevue qu’il prit le nom qui resta gravé dans l’Histoire : François Leclerc. Il change de nom afin de protéger sa famille, ne voulant pas que les Allemands se vengent sur eux. Il est déjà récompensé par De Gaulle, puisque ce dernier nomme Leclerc au grade de commandant. Le nouveau promu reçoit également la mission de rallier l’Afrique-Équatoriale française à la France libre.

C’est déjà le 6 août 1940 qu’il part pour cette mission en avion, notamment avec René Pleven, et ils arrivent à Lagos le 10 août. Ensuite, après plus de 10 jours à travers l’Afrique, il entre dans Fort-Lamy avec un détachement de tirailleurs sénégalais du Tchad. Leclerc arrive à rallier le Cameroun, le Tchad et le Congo à la cause des Alliés. Plus tard, le 8 et 10 novembre, c'est au tour du Gabon de rejoindre le coté de la France libre, encore grâce à Leclerc.

Petite anecdote, Leclerc, considérant que son grade de commandant était insuffisant face au gouverneur général, bricola ses galons de colonel. En un mois, il fut ainsi passé de capitaine à colonel. D'ailleurs, De Gaulle officialise son grade de colonel pour que Leclerc ne soit pas en infériorité hiérarchique par rapport au lieutenant-colonel Bureau (le responsable sur place) à Douala.

Les premières victoires françaises

La troupe de Leclerc à KoufraLa troupe de Leclerc à Koufra

Maintenant que la France libre a une assise territoriale, Leclerc prend le commandement de la « colonne Leclerc » et part pour un voyage de 650 km à travers le Sahara.

Son objectif : le fort de Koufra. Il part avec 350 hommes, une cinquantaine de véhicules, un canon ainsi que du matériel absolument pas adapté aux conditions climatiques d’un désert de sable.

Les premiers éléments de cette colonne arrivent à Koufra le 7 février 1941. Après un raid aérien inneficace du côté allié qui ne donne pas grand résultat, le reste des troupes arrivent le 16 février. Et après avoir défait les Italiens assez facilement, le siège du fort commence. Il dure une dizaine de jours seulement. Le 1er mars, le commandant italien préfère se rendre que de combattre avec acharnement.

Cette victoire est la première de la France libre, mais aussi l’occasion pour Leclerc de formuler le « Serment de Koufra » en ces mots :

« Jurez de ne déposer les armes que lorsque nos couleurs, nos belles couleurs, flotteront sur la cathédrale de Strasbourg ».

Vichy ne fête évidemment pas cette victoire. De ce fait, le 16 juin 1941, le gouvernement de collaboration déchoit ce François Leclerc de sa nationalité française, le condamne à mort par contumace avec la confiscation de tous ses biens.

À partir de cette victoire, Leclerc est promu, en août 41, général de brigade et va mener une guerre de harcèlement dans le Fezzan (au sud de la Tripolitaine) durant les mois de février et mars 1942. Malgré des conditions de vie extrêmes et une logistique horrible à cause de la distance des bases de ravitaillement, cette « expédition » est un succès.

Le 22 décembre 1942, Leclerc lance une offensive sur le Fezzan et dirige lui-même la Force L (L pour Leclerc) en parallèle à l’offensive britannique en Tunisie. Il atteint Sebha le 12 janvier, ensuite Mourzouk le 13 janvier. Le 24, le général Leclerc fait la jonction avec la 8ème armée anglaise. Enfin, le lendemain, il participe à la prise de Tripoli.

Néanmoins, la Guerre du Désert ne s’arrête pas. La Force L et son Chef participent alors à la campagne de Tunisie au début de l’année 1943 où l’Afrika Korps de Rommel est une bonne fois pour toute vaincue. Le 20 avril, huit jours après les derniers combats, il a l’honneur de participer au défilé de la victoire à Tunis, à la tête de ses hommes. La guerre en Afrique est gagnée, maintenant c’est au tour de la « Festung Europa ».

La Libération

Insigne de la 2e division blindéeInsigne de la 2e division blindée

Après cette glorieuse victoire, Leclerc progresse encore dans la hiérarchie militaire en étant promu général de division. Il y a aussi de l’évolution pour la Force L. En effet, c’est fin mai 1943 qu’on la rebaptise « 2ème division française libre ».

