Info sur la série
Titre originalCeux de 14
SaisonMini-série
Durée 6x52 min
GenreGuerre, drame
CréateurOlivier Schatzky
1ère diffusion2014

Ceux de 14

Le_Moine
5 novembre
2014

En cette année de centenaire du début de la Première Guerre mondiale, les documentaires et fictions sont nombreux. C'est dans ce contexte que France 3 a décidé d'adapter le roman de Maurice Genevoix, Ceux de 14. Annoncé comme un Band of Brothers à la française, découvrons pourquoi la réalisation d'Olivier Schatzky (Chez MaupassantMonsieur Naphtali...) est loin de la série de et avec Tom Hanks.

Ceux de 14 nous fait ainsi découvrir les premiers mois de la Grande Guerre. On y suit Maurice Genevoix (interprété par Théo Frilet), alors étudiant en 1914, qui se retrouve appelé et officier dans le 106e Régiment d'Infanterie. Comme dans le recueil de récits de l'auteur, l'accent est mis sur l'humain et les relations entre les soldats. Cette grande famille, ces frères d'armes, qui vont se retrouver dans la même galère et le même enfer pendant 4 longues années. Un postulat de départ intéressant que ce soit pour ceux qui ont envie de découvrir un peu plus sur la vie de cet écrivain et/ou sur la vie pendant les premiers mois de la Der des der.

Manque de chance, France Télévisions a voulu un peu trop manger à tous les râteliers et on est très très loin d'un Band of Brothers, même en tenant compte de l'immense différence de budget. La série débute sur une séquence se déroulant en 1915, quelques minutes avant l'assaut de la crête des Eparges, et puis direction 1914 où l'on retrouve un Maurice Genevoix jouant des mots tout en flirtant avec deux sœurs. Une séquence longuette, et jouée de façon très moderne, dans le seul but d'amener la mobilisation générale et celle de Genevoix.

Le jeune lieutenant se retrouve ainsi à la tête d'une compagnie de la 12e division d'infanterie. Poste qu'il occupera jusqu'en 1915 aux côtés de son ami le lieutenant Robert Porchon (mort en 1915). Et durant les 6 épisodes de 52 minutes de la série « Ceux de 14 », on suivra ainsi les déplacements de la compagnie de Genevoix, ses combats et aussi la vie des deux sœurs à l'arrière. Ces scènes, souvent longues et parfois inutiles à l'histoire, cassent le rythme des épisodes et renforce ce sentiment de « ratissage un peu trop large » de la part de la réalisation.

En effet, comme annoncé par la productrice Annick Ouvrard, le but était de réaliser une série pour tous. Enfants comme adultes. Le problème, c'est qu'on se retrouve avec des histoires de flirts et d'amours bien longues, et jouées comme s'il s'agissait de personnages de 2014 (mention spéciale aux deux sœurs qui pourraient faire croire qu'elles jouent deux lesbiennes...), un jeu d'acteurs parfois trop moderne, et surtout une ambiance bien trop « gentillette » voire naïve. Les deux derniers épisodes montent d'un cran, et permettent de dépeindre un peu mieux l'enfer des combats mais là on se demande pourquoi avoir voulu offrir un contenu accessible aux enfants si c'est pour montrer des têtes coupées ou des boyaux... Preuve que la série ne sait vraiment pas trop à quel public s'adresser. Idem pour l'adaptation des écrits de Genevoix. Déjà que son style est assez copieux et difficile à adopter, mais ici on passe de moments théâtralisés au possible à des séquences modernisées. La série se retrouve ainsi le cul entre deux chaises. Théo Frilet joue à la perfection le jeune homme débarqué dans un univers qui le dépasse, mais en fait des tonnes et récite ses textes sur des intonations dignes d'un acteur de théâtre. Lui qui doit porter la série, et le costume de héros, rate le coche et n'aide pas vraiment la série.

Mais ce qui est le plus marquant c'est que la série veut jouer la carte de l'humain, du réalisme, mais passe à côtés de beaucoup de choses. Déjà, il y a cette même forêt que l'on voit du début à la fin... Les combats manquent d’intensité (sauf dans les deux derniers épisodes) et sont parfois brouillons. La compagnie est réduite à quelques dizaines d'hommes (contre 220 comme annoncé par Genevoix dans la série), et les assauts font parfois très lights et sans envergure. La bonne idée de filmer près des acteurs est mal exploitée dans les scènes de combats où la caméra se focalise sur les jambes des soldats. La mise en scène a parfois du mal à retranscrire l'intensité des combats et ne bénéficie pas d'un travail post-prod qui gommerait cette sensation. Les affrontements à 200 m de distance qui ne font aucun blessés, les faux raccords (détente simulée par le comédien avant le coup de feu, figurant qui tombe avant le bombardement, barillet vide mais qui tire quand même, figurant qui pointe son fusil vers un allié alors qu'il tire...), tenues incorrectes (tenue d'hiver en été, pantalon rouge qui disparaît pour revenir sur les officiers sans raisons/explications), une logistique absente, sans oublier certains effets sonores/visuels un peu cheap et pas très raccords avec l'action. Bref, Ceux de 14 possède son lot de défauts qui font que la série manque de crédibilité et de volonté. Et pourtant, les conditions de tournage pluvieuses et boueuses au printemps 2013 offraient une bonne base.

Tout n'est pas mauvais dans cette série, on pourra saluer les performances de Michaël Abiteboul, Côme Levin, ou encore Romain Lancry, entre autres. On sent bien, également, la solidarité qui s'installe progressivement entre les soldats, ainsi que l'esprit de camaraderie. Ceux qui ne le savent pas découvriront le manque de confort, les conditions de vie dans les tranchées, les allers-retours entre première ligne et l'arrière, le clivage entre officiers et soldats, mais aussi le haut commandement loin de la réalité et obstiné, les bombardements alliés dangereux pour tous, l'installation dans une guerre de position à la fin 1914, etc.

En définitive, Ceux de 14 nous laisse un goût amer et d'inachevé. Une bonne idée de départ qui allait mettre l'humain au centre d'une mini-série TV tout en dépeignant la réalité des combats. Mais au final, le résultat n'est pas à la hauteur de nos espérances et de l'hommage qu'il convient de rendre à ces soldats qui ont pris part à la Première Guerre mondiale. Théo Frilet n'arrive pas à porter son costume d'officier et à amener la série là où elle aurait dû aller. La réalisation manque de réalisme et de rigueur, et la production a voulu faire quelque chose de trop « mass friendly » tout en se perdant dans différents styles. Bref, Ceux de 14 se prend les pieds dans les barbelés et rate le coche de marquer le paysage audiovisuel français tout en s'installant comme un incontournable des hommages multimédias pour le Centenaire de la Grande Guerre. Néanmoins, il est intéressant de découvrir cette série qui donne envie d'en savoir encore plus sur les premiers mois de la Première Guerre mondiale. A voir donc, mais en étant prévenu.

  • Le_Moine Fan de Rallye et des brunes, Ancien membre d'HistoriaGames
  • « La fin de l’espoir est le commencement de la mort. » De Gaulle
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