Last Stand Vol.1 : Insurrection de Varsovie

1er août 2014 par Lyrik | Last Stand | Deuxième guerre mondiale - Front de l'Est | Histoire

Last Stand Vol.1 : Insurrection de Varsovie

Il arrive parfois que dans les instants les plus sombres, une poignée d'individus fasse front contre le pire des destins. N'écoutant que leur courage ou leur folie, avec ou sans expérience du combat et sans véritable espoir de réussite, ce genre de personnages peut parfois faire la différence.

Il se trouve justement que l'Histoire est parsemée d'événements auxquels prirent part de telles figures. Je vais commencer le premier article de cette chronique, consacrée aux Last Stand et autres grands moments de bravoure, à l'insurrection de Varsovie.

Une insurrection aux enjeux précis

Tadeusz Bór-Komorowski, commandant en chef de l'Armia KrajowaAlors que l'Armée Rouge repoussait la Wehrmacht sur l'ensemble du front Est et que le 3e Reich perdait pied en France, de plus en plus les mouvements de résistance s'activaient pour accélérer la débâcle ennemie. En Pologne particulièrement, depuis la défaite causée par la campagne éclaire en 1939, la résistance polonaise était largement dominée par l'Armia Krajowia, le mouvement le plus organisé en Pologne occupée et affilié au gouvernement en exil à Londres. Voyant les Soviétiques approcher de la capitale et les Allemands refluer, l'insurrection fut lancée le 1er aout.

Plus que libérer la capitale de l'oppresseur nazi, il s'agissait aussi de reprendre le contrôle avant l'arrivée de l'armée rouge et ainsi éviter une domination soviétique sur le pays. En effet, depuis le début de la guerre, les relations entre la Pologne et l'URSS étaient tendues  Staline ayant pactisé avec Hitler (accords Molotov-Ribbentrop) et attaqué la Pologne pour en occuper une certaine partie en septembre 1939, décapité l'intelligentsia du pays lors de massacres (Katyn) et avait finalement créé un gouvernement polonais communiste en exil suite à l'opération Barbarossa aux dépends du gouvernement polonais en exil à Londres qu'il ne reconnaissait d'ailleurs pas.

La résistance polonaise devait donc se dépêcher, surtout que l'armée rouge, via la radio, incitait la population à prendre les armes ! Situation on ne peut plus ambigüe, par rapport aux antécédents précédemment cités et aux nouvelles atteignant les oreilles des dirigeants de la résistance faisant part du désarmement, de l'arrêt et parfois même d'exécutions sommaires de membres de l'Armia Krajowa par l'armée rouge. Les Soviets semblaient donc au courant des projets de l'AK et précipiter les événements leur permettrait de s'emparer facilement de Varsovie après une lutte qui affaiblirait à la fois la Wehrmacht et l'AK.

Deux mois de résistance

Après avoir reçu le feu vert de Londres, l'insurrection fut lançée par le général Tadeusz Bor-Komorowski, commandant en chef de l'Armia Krajowa. 50 000 membres de l'AK peu ou pas expérimentés se lancèrent donc à l'assaut des rues de Varsovie, face à une garnison de 10 000 soldats allemands et 5000 policiers et SS. Le rapport de force peut sembler nettement en faveur des Polonais. Néanmoins, les Allemands pouvaient être renforcés à tout instant par 90 000 hommes combattant à proximité et l'armement des résistants laissaient largement à désirer, consistant en de vieilles armes, de prises de guerres, d'armes produites clandestinement ou parachutées par les alliés anglo-saxons, dont la qualité n'égalait en rien celle des armes de l'ennemi et dont le nombre drastiquement limité ne permettait d'équiper à peine la moitié des 50 000 hommes.