Par la suite, elle prend son nom définitif et devient la célébrissime 2ème division blindée (en abrégé la 2eDB). Mais les changements ne sont pas seulement au niveau du nom, son organisation devient américaine et elle est renforcée par des Espagnols qui ont quitté la dictature franquiste ainsi que des déserteurs provenant du camp vichyste.

La division est stationnée à partir de septembre dans le camp de Temara au Maroc afin de se compléter et de s’entrainer jusqu’en avril 1944. Le 14 avril la division rentre en Angleterre en vue du Débarquement, sous les ordres de la 3ème armée de Patton.

La division ne participe pas aux premiers combats de Normandie, elle est envoyée combattre en France seulement le 1er août. La division de Leclerc avance tout d’abord vers Alençon et Argentan. En parallèle à cela, il prête main forte pour refermer la Poche de Falaise aux alentours de Chambois. Alençon est libérée le 12 août. Mais le lendemain, Argentan a moins de chance. Les Allemands résistent et Leclerc n'arrive pas à la libérer. Il réclame alors l’autorisation de se retirer lui et sa 2eDB du théâtre normand pour, je cite : « ne plus perdre un seul homme ici et libérer Paris, la capitale de la France ».

De son côté, le général de Gaulle a littéralement martelé les Alliés pour que l’honneur de libérer la capitale revienne à des Français, acte évidemment fort symbolique. Ces demandes répétées obtiennent finalement l’accord de tous. Ainsi, le 19 août 1944, des soulèvements éclatent dans Paris et le général Bradley autorise Leclerc à foncer sur la capitale.

Leclerc donnant ses ordres depuis sa Command Car lors de la libération de ParisLeclerc donnant ses ordres depuis sa Command Car lors de la libération de Paris

Après une rapide attaque (les Allemands n’ayant plus tellement l’envie et les moyens de combattre becs et ongles), Paris est délivrée de l’occupation allemande le 25 août, avec la reddition de Dietrich von Choltitz, commandant de la garnison de Paris. C’est à la Gare de Paris-Montparnasse que Leclerc reçu sa capitulation. Ne restent ensuite que des combats sporadiques et isolés, qui ne dureront pas longtemps.

La division devenue célèbre se dirige début septembre vers Strasbourg, bien décidée à tenir la promesse faite trois ans plus tôt. Toutefois, l’objectif n'est atteint que le 23 novembre, lorsque le drapeau français flotte à nouveau sur la cathédrale de Strasbourg. Après cette période de gloire, s’ensuit un arrêt forcé dans l’Alsace inondée par la Wehrmacht. Leclerc est donc en position défensive et participe notamment à la réduction de la poche de Colmar.

L’invasion de l’Allemagne

Peu de choses à raconter à partir de Novembre 1944. Le front stagne. La division Leclerc reprend alors sa marche en même temps que les armées alliées en 1945, direction l’Allemagne. Mais le Reich n’a plus grand-chose à opposer à l’Ouest depuis la catastrophe des Ardennes. La 2eDB a alors le malheur de tomber sur le camp de concentration de Dachau et découvre toute l’horreur de la barbarie nazie. Leclerc et ses hommes en ressortent évidemment profondément marqués.

Dans la nuit du 4 au 5 mai 1945, à Berchtesgaden, des éléments du groupe Leclerc s’emparent du Nid d’aigle (Kehlsteinhaus), résidence personnelle d’Adolf Hitler. Mais cette capture est aussi revendiquée par la 3ème division d’infanterie américaine ainsi que par la Easy Company de la 101ème Airborne. Encore aujourd’hui, on ne se sait pas exactement qui a été le premier à prendre le Nid d’aigle.

Vers l’Asie

Leclerc, parmi les représentants des autres nations alliées, pendant le discours du général MacArthur, après la reddition du Japon.Leclerc, parmi les représentants des autres nations alliées, pendant le discours du général MacArthur, après la reddition du Japon.

Leclerc ne commande plus la 2eDB, il fait ses adieux à sa division le 26 juin 1945.

Il part pour prendre en charge l’entraînement du Corps expéditionnaire français en Extrême-Orient, avec pour mission de reprendre l’Indochine française. Mais le corps expéditionnaire n’interviend jamais, le Japon se rend.

On en vient au 2 septembre 1945, date à laquelle le Japon signe sa capitulation à bord du cuirassé USS Missouri. Tous les représentants alliés sont présents.

Pour la France, c’est Leclerc qui a l’ultime privilège de signer la capitulation au nom du pays, mettant fin à la Seconde Guerre mondiale.


L’après-guerre

Leclerc et Ho Chi Minh lors des accords Hô-Sainteny, signés le 6 mars 1946Leclerc et Ho Chi Minh lors des accords Hô-Sainteny, signés le 6 mars 1946

Après la guerre, Leclerc dirige le Corps expéditionnaire français en Extrême-Orient pour récupérer l’Indochine alors en pleine révolution. Leclerc mène à bien cette mission, la colonie française est reprise en mai 1946. Plus tard, il est nommé inspecteur des forces en Afrique du Nord, et deux jours après cette nomination, le 14 juillet 1946, il est promu au grade de général d'armée.

Mais ce héros n’est pas immortel, car le 27 novembre 1947, Leclerc embarque dans un B-25 pour une inspection en Afrique du nord. Malheureusement, l’avion est pris dans une tempête de sable, ce qui l’oblige à voler à très basse altitude, ce qui lui sera fatal, aucun survivant. Dans cet accident, il y avait officiellement douze passagers, mais un treizième corps aurait été retrouvé, corps qui alimente depuis de nombreuses théories (avec pas mal de complot dedans), certaines plausibles et d’autres farfelues, mais rien n’est encore sûr aujourd’hui.

La nouvelle de sa mort est un choc en France, car Leclerc représente à lui seul, celui qui a lavé la défaite de 40. À ce titre, le 23 août 1952, il est fait maréchal de France à titre posthume. Sa dépouille repose toujours dans la crypte des Invalides (Paris).

Controverse autour de Leclerc

Au matin du 6 mai 1945, Leclerc se trouve à Bad Reichenhall (près de Berchtesgaden) et dans la même journée, douze SS français de la Division Charlemagne sont faits prisonniers par les Américains, qui les enverront à la 2eDB. Leclerc a un court échange avec ces prisonniers, celui-ci demande ; « N'avez-vous pas honte de servir sous cet uniforme ? ». Un SS français lui aurait répondu ; « Et vous, vous portez bien l’uniforme américain ! ». Leclerc, visiblement agacé, aurait quitté l’endroit en lançant ceci : « Débarrassez-moi de ces gens-là ! ». Ensuite, le 7 ou le 8 mai, les prisonniers sont fusillés sans aucun jugement. Un aumônier, le père Gaume, se trouvait sur place pour accompagner les fusillés ; il a déclaré que l’ordre d’exécution a été donné à l'état-major de la division ou par le commandant français, mais sans réelle précision.

Le lieutenant Morvan, qui commandait alors un des pelotons d’exécution, laisse supposer que l’ordre vient du haut état-major de la division mais il est impossible de placer quoi que ce soit derrière ce terme.

Est-ce que Leclerc, horrifié par les horreurs des camps, aurait cédé et donné cet ordre ? « Débarrassez-moi de ces gens-là ! » aurait-il été mal interprété ? Le mystère reste entier et « tabou », car Leclerc reste une icône de la France.

Leclerc face à la 33e Waffen-Grenadier-Division de la SS CharlemagneLeclerc face à la 33e Waffen-Grenadier-Division de la SS Charlemagne

Bibliographie

  • Jean-Christophe Notin, Leclerc, Tempus Perrin, 2010, 832 pages.
  • Jean Compagnon, Leclerc, Maréchal de France, Flammarion, 1989, 625 pages.
  • Matthieu Mancuso Chroniqueur, Historien
  • "Si vous traversez l’enfer, continuez d’avancer." Winston Churchill
    "Résiste et mords !", devise des Chasseurs ardennais de l'armée belge