Char Panther allemand capturé par une section du bataillon Zośka sous le commandement de Wacław MicutaCombattant rues par rues, immeubles par immeubles, les membres de l'AK parvinrent à s'emparer de certaines zones de Varsovie notamment son centre mais échouèrent à d'autres, comme dans le district de Mokotow ou la rive est de la Vistule. A partir du 4 août, les insurgés se mirent en position défensive, les Allemands, renforcés, passant à la contre-attaque. Celle-ci fut violente et ponctuée d'exactions. Tout au long du mois d'aout, les Allemands parvinrent, au prix de pertes significatives à reprendre le dessus, bien que certains bâtiments tinrent jusqu'à la reddition. Passant par les égouts, les insurgés allaient de quartier en quartier, se battant avec l'énergie du désespoir. Ramassant les armes et l'équipement des Allemands il n'est ainsi pas rare de voir des photographies de l'insurrection présentant des membres de l'AK en uniforme allemand. De même certains groupes parvinrent même à capturer des véhicules, comme le bataillon Zośka qui captura des chars Panthers !

Mais abandonné de tous, l'AK commença à perdre du terrain. Les aviateurs alliés parachutèrent au prix de lourdes pertes de l'équipement et des munitions. Mais comme Staline refusait de les laisser atterrir sur les aérodromes soviétiques, ces missions furent limitées pour ne pas perdre trop d'équipages. De même, la brigade parachutiste stationnée à Londres et réclamée par l'AK ne fut jamais envoyée (elle fut envoyée et décimée lors de l'opération Market Garden). Et quand les alliés anglo-saxons forcèrent Staline à agir, ce dernier se contenta de « jeter » des armes par avions, sans parachutes et donc inutilisables car abimées lors de leur chute.

Les Polonais gagnèrent tout de même quelques frères d'armes en libérant le camp de concentration de Gęsiówka, les détenus se battant à leurs côtés jusqu'au dernier. Néanmoins, l'armée allemande ne faisant pas de quartier, il était relativement difficile de leur résister. Ainsi, le bataillon Dirlewanger, bataillon SS, envoyé chasser les résistants, se démarqua par sa cruauté et ses exactions envers les civils.

Cependant, à partir du 10 Septembre, l'Armée Rouge atteignit la rive Est de la Vistule. Au grand plaisir des Allemands, elle resta passive. Néanmoins, des unités de la première armée polonaise présente dans ses rangs, commandée par le général Zygmunt Berling, se lancèrent à l'aide de leurs compatriotes de l'AK. Mais sans soutien, ceux-ci furent étrillés et Berling fut relevé de son commandement. Voyant l'armée rouge inactive et les efforts des autres alliés vains (les parachutages de matériels furent plus que limités) l'AK comprit que l'insurrection ne pouvait être gagnée, mais jusqu'au 2 octobre, par honneur, elle tint tête aux forces allemandes. La capitulation fut signée par le général Tadeusz Bor-Komorowski. De justesse, Hitler accorda aux insurgés le statut de prisonniers de guerre, leur évitant ainsi la potence du fait de leur ex-statut de résistants/partisans/francs-tireurs.

Pendant 63 jours, plusieurs dizaines de milliers d'hommes, de femmes et d'enfants de tout âge luttèrent héroïquement au coude à coude pour libérer leur ville dans un isolement relatif tout en faisant face à l'hostilité ou à la passivité de leurs alliés.

Environ un tiers des combattants de l'AK perdirent la vie, entre 10 000 et 20 000 Allemands furent tués ou portés disparus. Quant à la population de Varsovie, ses pertes s'élevèrent à une ou deux centaines de milliers de victimes, la ville ayant été détruite à plus de 60%. Jusqu'au bout, les Polonais résistèrent, mais ne purent échapper à leur destin. Ils représenteront d'ailleurs de farouches résistants au régime communiste qui s'imposa dans leur pays après la libération menée par l'Armée Rouge.

Bibliographie

  • Le Figaro, 1944 : la libération de la Pologne, La Seconde Guerre mondiale 1939-1945, Vol.25, 2011, 141 pages.
  • Alexandra Kwiatkowska-Viatteau, 1944 Varsovie insurgée, Editions Complexe, 1984, 224 pages.
  • Jacques Legrand (coll.), Chronique de la Seconde Guerre mondiale, Chroniques, 2003, 792 pages.

Au niveau des jeux :

  • Lyrik Le Vétéran, Chef de la section audiovisuelle, Testeur, Correcteur

  • "I'm ashamed of you, dodging that way. They couldn't hit an elephant at this distance" Major général John Sedgwick avant d'être mortellement frappé par une balle sudiste...